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Pauvres pourcentages

Publié le 26 avril 2015 par Malesherbes

Marc Fiorentino est un banquier d’affaires, spécialiste des marchés financiers qui, entre autres activités, intervient sur Canal+ dans l’émission de mi-journée, La nouvelle édition. Il y expose, avec un sens certain de la pédagogie, des idées de la doxa libérale. Il s’amuse également à tenir la chaîne qui l'accueille pour un dangereux nid de gauchistes, n’hésitant pas, peut-être par jeu mais il me semble plutôt par conviction, à qualifier le journaliste Nicolas Domenach de rouge.

Pour ma part, j’ai toujours considéré la Bourse comme un jeu à somme nulle, les gains des uns étant alimentés par les pertes des autres. Je n’ai d’ailleurs encore jamais rencontré un conseiller financier prêt à partager avec son client les risques de ses conseils éclairés. Et je m’étonne aussi, tant d’économistes détenant la vérité, que les pays parviennent si mal à triompher des crises qui les frappent. Si je ne suis pas qualifié pour juger la compétence de tous ces augures, je suis stupéfait lorsque je vois un économiste de la carrure de Marc Fiorentino commettre des erreurs du calibre de celle que je vais vous exposer ici.

Il y a quelques jours, Marc Fiorentino s’insurgeait contre le droit de vote double accordé à certains actionnaires. En effet, une entreprise peut utiliser ce mécanisme statutaire qui donne aux actionnaires ayant détenu une action depuis au moins deux ans un droit de vote double. Notre spécialiste prétendait que ce dispositif permettait à l’État d’intervenir à bon compte dans une entreprise dont il était actionnaire. Il développait alors la démonstration suivante. Supposons que l’État détienne 15% des actions d’une entreprise. Avec le droit de vote double, il bénéficiait de 30% des droits de vote et se trouvait aisément à la tête d’une minorité de blocage, privant ainsi d’une partie de leurs droits les autres actionnaires.

Marc Fiorentino confond allègrement nombres et pourcentages. Pour fixer les esprits, supposons que l’entreprise ait émis 100 actions et que l’État en possède quinze depuis plus de deux ans, soit 15%. Si cette entreprise a mis en place le droit de vote double, plusieurs cas peuvent se présenter. Considérons deux cas extrêmes. Si tous les autres actionnaires sont également détenteurs de leurs actions depuis plus de deux ans, les cent actions émises procurent à leurs propriétaires deux cents droits de vote, l’État en ayant de son côté trente soit toujours 15%. Examinons maintenant un autre cas extrême, lui aussi fort peu probable, celui où l’État se trouverait être le seul actionnaire à être propriétaire de ses actions depuis plus de deux ans. Il disposerait donc de quinze droits de vote supplémentaires, portant le nombre de droits de vote émis de 100 à 115. L’État en détiendrait donc 30/115 soit 26%. Il est donc clair que, selon la distribution du capital, en cas d’action à vote double, le pourcentage de droits de vote de l’État sera maintenu, augmenté mais jamais doublé. Voilà ce qui entache sérieusement la crédibilité de M. Fiorentino.


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