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2 juin au 2 juillet 2015 : errance des migrants, de la Chapelle à Pajol

Publié le 03 juillet 2015 par Asse @ass69014555

2 juin au 2 juillet 2015 : errance des migrants, de la Chapelle à PajolIl y a un mois ce jour que les migrants du " Camp de la Chapelle " ont été expulsés pour la première fois par les forces de l'ordre... Un mois d'errance dans un mouchoir de poche du 18e : du Pont de la Chapelle à Pajol en passant par le parvis de l'église Saint-Bernard, la Halle Pajol et ses violences, le jardin Dormoy et le jardin d'Eole en passant par les tentatives avortées d'installation à l'église Saint-Bernard, les gymnases Ostermeyer et Jaurès, l'ancienne caserne de la rue de l'Aqueduc...

Pour fêter cet " anniversaire ", certains ont eu l'idée d'une manifestation repassant par ces lieux de survivance. Une manif non déclarée et non autorisée qui a conduit à de nouvelles démonstrations policières...

Au cours de ce mois terriblement éprouvant pour ces migrants dont beaucoup sont candidats à la demande d'asile, nous nous sommes clairement désolidarisés de certaines actions menées par des activistes sous couvert de " démocratie ". Certes, les décisions qui les concernent doivent être prises par ceux qui sont concernés. Mais à condition qu'ils les comprennent pour en connaitre les tenants et aboutissements. Ce qui n'est pas toujours le cas...

Voila pourquoi, lorsque nous avons vu l'annonce de cette " manifestation " du 2 juin, pas question de nous y rendre !

Pas question pour nous de soutenir la moindre action qui puisse nuire plus qu'aider les migrants...

Dans le Comité de soutien des Migrants de la Chapelle il y a des personnes formidables d'abnégation, de dévouement et de débrouillardise. Mais il y a aussi des initiatives dangereuses. Le meilleur... et le pire se côtoyant sans complexe. Le comité a su convaincre les autorités de livrer des toilettes à disposition des migrants. Il est en revanche incapable d'offrir un minimum d'hygiène alimentaire et lance un appel aux médicaments contre la gale et la tuberculose qui ne sauraient être donnés sans prescription.

2 juin au 2 juillet 2015 : errance des migrants, de la Chapelle à Pajol
Aussi foisonnant de bonnes idées que bordélique, le comité passe malheureusement à côté de soutiens véritables qui peinent à prendre une place - malheureusement vacante - dans l'aide indispensable et digne aux migrants.

Pour notre part, même si nous continuons à livrer des denrées alimentaires, nous nous sommes retirés de leur distribution. Nous maintenons notre demande d'un lieu dédié à l'accueil des migrants qui leur permette de prendre le temps de comprendre leurs droits et de décider de leur avenir le plus sereinement possible.

Saïd, 18 ans, Erythréen

Placé en Centre de rétention administrative, il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.

Le jeune homme est assis sur les marches du tribunal administratif de Paris. Il enfouit son visage dans ses mains. Près de lui, un policier veille. Saïd est Erythréen, il a 18 ans. Après le démantèlement du camp de La Chapelle, il a navigué dans les rues parisiennes avant d'être arrêté, le 8 juin, aux abords de la halle Pajol, où s'étaient réfugiés d'autres migrants, expulsés le 8 juin par les CRS.

Depuis, il est enfermé, comme plusieurs autres, dans le Centre de rétention administrative de Vincennes, et fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Jeudi 11 juin, le tribunal administratif doit décider s'il rejette ou non la demande d'annulation de son OQTF, avec celle de trois autres Erythréens et trois Soudanais.

A peine entré dans le hall du tribunal administratif, Saïd est appelé par une avocate commise d'office. Celui-ci prend une vingtaine de minutes pour prendre connaissance de son parcours avant la séance.

