Il y a quelques temps, j'ai assisté à une des grands actes de bravoure de la vie d'une copropriété : le changement de syndic. J'y ai aperçu les caractéristiques culturelles du changement en France.
Je ne sais pas s'il s'en était rendu compte, mais le syndic s'était attiré le mécontentement de l'immeuble. Il opposait à toute demande son inertie. Il était en position de force. Car nous étions divisés. Et il est compliqué de remplacer un syndic et un conseil syndical, fait de bénévoles, a peu de temps pour les démarches nécessaires. Mais il a trouvé plus fort que lui. Avec un sens du dévouement inattendu, une nouvelle présidente s'est mise, comme si elle lui appartenait, à s'occuper des affaires de l'immeuble. Puis, avec le zèle de l'ingénieur, elle a épluché les comptes du syndic, depuis 2007. Ce qui a permis de repérer des anomalies. Par exemple, 20.000€ dormaient sur un compte depuis 20 ans, au moins. Aussi, les services de la ville ont demandé à ce que d'éventuels incendies ne puissent pas remonter des parkings (la ventilation fonctionne à l'envers de ce qu'il faudrait). Rien n'a été fait... La présidente s'est mise à calculer les coûts réels du syndic, en allant jusqu'à y inclure le prix des photocopies. Et a procédé à un appel d'offres. Il y avait mieux (en particulier notre syndic n'était pas informatisé) et bien moins cher.
Le syndic contre-attaque. Il envoie une lettre recommandée aux copropriétaires, présidente exclue. Il dénonce les agissements du conseil syndical, accusé d'incompétence, voire de malversations. Or, tout était erroné, ce qu'il était facile de démontrer... Lors de l'assemblée générale où se joue son sort, le syndic ne cesse de faire de l'obstruction. Il faut attendre plus de deux heures quinze pour régler la question. Qu'avait-il à y gagner ? Jamais il n'a traité les copropriétaires comme s'ils étaient des clients...
Cependant le syndic eût quelques alliés. Un petit groupe de copropriétaires âgés s'est fait fort de critiquer la gestion (bénévole) de la copropriété. Curieusement, en annonçant des vérités qui n'en étaient pas. Voilà le Français qui se donne de l'importance par la critique ? Mais qui est un rien ridicule, lorsqu'il sort de son cercle complice ?
Le changement en France
Inertie dynamitée par la rationalité économique. Le client n'existe pas. Ou c'est un ennemi. Caractéristiques françaises. Mais qu'y a-t-il derrière tout cela ? Peut-être ce que Tocqueville a dit, jadis. Chacun d'entre nous vit dans une bulle, qu'il administre selon notre bon plaisir. Le syndic pensait probablement connaître son métier, et nous considérait comme des incapables. La même modélisation s'applique aussi à ses "alliés" ?