Nous reprochons aux peuples chrétiens ou autres, la persécution par eux du peuple juif à travers les siècles. Il se trouve des personnes pour nous dire " N'en faisiez-vous pas autant lorsque vous étiez les plus forts et que des minorités religieuses vivaient dans les mêmes pays que vous ? Votre code mosaïque ne prêche-t-il pas l'extermination de certaines tribus de Canaan ?
Ouvrez votre bible et vous verrez....La religion juive est intolérante m'a-t-on dit. Est-ce vrai ? J'ai voulu remonter à la source : J'ai ouvert la Bible et j'ai vu.....
Il fut prescrit, il est vrai, aux israélites de détruire certaines tribus de Canaan et " de ne laisser aucun être animé ". " Dans les villes de ces peuples que l'Eternel ton D' te donne en héritage, tu ne laisseras vivre rien de ce qui respire " (Deut. XX,16)
On ne devait épargner ni les femmes ni les enfants qui devaient être passés au fil de l'épée ainsi que leurs époux et pères.
Mais la bible donne elle-même l'explication de cette cruauté : Ces tribus devaient être anéanties " afin qu'ils n'enseignent pas aux Israélites les abominations qu'eux-mêmes accomplissent en l'honneur de leurs dieux " (Deut. XX,18)
Le jugement de Salomon (Nicolas Poussin)
Le pentateuque d'ailleurs ne mentionne que certaines de ces abominations, de ces crimes qui nous remplissent d'horreur. D' ne prescrivit cette extermination que dans une pensée de suprême miséricorde afin d'empêcher le mal de s'étendre et de gangréner le monde entier. D' a prescrit un acte comparable à celui du chirurgien qui ampute une jambe afin de sauver le reste du corps.
Il ne faut donc pas voir dans ces guerres d'extermination une preuve d'intolérance envers les autres religions mais un acte qui ne fut dicté que par des circonstances toutes particulières. Examinons dans le pentateuque les lois qui nous enseignent comment nous devons traiter les adeptes des croyances étrangères.
Nous lisons dans l'exode (XXII, 21) " Tu ne maltraiteras ni n'opprimeras un étranger et tu ne l'affligeras point, car vous avez été étrangers dans le pays d'Egypte " Plus loin, " Tu ne haïras point l'Egyptien car tu as résidé dans son pays "
La loi n'établit aucune distinction entre les juifs et les païens : " L'étranger qui séjourne parmi vous, vous sera, comme celui qui est né parmi vous et tu l'aimeras comme toi-même " (Lévitique : XIX, 33-34). La loi est la même pour le juif et pour l'étranger : " Il y aura une même loi pour celui qui est dans le pays et pour l'étranger séjournant au milieu de vous " (Exode XII, 49)
L'étranger avait le droit d'offrir un holocauste et d'assister au service divin : " Si un étranger séjournant avec vous ou une autre personne offre un sacrifice à l'éternel, il fera comme vous ferez " (Nombres XV, 14-15) Nous voyons par là que D' lui-même tolère ceux qui ne croient pas en lui. Nous devons nous, encore plus les tolérer.
Rappelons-nous que Salomon n'oublie pas dans sa prière d'implorer D' pour ceux qui ne professent pas la même religion que lui : " Quand un étranger viendra prier dans cette maison, exauce-le des cieux et fais tout ce que cet étranger réclamera de toi " (Chroniques VI, 32-33)
Nous savons par le Talmud et d'autres récits confirmés par des découvertes récentes, que cette prière ne fut pas seulement l'expression personnelle des sentiments élevés d'un Roi sage et libéral. On a en effet découvert que tout autour de la plateforme où s'élevait le temple, il existait un grand corridor connu, sous le nom de " cour des païens " et réservé aux étrangers. Cette cour parait il était plus vaste que la cour réservée aux hommes d'Israël.
D'ailleurs l'esprit de tolérance que nous trouvons dans la prière de Salomon, est l'esprit même de notre loi.
Si les deux religions qui sont nées de la nôtre étaient imprégnées de ce même esprit de large tolérance, on n'aurait pas vu, et on ne verrait pas aujourd'hui encore tant de persécutions sanglantes, de massacres impitoyables. On n'aurait entendu les cris de femmes et d'enfants qu'on égorge et qu'on torture, cris dont l'écho nous remplit de terreur et de pitié, pour ceux dont le tort est d'être d'une religion différente de celles de leurs persécuteurs.
Ce fut et dans le siècle dernier seulement, que quelques nations chrétiennes proclamèrent le principe de la tolérance religieuse adopté par Moise il y a plus de 3000 ans. Aussi, comme nous le voyons, parmi les diverses religions, dont chacune est convaincue de posséder le monopole de la vérité, seule la doctrine juive est animée, comme jadis d'un véritable esprit de charité et de tolérance religieuse.
Il peut exister beaucoup de religions mais on ne peut admettre qu'une seule morale : L'esprit de large tolérance de notre Loi s'exprime dans cette belle maxime de nos sages :
" Les hommes de bien de toutes religions ont part à la vie future "
David ALFASSI (Insituteur à Fès)
Fès le 30 Mars 1936