On est loin des beaux discours, ceux de l’Europe des peuples, ceux qui la présentait comme moteur de développement, facteur de solidarité. L’Europe de Monnet et Schuman, instrument de paix et de stabilité, est venu brutalement se placer au centre d’un crise d’ampleur nouvelle. A vrai dire, bien malin est celui qui est en capacité de mesurer toutes les conséquences de la sortie, ou non, de la Grèce de l’Europe et de l’Euro.
On peut être tenté de trouver un coupable, et si possible aussi responsable. C’est inutile, c’est personne, ou plutôt selon les plus libéraux des créanciers, c’est les grecs eux mêmes. Sauf que c’est bien l’Europe entière qui a accepté les comptes plus maquillés qu’une voiture volée au moment de l’intégration de la Grèce dans l’Union. Aucun des dirigeants de l’institution n’ont sourcillé devant la manipulation aussi honteuse que grossière, et ont fait en toute connaissance de cause entrer le loup dans la bergerie. Cela arrangeait bien les banques de proposer des taux substantiellement élevés, sans parler de certaines ventes d’armement ou les allemands n’ont pas trop laissé le choix à leur partenaire grec qu’ils savaient passablement endettés. Les voir se plaindre ensuite est un rien cocasse.
En, fait, le vent de panique s’est vraiment levé depuis qu’Alexis Tsipras a annoncé remettre la décision de la Grèce à son peuple. C’est vrai : laisser le peuple s’exprimer, c’est jamais bon. Il y a trop d’incertitude, c’est trop dangereux : vu d’en haut, la populace ne comprend rien de la substantifique moelle du bien-être libéral qui emplit pourtant ce monde avec évidence. Une représentation nationale est bien plus digne de foi, bien plus docile aussi, et assez peu concernée quand il s’agit de prendre des mesures qui visent à réduire le train de vie des concitoyens.
La France a connu un épisode identique, rejetant lors du referendum du 29 mai 2005 la ratification du traité établissant une constitution pour l’Europe à 54 % avant que les parlementaires ne corrigent le tir à plus de 90 %… L’ensemble du monde politique avait communiqué en faisant croire de les citoyens ne voulaient pas d’Europe alors qu’ils souhaitaient juste une Europe plus juste, plus sociale, plus transparente, plus démocratique. On comprend mieux la peur qui ronge les technocrates de Bruxelles parce qu’en cas de refus de se plier au diktat des banques, il n’y aura certainement pas de seconde chance : la Grèce sera éjectée de l’Euro, avec des conséquences dont on ignore tout puisque parmi la pléthore de traités qui régissent l’institution européenne, aucun ne prévoit un tel mécanisme… Et dans ce grand cyclone financier, la question subsidiaire ne manquera pas de tomber : qui sera le canard boiteux suivant qui sera passé par dessus bord ?
Pour en revenir au principe démocratique dont chaque état civilisé se prévaut, le choix de laisser le premier concerné par les mesures qui seront prises de s’exprimer directement est louable. Ce devrait être la règle. Dans nos sociétés, la démocratie se limite juste au dépôt d’un bulletin de vote de temps en temps dans une urne, et c’est fini. C’est maigre. C’est mieux que rien, mais c’est notoirement insuffisant. Le fait que la panique gagne les politiques et les financiers de manière aussi aiguë dès lors que la parole est redonnée aux citoyens est symptomatique du malaise et de la fracture qui existe entre le peuple et sa classe dirigeante. Et ce n’est rien de le dire.
Décision dimanche. On a une petite semaine pour constater comment les élites jugent ceux qui les portent au pouvoir. Vous ne serez pas déçu.
Tout autre chose, tout en restant dans une certaine continuité, voici ma contribution à la Radio des Blogueurs de l’ami Lolobobo qui en est à sa 6ème saison. Cette année, je ne serai pas le dernier.
Etonnant, non ?