S’il y a bien quelque chose que j’apprécie chez les networks ces dernières années, c’est qu’ils parviennent pour certains à comprendre ce que c’est que de faire une série qui peut rapporter des récompenses. NBC l’a eu avec Hannibal, CBS avec The Good Wife et Person of Interest et ABC l’aura eu cette année avec American Crime. Ce n’est pas facile de faire des séries à la fois grand public et capable de ressembler à ce qui séduit les téléspectateurs américains sur le câble. C’est dommage que le succès n’ait pas été au rendez-vous pour American Crime alors que la série de John Ridley (scénariste du film oscarisé 12 Years a Slave) est justement tout ce que l’on aurait pu voir sur HBO notamment et pas du tout sur ABC. Dotée d’un casting cinq étoiles, de Felicity Huffman à Regina King en passant par Timothy Hutton, les épisodes passent mais la réflexion reste et la série parvient justement à séduire grâce à une utilisation plus que judicieuse de ses thématiques. Elle parle des enjeux de races mais pas forcément d’un point de vue simpliste puisque le but est de parler d’un crime qui va être rapidement défini comme un crime de haine raciale par la mère du garçon qui a été tué. American Crime montre d’un côté le chemin que peut parcourir une mère qui était un peu raciste sur les bords mais dont le racisme va prendre une toute autre mesure.
Sa haine va petit à petit prendre forme et va devenir la risée de tous, même de son autre fils qui n’a pas osé dire qu’il allait se mettre en couple avec une femme d’une race différente de la sienne. Les enjeux sont donc souvent familiaux dans cette série alors que les liens entre une soeur afro-américaine convertie à l’islam va se retrouver face au regard de son frère, emprisonné. C’est aussi l’histoire d’un père latino et de son fils. Les enjeux d’American Crime ne sont donc pas vraiment que raciaux, ils sont aussi familiaux alors que la série fait en sorte de traiter son histoire de tous les points de vue possibles et imaginables de ce point de vue là. J’ai adoré la façon dont le scénario prend forme ici car justement, c’est fait de façon intelligente. Au fil des épisodes on comprend ce que vivent chacun des personnages et John Ridley a voulu aussi nous faire comprendre l’impact que pouvait avoir un crime dans la tête des gens, surtout quand ces gens sont un peu trop attaché à ce que l’on peut appeler la race. John Ridley a milité pour que dans la Writer’s Room de la série il y ait toutes les races possibles représentées mais aussi une parité entre hommes et femmes.
Car en plus d’être une série forte en termes de questions de races, c’est aussi une série qui parle d’enjeux entre femmes et hommes. Les femmes sont fortes dans cette série et démontrent bien souvent qu’elles sont celles avec le plus de convictions. Cela aurait très bien pu être mal traité ou bien bâclé, mais c’est tout le contraire. Rapidement, American Crime, qui est une anthologie, veut nous démontrer qu’il y a donc toujours plus à entrevoir derrière chaque crime. La résolution finale de l’enquête va même nous permettre de comprendre pourquoi, comment et dans quel sens le fils de cette mère a été tué sans compter la place de la femme de ce dernier, qui avait une vie sexuelle peu recommandable et très volage (le choc quand les parents l’apprenne est un autre de ces moments que American Crime maîtrise plutôt bien). Si la série ne va jamais désemplir d’idées, je trouve presque dommage que la saison 2 se concentre sur une histoire totalement différente. J’aurais adoré voir un peu plus de chacun de ces personnages même si l’issue de la saison leur donne à tous plus ou moins le sentiment d’une vraie conclusion.