Depuis la nuit des temps, les sociétés, toutes les sociétés, ont donné priorité au social, à la qualité du lien social qui lie les individus d’une collectivité, traditionnelle ou moderne afin que cet agrégat “fasse” société, rassemblée autour de valeurs, d’une culture et d’une économie, acceptant les règles d’un jeu d’abord placé sous le signe du divin, puis de la force guerrière, avant que la démocratie s’installe péniblement et peu à peu, mais en s’organisant avec l’époque industrielle, autour de la “lutte des classes”, à travers des organisations sociales structurées et structurantes.
Le déclin de ces organisations sociales interpelle et je m’interrogerai, à partir de plusieurs billets espacés dans le temps, sur quelques unes des hypothèses relatives à la “modernité”.
Pour Alain Touraine (“Un nouveau paradigme”, Ed. de Poche, 2005), la modernité “a longtemps été portée par l’idée de société”. Elle se détache aujourd’hui de “toute expression sociale,comme une religion qui se séparerait de toute église et de toute pratique rituelle”. “La désocialisation conduit à la destruction des liens sociaux, à la solitude, à la crise d’identité, mais en même temps, elle libère des appartenances et des règles imposées…. unique force de résistance à toutes les formes de violence et c’est à elle que revient de reconstruire les institutions qui ne seront plus au service de la société, rebaptisée “intérêt général” ou “bien commun” mais à celui de la liberté créatrice de chaque individu”.
Il enchaîne : cette priorité donnée à “l’énergie créatrice de l’acteur et non plus aux besoins et fonctions des systèmes sociaux” annonce la mise au premier plan la revendication de “droits culturels”: “de tels droits s’expriment toujours par la défense d’attributs particuliers”, mais à la condition qu’ “ils confèrent à cette défense un sens universel”.
Dans cette perspective, il voit, à côté des combats écologistes et altermondialistes, la lutte des femmes pour la défense et la promotion de leurs droits, comme l’avant-garde des forces de transformation de nos sociétés.