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The Thing - 1982 (Jusqu'au bout de la terreur...)

Publié le 02 juin 2015 par Olivier Walmacq

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genre: horreur, épouvante (interdit aux - 12 ans)
année: 1982
durée: 1h48

l'histoire : En plein cœur de l’Antarctique, une équipe de scientifiques découvre une créature gelée. Ramené à la vie, le monstre prend l'apparence de toutes formes organiques et décime un à un les membres de l'expédition. 

La critique :

Grand admirateur de Howard Hawks, John Carpenter a déjà rendu hommage au réalisateur par le passé, avec Assaut en 1976, une libre adaptation de Rio Bravo. Le cinéaste est également fasciné par La Chose d'un Autre Monde, toujours réalisé par le même Howard Hawks. Ce film est aussi l'adaptation d'une nouvelle de John W. Campbell, La Bête d'un autre Monde.
C'est ainsi que naît le projet de The Thing au cinéma, qui est une transposition plus fidèle de la nouvelle de Campbell. Sur le fond, The Thing est bel et bien un remake de La Chose d'un autre Monde. Sur la forme, les deux films sont totalement différents.

The Thing constitue également le premier volet d'un tryptique sur la fin du monde. Il sera suivi par Prince des Ténèbres en 1987 et L'Antre de la Folie en 1995. Au niveau de la distribution, The Thing réunit Kurt Russell, Wilford Brimley, Keith David, David Clennon, T.K. Carter et Richard Masur. De nombreux acteurs seront approchés pour le casting du film.
Pour le rôle de McReady, Nick Nolte et Jeff Bridges seront envisagés, mais les deux acteurs déclineront l'invitation. C'est finalement Kurt Russell qui sera l'heureux élu. C'est aussi un acteur que John Carpenter connaît bien, puisqu'ils ont déjà collaboré ensemble dans New York 1997.

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Même remarque pour le rôle de Childs : Isaac Hayes, Ernie Hudson et Carl Weathers seront eux aussi approchés, mais sans succès. C'est finalement Keith David qui sera choisi. Pour le rôle de Blair, Donald Pleasence est le premier choix de John Carpenter, mais l'acteur est déjà sur le tournage d'un autre film. Au moment de sa sortie, The Thing est boudé par le public.
Pour John Carpenter, ce film d'horreur se solde par un échec commercial. Pourtant, le long-métrage va se tailler une réputation de film culte au fil des années. Certains fans le considèrent même aujourd'hui comme un classique du cinéma horrifique. D'ailleurs, le film se rattrapera largement lors de sa sortie en vidéo.

Pourquoi The Thing a-t-il connu un tel bide au moment de sa sortie au cinéma ? Entre la fin des années 1970 et le début des années 1980, ce sont Alien, le huitième passager et E.T. l'Extraterrestre, deux films diamétralement opposés, qui connaissent l'engouement du grand public. Ces deux films restent plutôt accessibles au grand public et donc à Monsieur et Madame "Tout le monde".
Ce n'est pas le cas de The Thing, qui reste une oeuvre éthérée, nihiliste, paranoïaque et d'une froideur totale, à l'image de son décor naturel, donc une base scientifique perdue quelque part en Antarctique. A l'époque, le public n'était sans doute pas encore préparé à visionner ce genre de film.

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Attention, SPOILERS ! Pendant l'hiver 1982 en Antarctique, un hélicoptère norvégien pourchasse un chien près d'une station de recherche américaine en Antarctique. Tandis que les Américains accourent, une grenade détruit par accident l'hélicoptère et tue le pilote. Le tireur hors de contrôle continue de tirer sur le chien et blesse un Américain.
Le lieutenant Garry, commandant du poste, tire alors sur le Norvégien, qui meurt. Un pilote d'hélicoptère, R. J. MacReady, et le docteur, volent jusqu'au camp norvégien pour trouver des réponses, et trouvent des ruines calcinées, avec le corps d'un homme qui s'est suicidé et un gros bloc de glace avec une cavité creuse.
Dehors, ils découvrent les restes brûlés d'un cadavre humanoïde à deux faces. De retour à la station, le biologiste Blair effectue une autopsie sur la créature, mais ne trouve qu'une organisation normale des organes internes. D'une certaine façon, le lieu de l'action, à savoir (je le rappelle) l'Antarctique, n'a rien du hasard. Cet endroit désertique, glacial et de désolation totale constitue en lui-même un lieu marqué par la mort, la solitude et la perte de tout contact avec la réalité.
C'est dans cette ambiance presque schizophrénique que va s'installer ce climat de terreur et de paranoïa. Symboliquement, ce désert froid et tempétueux représente un monde en perte d'humanité et totalement esseulé.

