Les députés ont adopté mercredi soir l'article de la loi sur le
renseignement concernant les mesures de surveillance sur Internet. Un
amendement doit rassurer les hébergeurs qui craignent des intrusions
massives.
L’Assemblée nationale s’est déclarée favorable mercredi 15 avril à l’adoption des mesures sur la surveillance des données Internet du projet de loi sur le renseignement. Un amendement destiné à apaiser les hébergeurs a été ajouté.
L'article 2 du projet de loi discuté en première lecture par les
députés, impose aux opérateurs télécoms, aux hébergeurs et aux grandes
plateformes internet un dispositif d'analyse automatique des données (un
algorithme) destiné à "révéler une menace terroriste", que ses
opposants ont qualifié de "boîte noire".
Il a été adopté par 25 voix contre cinq. Des socialistes comme
Christian Paul et Aurélie Filippetti, qui avaient exprimé lors du débat
des réserves ou critiques sur le dispositif, n'ont pas participé au
vote.
Les hébergeurs, qui menaçaient de délocaliser leurs activités,
souhaitaient notamment "que l'on puisse garantir qu'il n'y aura pas
d'intrusion massive dans les contenus", a indiqué le ministre de
l'Intérieur Bernard Cazeneuve après une rencontre entre leurs
représentants et le gouvernement dans la matinée.
L'amendement présenté par le ministre et adopté par les députés
permet aux opérateurs de distinguer eux-mêmes entre "métadonnées" et
"contenus". Le renseignement ne s’appliquant qu’aux métadonnées. Cette
technique, autorisée pour une durée de quatre mois renouvelable, sera
"réservée exclusivement à une seule finalité, la lutte contre le
terrorisme".
"Avec ces données, j'en connaîtrais plus sur vous qu'en cinq ans à vos cotés"
Les députés ont aussi adopté, à main levée, l'article 3, qui prévoit
les conditions de recours à des appareils permettant la localisation, la
sonorisation de lieux et de véhicules, ainsi que la captation d'images
et de données informatiques.
Au cours d'un long débat souvent très tendu, les garanties données
par le gouvernement n'ont pas convaincu les opposants à l'utilisation de
l'algorithme.
Sur le plan des libertés,
la simple collecte des métadonnées, ont souligné plusieurs députés, est
aussi intrusive que l'accès aux contenus. "Si j'avais ces données, j'en
connaîtrais plus sur vos vies privées qu'en cinq ans à vos cotés", a
lancé à ses collègues le député écologiste, Sergio Coronado.
Des arguments rejetés par les UMP Éric Ciotti et Guillaume Larrivé,
en accord sur ce point avec le gouvernement. "Ce ne sont pas ces
techniques qui vont menacer les libertés, mais les terroristes", s'est
écrié le premier.
Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian a expliqué qu'il "ne
s'agissait pas de surveillance de masse mais d'un ciblage, non sur des
individus, mais sur des modes de communication caractéristiques des
actions terroristes". Il a pris l'exemple des méthodes cryptées
utilisées par l'organisation de l'État islamique pour diffuser des
vidéos de décapitation.
À Laure de la Raudière qui lui demandait s'il serait recouru à la
technique intrusive d'aspiration des données dite DPA (Deep packet
inspection), Bernard Cazeneuve a répété, comme il l'avait fait en 2014
lors de l'adoption de la loi sur le terrorisme, que "nous n'utiliserons
en aucun cas cette technique".
Source : France24