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414ème semaine politique: Sarkozy, Le Pen, Hollande... Ils ont tous changé !!

Publié le 11 avril 2015 par Juan

414ème semaine politique: Sarkozy, Le Pen, Hollande... Ils ont tous changé !!

Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen et François Hollande ont bel et bien changé.

La preuve.


Sarkozy a changé.
Nicolas Sarkozy est un homme politique. On a déjà glosé, dans ces colonnes et ailleurs, sur comment l'homme avait agité, abimé, affecté la période politique récente. La Sarkofrance n'était peut-être qu'un symptôme. Et Sarkozy n'est pas seul. Mais cette semaine, il a pris peur.
C'est une phrase, un "Off" de trop que Nicolas Sarkozy affectionne tant, qui a tout déclenché. Le Parisien rapporte que l'ancien monarque a comparé François Bayrou au "virus du SIDA". Sitôt l'information connue, il a annoncé, sur Facebook, qu'il portait plainte pour diffamation. Lisez plutôt:
"Ayant pris connaissance avec stupéfaction et avec écoeurement des propos qui me sont prêtés et que je n'ai jamais tenus, dans l'article signé de Martine Chevalet paru dans l'édition du Parisien du 8 avril sous le titre + Les centristes divisés face à l'UMP +, j'ai chargé mon conseil, Me Thierry Herzog, d'engager immédiatement des poursuites judiciaires qui s'imposent du chef de diffamation contre l'auteur de cet article, le directeur de la publication ainsi qu'à l'encontre... de tous ceux qui ont reproduit ou reproduiront ces allégations mensongères".
Rien que ça.
Nicolas Sarkozy est rattrapé par ses "Off". Cela fait plus d'une décennie que ça dure. Des journalistes privilégiés, auditeurs discrets ou critiques, supporteurs inavoués ou reporters indépendants, les ont consignés pendant une décennie quand Sarkozy cherchait l'Elysée puis l'obtint.  Ces OFF sarkozyens donnèrent plusieurs livres, faramineux en révélations. Ils concordaient tous. Ils livraient ce constat d'un homme à la parole libérée dans l'insulte et l'irrespect. Sarkozy parlait comme Le Pen et quelques autres.
Sarkozy a changé. C'est vrai. Il porte plainte alors qu'il laissait auparavant les "Off" les plus terribles rejoindre les "On" les plus effarants (du "casse-toi pov' con" au discours de Grenoble et toute la déchéance d'une fin de mandat indigne).
Sarkozy a changé.
Il a la trouille de ses propres "Off." Sa trouille est d'autant plus grande qu'il espère gagner du terrain au centre, sur les plates-bandes de son rival Alain Juppé. A un journal, il confie combien il en a trop fait avec "l'Identité nationale". Sarkozy est une girouette. 

Le Pen a changé. 