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A partir de là, John Carpenter nous présente des personnages livrés à eux-mêmes. Cela commence par un husky poursuivi par des Norvégiens dans un hélicoptère. Suite au crash de l'appareil et à la mort de ses occupants, l'animal est récupéré et s'installe progressivement dans la base américaine. Entre temps, les scientifiques décident de rendre une petite visite aux Norvégiens.
Sur place, ils découvrent avec stupéfaction une base ravagée par une sorte de créature hideuse. Cette dernière est inerte et son cadavre va être examiné attentivement par nos scientifiques. Parallèllement, nos héros découvrent également une soucoupe volante, le vestige d'un lointain passé, mais amenée à réveiller une menace imminente.

Ce qui surprend dans The Thing, c'est que la "Chose" en question n'a pas de véritable forme. On pourrait évoquer le cas étrange d'une être polymorphe et protéiforme, mais d'une intelligence redoutable, capable de prendre l'apparence de ses victimes, d'imiter leur voix et même de copier leur personnalité. Sur ce dernier point, The Thing n'est pas sans rappeler, à certains égards, le cas de L'Invasion des Profanateurs de Sépultures. En effet, n'oublions pas que John Carpenter reste un réalisateur rattaché au passé.
Sur le fond comme sur la forme, la plupart de ses films ne sont que des hommages (néanmoins avec une vision personnelle) aux grands cinéastes du passé. Mais dans le cas si particulier de la "Chose", ce qui nous intéresse, c'est avant tout sa structure cellulaire et génétique.

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La "Chose" est finalement invisible. John Carpenter la réduit à une sorte de virus d'origine extra-terrestre, très hostile à l'homme, et destinée à prendre le contrôle de notre monde. Si elle parvient à s'échapper de la base scientifique, elle pourra alors se répandre dans notre quotidien et décimer l'humanité toute entière. C'est sûrement pour cette raison que certains fans du film y voient une métaphore sur le Sida. En l'occurrence, la "Chose" est décrite comme un organisme microbien, capable d'absorber les cellules d'origine pour les imiter à la perfection.
C'est probablement ce dernier point qui rend la "Chose" aussi terrifiante. Elle n'a pas de forme véritable. Sa menace est constante et présente (potentiellement) en chaque individu.

A moins qu'elle ne soit la simple subséquence de notre société individualiste, conformiste et consumériste, nous transformant en de vulgaires cacochymes aveulis, apathiques et dénués de tout sentiment humain... En ce sens, le monstre de The Thing symbolise également notre décadence, notre déliquescence et notre propre déréliction. Vous l'avez donc compris.
The Thing n'est pas un film d'horreur comme les autres. Il s'agit d'un film profond, pessimiste et plus complexe qu'il n'y paraît. Pour mettre en scène cette nouvelle "Terreur" microbienne au cinéma, John Carpenter fait appel aux soins de Rob Bottin. Ainsi, on relève plusieurs séquences d'anthologie : la tranformation du Husky en une sorte de monstre difforme et visqueux, les tests sanguins effectués sur les scientifiques de la base, ou encore cette tête arrachée qui prend peu à peu la forme d'une araignée.
A partir de là, s'engage une course contre la montre, pour savoir "qui" est "qui", tout du moins, pour savoir qui n'est pas encore contaminé par la chose. En résumé, tout le monde est suspecté. Dans cet immense vide abyssal, c'est un huis clos paranoïaque qui prend forme, jusqu'à la folie la plus viscérale et un combat final contre la "Chose" elle-même. Dans The Thing, il n'y a pas d'issue possible.
Tout le monde est condamné à mourir. Bref, John Carpenter signe probablement son meilleur film, en tout cas, le plus abouti et le plus nihiliste. Oui, clairement, The Thing a bien mérité son statut de classique du cinéma horrifique.

Note: 18/20

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