Lorsque l'on observe de plus près la déferlante d'affaires qui a secoué la première banque française, nous pouvons nous demander comment elle est encore debout, quand on observe la chute de géants américains de la finance. Il ne fait nul doute que c'est en grande partie due à une communication extrêmement bien maîtrisée.
Daniel Bouton en dévoilant lui-même l'affaire et en intervenant dans les médias, affiche une volonté de transparence. Il écrit en son propre nom à tous les actionnaires. Il explique très clairement ce qui s'est passé entre dimanche 20 janvier où il affirme avoir découvert la " fraude " et mercredi jour où il s'exprime aux journalistes. "Il dit tout". La fraude du trader, les pertes liées à la crise des subprimes ... . Ceci renforce la crédibilité de son discours et permet d'orienter l'angle médiatique qui sera ensuite choisi : " un trader a fait perdre près de 5 milliards d'euros à la première banque française. "
Daniel Bouton va faire preuve durant l'annonce de cette crise d'une grande compassion, il va utiliser des termes très forts. Il parlera " d'une affaire triste et regrettable ", " en dépit de la meurtrissure qu'ils ressentent ". Il dira aux actionnaires : " Je comprends parfaitement votre déception, voire votre colère. Cette situation est parfaitement inacceptable. Je n'ignore pas ce que représente pour vous la chute du cours de l'action. Je vous prie d'accepter mes excuses et mes profonds regrets"Ce sont des termes et un registre qui ne sont pas usuels dans le domaine des affaires et de la finance.. Il publiera dans la presse le lendemain une lettre d'excuse et informera qu'il avait proposé sa démission qui lui a été refusée par le conseil d'administration. Là encore, il faut mouche. On sait que trois stratégies sont proposées en situation de crise : soit l'entreprise assume ses responsabilités, soit elle nie ses responsabilités, soit elle adopte une position intermédiaire qui consiste à assumer tout en déportant en partie la responsabilité sur d'autres comme les pouvoir publics par exemple. Mais la première est de loin celle qui affiche les meilleurs résultats.
Ensuite Daniel Bouton distillera dans ses interviews quelques images fortes pour être compris de tous : " Nous avons découvert dimanche un incendie très grave dans une chambre de la maison et cet incendie risquait d'embraser la totalité de la maison... et même de se transmettre à la totalité du village " (...) " Il était de notre devoir absolu d'éteindre l'incendie dans la chambre et que la totalité de la maison ne soit pas atteinte. C'est fait ; La maison est en bonne santé ". Plus tard il dira toujours au sujet de Jérôme Kerviel : " C'est un chauffard qui roulait en évitant tous les radars ".Voilà de quoi être compris de tous et marquer les esprits.
Conclusion : Jérôme Kerviel est un accident de parcours, un personnage telle qu'il en existe au cinéma mais qui n'aura pas pu venir à bout de la Société Générale, cette banque inébranlable.
Par Nicolas De Simone-Duny - Publié dans : communication de crise