Puis, chacun leur tour, les migrants sont appelés et assistent à une joute verbale entre le juge et le représentant du préfet de police. Ils restent cois. Ils ne comprennent visiblement pas ce qui se passe, malgré l'aide d'un traducteur. Quand les deux principaux acteurs de la séance ne se disputent pas au sujet de l'interlignage des formulaires remplis par les policiers lors des interpellations, ils mettent en doute la volonté des migrants de rester en France. Les répliques se ressemblent, quelles que soient les particularités des parcours de Ziré, Mohamed, Nadif et des autres.

Ainsi, l'avocate donne des informations sur les situations particulières des migrants, qu'elle a découvertes peu de temps auparavant. "Il est arrivé il y a deux semaines. Il y a des risques pour sa vie s'il rentre dans son pays. Il a été placé en centre de rétention et a demandé l'asile. L'examen de sa situation personnelle a été fait de façon trop sommaire. Un renvoi vers son pays d'origine serait une violation de l'article 3 de la CEDH", plaide-t-elle.

En réponse, le représentant du préfet de police explique que les migrants arrêtés ont occupé la halle Pajol de façon illégale et que n'ayant pas engagé de procédure de demande d'asile, ils ont logiquement été arrêtés. Puis, il affirme que la personne n'avait pas la réelle volonté de demander l'asile en France car elle voulait certainement poursuivre sa route vers un autre pays. La personne a donc, estime-t-il, fait la demande au centre de rétention car elle n'avait plus le choix. Et comme les personnes ont été enregistrées dans d'autres pays avant d'arriver en France, ce sont, selon la convention de Dublin, ces pays qui sont compétents. Ils vont donc être renvoyés vers l'Italie, leur point d'entrée dans la communauté européenne, s'ils ne sont pas passés par un autre pays entre-temps.

Parfois, le juge engage une discussion directe avec le migrant. "Il faut demander l'asile dans le premier pays de l'Union européenne dans lequel on passe", explique-t-il. Le migrant : "On ne nous a pas dit ça. En Italie, on m'a demandé si on voulait rester. J'ai dit non." Le juge : "Nul ne doit ignorer la loi, Monsieur. Vous êtes resté une semaine en France sans avoir entamé de démarche. Je ne suis pas convaincu de votre volonté de rester en France." Le migrant : "Je ne savais pas où aller." Le juge : "Monsieur, quand on est menacé dans sa vie, on n'attend pas tranquillement."

Saïd n'a quant à lui pas eu l'occasion d'engager la discussion avec le juge. Mais l'avocate a pris un peu de temps pour expliquer sa situation. "Il était très stressé lors de notre entretien, explique-t-elle. L'interprète a fondu en larmes et a pris un temps d'arrêt avant de traduire ce qu'il a raconté de son histoire."

Le père et les frères de Saïd ont été enrôlés dans l'armée érythréenne. Par peur d'être considérés comme des déserteurs, ils ont dû y aller et y rester. Quand Saïd a été appelé à son tour pour le service, par peur, il a pris le risque de partir. Il a décidé de venir en France pour rejoindre de la famille qui s'y est installée, explique l'avocate. Il est venu avec des passeurs et doit donc maintenant les rembourser.

Sur sa fiche Eurodac (une base de données européenne), il est indiqué qu'il a été enregistré en Suisse en juin 2014 puis en Allemagne en mars 2015. Selon la convention de Dublin, la France peut demander à la Suisse de le reprendre, qui pourra à son tour demander à l'Allemagne d'en faire de même... D'où la tentation de certains des migrants de se débarrasser de toute trace de leur passage dans d'autres pays européens, quitte à se brûler le bout des doigts pour effacer leurs empreintes digitales.

Ce jeudi 11 juin, toutes les requêtes de demande d'annulation de leur obligation de quitter le territoire français ont été rejetées.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/visuel/2015/06/19/a-paris-le-parcours-du-combattant-des-demandeurs-d-asile-se-poursuit_4657474_3224.html#yGcyqABvicHSQyRj.99


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