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[Critique] Terminator Genisys

Par Régis Marton @LeBlurayphile

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Terminator Genisys

Un film de : Alan Taylor

Avec : Arnold Schwarzenegger, Jason Clarke, Emilia Clarke, Jai Courtney, Byung-Hun Lee, Matt Smith, J.K. Simmons, Dayo Okeniyi, Courtney B. Vance

Le leader de la résistance John Connor envoie le sergent Kyle Reese dans le passé pour protéger sa mère, Sarah Connor et préserver l’avenir de l’humanité.
Des événements inattendus provoquent une fracture temporelle et Sarah et Kyle se retrouvent dans une nouvelle version du passé. Ils y découvrent un allié inattendu : le Guardian. Ensemble, ils doivent faire face à un nouvel ennemi. La menace a changé de visage.

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La nostalgie comme premier argument scénaristique

Première chose à faire avant de voir ce cinquième opus de la saga : en oublier Terminator : Le soulèvement des machines et Terminator Renaissance! De la même façon que Jurassic World sorti quelques semaines plus tôt, Terminator Genisys peut être vu à la fois comme une suite et un reboot. Un argument tiré par les cheveux dont les services marketing des studios hollywoodiens semblent prêts à abuser pour réconcilier les fans avec des franchises auxquels quelques épisodes maladroits ont fait perdre leur attractivité. Mais si l’on pouvait voir dans Jurassic World une certaine autocritique de cette volonté de réappropriation des vieilles recettes, Terminator Genisys n’hésite pas – au contraire – à fouler du pied tout ce que James Cameron a mis au point dans ses deux films de 1984 et 1991, ni d’ailleurs à recycler certaines idées des deux suites et de la série télévisée Terminator : Les chroniques de Sarah Connor qu’il prétend renier.

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Dans la première dizaine de minutes, le film développe ce futur dystopique que l’on apercevait déjà au début de Terminator 2 : Le jugement dernier – mais qui ici ressemble à ce que l’on a pu voir dans Matrix Revolutions ou, plus récemment, X-men : Days of the future past – où l’enjeu majeur n’est en rien la guerre entre humains et machines, mais la relation père-fils qui s’est établi entre John Connor et Kyle Reese à travers des dialogues dont l’absence de finesse est aberrante. Après ce prologue sous forme de mélange disgracieux de post-apocalyptique et de bons sentiments, le film va suivre son héros en 1984 où, en plus copier les plans des premières minutes du film initial, il reprend les principaux éléments des deux premiers films, à savoir, en terme d’intrigue un besoin de protéger Sarah Connor et un affrontement entre machines venues du futur, et, en terme d’action, des fusillades et des effets pyrotechniques explosifs et des effets numériques (notamment pour assurer un face à face entre un Schwarzenegger jeune et un Schwarzenegger plus âgé ainsi qu’un T-1000 polymorphe et invincible grâce à la matière liquide dont il est composé). En gros, absolument rien de nouveau, sinon un renouveau des effets spéciaux qui ne réjouira que les quelques-uns qui préfèrent voir des scènes filmées sur fond vert que les maquillages et les animatronics qui, certes, n’ont pas forcément bien vieillis, mais participaient au charme des premiers films (en particulier celui de 1984 qui, pour rappel, disposait d’un budget près de trente fois inférieur à celui-ci).

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Incohérence sur incohérence

Un T-1000 en 1984 ? Ceux qui connaissent un tant soit peu la saga savent que le T-1000, qu’interprétait brillamment Robert Patrick en 1991, n’est envoyé qu’en 1995 pour abattre le jeune John Connor. Alors qui l’a envoyé 11 ans plus tôt pour prendre de l’avance? Et, de la même façon, qui a envoyé un T-800 en 1973, et surtout qui, dans le camp des humains inévitablement, l’a programmé pour protéger et apprendre à se battre à Sarah Connor ? À ces questions, la réponse du duo de scénaristes, Laeta Kalogridis et Patrick Lussier, est bien simple : On s’en moque et on le garde pour la suite!