Il suffit d'une interview du paternel dans les colonnes d'un torchon historique de l'extrême droite où il déclare sa fascination pour Pétain et quelques autres déclamations xénophobes pour Marine Le Pen et ses sbires poussent des cries d'orfraie. OMG! Jean-Marie Le Pen avait encore "provoqué". Vendredi, Marine Le Pen déboule sur TF1 pour dénoncer les propos de son père, et confirme qu'elle a convoqué un bureau politique pour examiner les faits incriminés.
Ce psycho-drame, qui divertit un temps l'attention médiatique d'une affaire de financement illégal du FN , ressemblait à une mauvaise pièce.
La ficelle était grosse, la manoeuvre énorme.
Marine Le Pen a tout gagné. Sa "notabilisation" locale est en cours. Le FN a gagné une soixantaine de conseillers généraux. A la fin de l'année, il y aura les régionales. 2017 est hors de portée, mais 2022 un objectif de conquête présidentielle soudainement raisonnable. Il ne restait qu'une chose à faire, isoler brutalement les anciennes rancoeurs antisémites d'une extrême droite qui n'était pas remise du retour de la République en 1944. Jean-Marie le père rend ainsi service à Marine future présidente avec ce clash ultime. Il donne à la seconde une preuve supplémentaire et décisive de la normalisation du parti frontiste.
Le véritable séisme qui pourrait frapper le FN est l'accélération des enquêtes sur le financement illégal du FN. Les griefs de la justice sont nombreux -  emplois fictifs au Parlement européen, financement illégal de la campagne de Marine Le Pen en 2012, surfacturations de l'agence Riwal dirigée par un proche de Mme Le Pen, financement douteux du micro-parti personnel "Jeanne" de la présidente du FN - et les premières mises en examen sont tombées, dans la plus grande discrétion, pour faux et usage de faux, abus de biens sociaux et blanchiment, et financement illégal.
Nicolas Sarkozy est empêtré avec l'affaire Bygmalion, Marine Le Pen a son affaire Riwall.
Hollande a changé
Hollande a changé. Mais ne lui dite pas. Il croit l'inverse. Nul changement de cap depuis 2012 nous assure-t-on. Il suit son cap, convaincu de sa réélection en 2017 par l'effet magique d'un 21 avril à l'envers. Imaginez le prochain discours du Bourget, en janvier 2017, avec un Hollande célébrant le rétablissement des marges, la baisse du coût du travail et la cyber-surveillance efficace du pays.
Imaginez, puis comptez les bataillons.
Avec ses conseillers et quelques rafales de textos échangés avec Valls, il avait placé la semaine sous le signe de l'investissement après un lundi de Pâques quasiment familial. Quelques jours après ses propres maigres annonces à propos de la création d'un petit fond de prêts relais financé par des assurances, Hollande laisse Valls organiser une vaste conférence de presse... à l'Elysée.
Mais les vessies ne ressemblent même plus à des lanternes. "L'opération séduction" suffit pourtant à convaincre Martine Aubry de rejoindre la motion de la direction actuelle du PS plutôt que de soutenir les frondeurs dans la perspective du Congrès de Poitiers en juin prochain. Le Parti socialiste s'accroche tristement à son socle de 20% d'électeurs sans tenter de convaincre plus large.
Manuel Valls, donc, était mercredi dans  le salon d'hiver de l'Élysée, flanqué de 7 ministres, pour parler investissement et activité "pour une croissance plus forte". Il promet 2,5 milliards d’euros sur cinq ans, sous forme d'une énième réduction d'impôt sur les sociétés. Et une nouvelle loi sur le dialogue social. Au passage, il oublie de mentionner, à défaut de détailler, les 4 milliards d'euros d'économies budgétaires supplémentaires. Tous les investissements réalisés entre le 15 avril 2015 et le 15 avril 2016, "pour dynamiser immédiatement l’investissement," bénéficieront ainsi d’une réduction d'impôt supplémentaire de 40 % du prix de revient de l’investissement. De soutien aux revenus modestes, il n'en est pas question à l'exception d'un renforcement des aides à la rénovation énergétiques pour ... 50.000 foyers modestes. La France compte 9 millions de pauvres et 3,5 millions de mal logés. Manuel Valls a quelques problèmes de mesure.
Après le Crédit d'Impôt Compétitivité Emploi, puis le Pacte irresponsable - la plus forte exonération de charges sociales sans contreparties jamais accordées sous la Vème République, voici une nouvelle étape dans la politique de l'offre si chère à François Hollande. Une politique de l'offre parfaitement résumée par cette pirouette d'Emmanuel Macron, cette semaine: "L’objectif d’une hausse de la croissance, c’est de se redonner des marges de manœuvre qui feront l’objet de décisions qui peuvent venir".
La Palisse n'aurait pas mieux dit.
Quelques ministres tentent le service après-vente. Ainsi Stéphane Le Fol, ministre agricole mais surtout porte-parole d'un gouvernement aphone: "la gauche doit se réapproprier la valeur travail". Et la valeur "sociale" ? Le Foll complète d'une formule pour tenter de différencier son équipe de l'UMPFN: "Contrairement au Front national et à l’UMP, nous n’opposons pas chômeurs et travailleurs". L'argument est bien faible quand on mesure combien la lutte contre les précarités sont peu priorisées.
François Hollande réussit une seconde vente de Rafales, trente-six unités d'un coup que l'Inde commande. Vive l'industrie française, fut-elle de défense... C'est la relance ! Avec le baisse de l'euro, le commerce extérieur devrait livrer de meilleurs résultats cette année.
Valls n'a pas changé
Vendredi, Manuel Valls est au Portugal. Il tance la Grèce. Dans un entretien au quotidien portugais Diario Económico, il se fait le perroquet fidèle de la BCE et de l'euro-groupe: "pour que l'assistance financière puisse fonctionner normalement, le gouvernement grec devra définir rapidement une liste de réformes plus profondes. Il y a des progrès, mais elles sont insuffisantes". Il aurait pu se taire et laisser à d'autres plus vindicatifs comme Angela Merkel le soin de fustiger la Grèce agonisante. Il aurait du se taire depuis que la Grèce et l'eurogroup avaient conclu un accord temporaire.
En quelques semaines de gouvernement, Alexis Tsipras est parvenu à sortir son pays du "noeud coulant" de l'austérité. Il n'a pas reconduit les contre-réformes désastreuses de son prédécesseur conservateur. Il n'a pas cédé aux nouvelles demandes de réductions de dépenses publiques malgré l'imminence de quelques échéances bancaires. A force de diplomatie et de pressions, il a déplacé la pression vers Angela Merkel: vendredi, la Grèce devait rembourser 458 millions d'euros au FMI; on entendait claquer les genoux de quelques officiels européens. Ce petit monde craignait le pire, c'est-à-dire le défaut. Le stress était réel sur les marchés et dans quelques palais ministériels européens. Tsipras avait réussi son coup, la peur avait changé de camp. Deux jours avant la date, Tsipras s'affiche tout sourire avec Vladimir Poutine, histoire de faire croire qu'il a une alternative au diktat austéritaire qu'on veut lui imposer au sein de la zone euro. Dans les chancelleries européennes, les dents grincent, les sourires deviennent jaunes.
Et finalement, vrai-faux coup de théâtre vendredi, le gouvernement grec rembourse sans souci l'échéance attendue 458 millions d'euros d'emprunts. Même la Tribune applaudit.
Manuel Valls n'a pas changé. On attendait un Patriot Act à la Française après les attentats de Charlie. On s'en approche. Pour l'heure, le projet de loi légalisant sans mesure ni contrôle ni validation judiciaire un espionnage informatique massif de nos concitoyens déboule à l'Assemblée. Le Sénat de droite n'y a rien trouvé à redire. Après les lois sécuritaires de Sarkofrance, voici une nouvelle pièce au puzzle.
Que dira-t-on le jour où l'effroyable troupe du Rassemblement Bleu Marine s'emparera du pouvoir ? Elle n'aura rien à faire. Les outils seront là, en place et bien rôdés pour tirer le trait sur la République et ses contre-pouvoirs.
Ami républicain, ne désespère pas.
Pas tout de suite.
Crédit illustration: Croisepattes.

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