Magazine Séries

[Critique BD] Joe, l’Aventure Intérieure

Publié le 02 juin 2015 par Glossnroses @MarionWlad

{Nicolas}

Origine : Etats-Unis

Dessinateur : Sean Murphy

Auteur : Grant Morrison

Genre : Aventure, Fantastique

Nombre de pages : 224

Date de sortie : 5 Octobre 2012

Editeur : Urban Comics

Prix : 19€

joe-l-aventure-interieure.jpg

Pitch :

Joe est un jeune adolescent rêveur, souvent dans son monde, ce qui lui permet d’échapper aux soucis de sa mère pour garder sa maison, ou la perte de son père. Joe souffre en plus d’un diabète sévère et se retrouve sous la menace de crises d’hypoglycémie. Un jour, il est frappé de l’une d’elles et voit son combat contre la mort transposé dans un monde fantastique où son rat et ses jouets deviennent des guerriers luttant contre les armées du mal.

La Critique :

Quand on souffre de diabète, les crises d’hypoglycémie sont plus sévères que pour un sujet en bonne santé. En plus de la perte de conscience, la vue du sujet se trouble et il peut avoir des hallucinations. Si en plus, la personne qui en souffre a une imagination débordante et se réfugie souvent dans son monde, les hallucinations peuvent prendre des proportions délirantes. C’est sur cette réalité que se bâtit Joe, l’Aventure Intérieure.

Comme je l’ai dit dans ma chronique de Punk Rock Jesus, Sean Murphy un dessinateur (auteur aussi dans certaines de ses publications) qui monte. Il a contribué à la série Batman/Scarecrow pour DC Comics, puis à American Vampire (American Vampire Legacy tome 1), Hellblazer (Hellblazer – Mauvais Sang). Il est également auteur de et Off Road et du brûlot furieusement rock et contestataire Punk Rock Jesus. Il est reconnu pour son trait précis et détaillé. Chaque bulle est à regarder dans les détails. Son écriture est également cinématographique, ce qu’on ressent dans la fluidité des mouvements. Comme dans Punk Rock Jesus, il montre aussi un certain attachement à ce passage pourtant difficile qu’est l’adolescence. Dans les deux cas, l’adolescent est un héros en proie au doute, victime de ses faiblesses, de sa fragile condition, mais un héros tout de même, un leader, qu’il mène une rébellion punk contre la toute-puissance du fanatisme religieux armé et de l’industrie de la télévision ou contre la maladie qui prend l’aspect, dans les hallucinations de Joe, de toute une horde d’êtres infernaux. À chaque fois, le héros va lutter férocement jusqu’au bout contre son principal adversaire, à savoir lui-même et sa fragilité, chercher jusque dans ses ultimes ressources. Limiter à Joe, l’Aventure Intérieure au dessin magistral de Sean Murphy serait une monumentale erreur. Il s’agit du scénario absolument génial de Grant Morrison, scénariste de comics, de jeux vidéo, dramaturge, musicien, nouvelliste, essayiste, bref un véritable couteau suisse, et considéré comme le plus créatif dans son domaine. Il a travaillé pour Doom Patrol, New X-Men, Final Crisis et son œuvre majeure The Invisibles.

wincklerjoe

Volé de ses friandises par d’autres gamins, Joe est frappé d’une crise et, dans ses hallucinations, se retrouve au royaume d’Hypogée (comme hypoglycémie). Ses jouets prennent vie, son rat Jack se retrouve, en armes et armures, doué d’intelligence et de bravoure. Il sera accompagné de Smoot le fils géant de pirates nains, de la belle Zyxy et de plusieurs acolytes. Face à lui se dresse la mort et son armée des ténèbres menée par les redoutables Longs Manteaux. Fruits de l’imagination du héros et de ses hallucinations, cela donne lieu à un joyeux bordel dans lequel apparaissent Superman, Batman, des robots, des héros de jeux vidéo, le tout dans des batailles homériques dignes de certaines des deux sagas de Tolkien adaptées par Peter Jackson. Le tout mené à un rythme d’enfer durant la totalité du livre. A partir du moment où Joe entre en crise, ni lui ni le lecteur n’auront un instant de répit. On se prend à imaginer une adaptation au ciné menée tambours battant et portée par une bande-son digne des standards du genre.

wincklerjoe21

Grant Morrison et Sean Murphy portent un regard attendri sur l’enfance et ses rêves et désillusions, sur la nécessité de se réfugier dans son univers. Sublimé par la colorisation magnifique de Dave Stewart (plusieurs fois primé de multiples contributions comme Hellboy, Captain America, Daredevil…), véritable feu d’artifice, et porté par des auteurs et dessinateurs parmi les plus prometteurs, Joe, l’Aventure Intérieure, c’est la conjugaison des talents de maestros pour donner une œuvre magistrale et singulière.

@Nicolas


Retour à La Une de Logo Paperblog