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Le scénario préfère s’attarder à la question « Comment faire croire, en 2015, que le fameux Jugement dernier provoqué par Skynet peut encore avoir eu lieu en 1997 ? ». Là encore, rien de plus simple que de la retarder de 20 ans sans en justifier la raison. Après ce bref passage en 1984, c’est donc vers 2017 que les scénaristes envoient Kyle Reese et Sarah Connor pour retrouver un John Connor devenu adulte et tenter d’arrêter une application pour tablette de déclencher la dite apocalypse. Un voyage dans le temps qui est, d’entrée de jeu, annoncé comme sans retour. Or, si John Connor ne nait pas en 1985 comment peut-il exister en 2017 ? Là encore, la question est éludée d’un revers de manche. On n’échappe d’ailleurs au petit jeu des souvenirs issus de réalités alternatives, une autre qui ne fait que rendre l’écriture plus brouillonne encore. Non, décidément, absolument rien ne tient la route dans cette trame spatio-temporelle! Peut-être pouvait-on en espérer une réflexion philosophique sur la place de l’Intelligence Artificielle et la menace qu’elle peut représenter. Surtout en sachant que Laeta Kalogridis a autrefois travaillé sur Ghost In The Shell, l’un des scénarios les plus aboutis sur le sujet. Mais la nouvelle incarnation de Skynet tient un discours aussi insipide que ne le faisait Ultron dans Avengers : L’ère d’Ultron.

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Film formaté et casting bugué

Et si seulement la comparaison à Avengers pouvait s’arrêter là… Dans sa construction, le rythme et les touches d’humour du film sont typiquement calqués sur les films Marvel. De l’ambiance de thriller urbain et de course contre la montre sur lesquels reposaient les films de Cameron, Alan Taylor n’a conservé que le besoin de justifier des batailles impressionnantes. Pour le reste, le réalisateur a conservé la recette de son précédent film, Thor : Le monde des Ténèbres, en identifiant le personnage de Schwarzie à un super-héros et en faisant se suivre les combats contre des ennemis de plus en plus redoutables. Une narration et une mise en scène parfaitement calibrées sur les derniers succès du box-office mais, de fait, dépourvues de personnalité.

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Il en est de même du casting, car en dehors de la joie – ou plutôt, encore une fois, de l’effet de nostalgie – de retrouver Arnold Schwarzenegger dans le rôle qui l’a rendu populaire trente ans plus tôt, les autres acteurs n’arrivent aucunement à rivaliser avec ceux des versions antérieures. Tout d’abord, Emilia Clarke qui, même si elle est loin d’avoir le charme viril de Linda Hamilton à côté de qui elle parait frêle et immature, dégage une énergie qui rend son personnage convaincant, jusque dans les scènes où elle doit faire preuve de sensibilité où son jeu se révèle des plus superficiels. Mais la pire aberration est d’avoir remplacé un Michael Biehn, svelte et charismatique, en un Jai Courtney aux allures, au mieux de Chaning Tatum du pauvre, au pire de bovin inexpressif. Ce même Jai Courtney qui enterrait la franchise Die Hard en incarnant le fils de John McClane à qui il devait remettre le flambeau dans le catastrophique Die Hard : Belle journée pour mourir. Dans la peau de John Connor, Jason Clarke non plus est bien incapable de se montrer charismatique tant il a l’air d’une grosse patate par rapport au Michael Edwards aperçu dans Terminator 2. Dans un rôle bien moins important mais où le problème reste le même, celui de Miles Dyson, puisque Joe Morton, avec son sourire et sa naïveté, le rendait sympathique, mais dont alter-ego, certes diégétiquement 25 ans plus vieux, est rendu détestable par le jeu apathique de Courtney B. Vance. Autre choix discutable : Byung-Hun Lee en T-1000. Certes, l’acteur coréen dégage une froideur assimilable à celle de Robert Patrick, mais sans faire aussi peur. Et puis, la surprenante présence de J.K. Simmons en policier semble n’être qu’une autre des digressions du scénario, tant son personnage n’apporte finalement rien du tout à l’histoire. Mais peut-être s’agit-il là encore d’une question sans réponse ou d’une piste inexploitée que les prochains films se devront de résoudre.

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Car oui, il s’agit bien là d’un film pensé comme étant le premier d’une nouvelle trilogie qui devra être bouclée dans la précipitation, soit par Taylor soit par d’autres yes-man, avant que la Paramount ne perde les droits aux profits de James Cameron en 2019. Mais alors, comment se justifiera à nouveau la présence de robots venus du futur si l’émergence de Skynet a été empêchée en 1997 puis en 2017 ? Et bien, à nouveau, il aura lieu… L’argument de l’éternel recommencement est sans conteste la solution de facilité la plus plausible à attendre de cette fameuse trilogie dont on ne doute plus qu’elle ne cherchera qu’à nous faire oublier les deux classiques de 84 et 91 – dont les enjeux sont d’ors et déjà caduques – au profit d’un cinéma dédaigneux uniquement mû par ses velléités commerciales.

Nos attentes pour une sortie Blu-Ray Collector

Un coffret métallisé incluant les deux films de James Cameron et un début d’explications aux trop nombreuses incohérences sur lesquelles repose celui-ci.


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