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Québec solidaire sur le rapport Bouchard-Taylor

Publié le 03 juin 2008 par Hugo Jolly

Le texte qui suit est cosigné par Jeanne Boisclair, responsable de la Commission sur l’intégration citoyenne de Québec solidaire, Françoise David, porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, membre de la Commission sur l’intégration citoyenne, et Amir Khadir, porte-parole de Québec solidaire.

Le Québec vit un malaise identitaire. Il n’est pas le seul. L’Europe entière vit un déchirant trouble identitaire. Le trait commun de ces malaises est la profonde mutation qu’ont connue nos sociétés au cours des 50 dernières années. Le Québec de la rébellion de 1837-1838 n’était déjà plus le même que celui de la Conquête de 1759. De la même façon, le Québec des années 2000 est très différent de celui des années duplessistes. Le Québec a même opéré une véritable révolution qui n’a eu de tranquille que le nom et qui a profondément et durablement changé son identité. Du rôle de “porteur d’eau” dans lequel un certain passé colonial voulait les reléguer, les Québécoises et Québécois en sont venus à revendiquer la pleine maîtrise de leur destin, et pour un bon nombre, à réclamer un pays.

La définition de l’interculturalisme retenue par Gérard Bouchard et Charles Taylor passe peut-être trop rapidement sur l’existence d’une culture majoritaire québécoise. Le rapport affirme que “les constantes interactions entre citoyens d’origines diverses mènent au développement d’une nouvelle identité et d’une nouvelle culture”.

Les commissaires ont raison d’insister sur les mutations vécues par toutes les cultures qui sont influencées par d’autres. Nous sommes d’avis cependant que cela ne doit pas nier la légitimité du désir de la majorité francophone de vivre dans une société arborant fièrement ses 400 ans d’histoire, dont elle a graduellement fait la synthèse au gré de ses conflits sociaux et politiques, de la créativité de ses artistes et des métamorphoses propres à toute société moderne ouverte sur l’humanité. Ce qui veut nécessairement dire ouverte à l’apport de l’étranger, de l’immigrant.

Du malaise identitaire…

Le rapport Bouchard-Taylor reconnaît clairement le malaise identitaire ressenti profondément par une petite nation francophone minoritaire en Amérique du Nord. L’inquiétude de perdre son identité a amené ce peuple, tout au long de son histoire, à se doter de mécanismes de protection de sa langue et de sa culture et à refuser de se laisser assimiler et de se fondre dans la mer anglophone qui l’entoure. La conscience de cette fragilité a donné la loi 101 avec pour résultat qu’aujourd’hui les enfants de familles immigrantes sont des centaines de milliers à parler français dans les écoles du Québec - avec l’accent québécois en prime!

En 2008, les Québécois d’origine canadienne-française peuvent parfaitement abandonner leurs réflexes de peuple minoritaire et s’assumer en tant que groupe majoritaire. Le Québec a tout à gagner à ne pas céder à celles et ceux qui distillent la peur de l’autre. Nous sommes désormais trop grands pour faire de nos minorités les boucs émissaires de notre malaise identitaire. Le Québec s’est doté d’institutions publiques fortes, d’une Charte des droits et libertés fondamentale et de lois qui, si elles étaient mieux appliquées et dotées de moyens, pourraient mieux protéger la langue française et la culture québécoise. Pourvu que la volonté politique soit là et surtout celle de mieux franciser les milieux de travail.

…au projet national

Pour nous il est clair que ce n’est pas le rôle d’une commission de consultation publique de se substituer aux partis politiques et à la société civile pour trouver le chemin que le Québec doit suivre dans son affirmation nationale comme solution à son malaise identitaire. Québec solidaire propose plutôt à la société québécoise de prendre ses responsabilités en faisant de la souveraineté un projet réalisable qui lui insufflera une confiance accrue en la pérennité de son existence comme nation francophone en Amérique du Nord.

Pour y arriver, Québec solidaire propose une démarche démocratique à laquelle les citoyens et citoyennes, toutes origines confondues, sont invités à participer activement. Nous proposons l’élection d’une assemblée élue au suffrage universel et dont les membres reflètent le pluralisme québécois. Cette assemblée aurait le mandat d’orchestrer un vaste débat sur un projet de constitution incluant des changements nécessaires aux institutions politiques. Ce débat doit inclure aussi une réflexion large et inclusive sur l’avenir politique du Québec. Il se termine avec un référendum où le peuple s’exprime librement. Voilà comment on peut mobiliser toute la population dans un débat ouvert sur l’avenir.

Nous proposons d’en finir avec la morosité. Nous le pouvons. Les signataires de cette lettre, arrivés ici en “souches” successives, s’unissent autour de l’idée d’un Québec fier de ses origines, accueillant et confiant en l’avenir.


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