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Voyage d'été

Par Gentlemanw
Voyage d'été

Le soleil caresse les fleurs, une couronne, une stèle froide de granit. Elle repose là maintenant.

Hasard du vide, avec une famille actuelle où certains enfants, petits-enfants vivent aux quatre coins de la France, du monde même, avec en bonus les vacances, personne où presque n'a voulu changé son programme, envoyant des excuses pour absence à la cérémonie. Notre grand-mère, arrière-grand-mère même n'a eu que quelques amies locales, quelques proches et moi derrière elle. Etrange sensation quand on connaît sa gentillesse, sa présence et ses bras ouverts, ses câlins et ses douceurs culinaires, chacun de nous a pourtant savourer ses flans onctueux, ses madeleines, ses confitures uniques, ses moments dans la cuisine ou autour d'une table. Une femme toujours prête pour les grands repas de famille, pour écouter les chagrins et les amours des enfants, des jeunes filles, des garçons. Son regard noisette perçait sans blesser les doutes et les absolus de chacun, guidait les pas suivants avec sa sagesse.

Aujourd'hui la maison prend l'air, je suis seule, ici chez elle, j'ai décidé de libérer les pièces des esprits coincés par le temps, les générations. Toute la maison avec ses fenêtres ouvertes, le jardin passant par la porte d'entrée pour aller vers le potager derrière, par la porte de la cuisine, des courants d'air, des souvenirs nombreux. Une grand maison blanche, posée dans un coin de nature, un lieu de repos depuis sa retraite, mais aussi une vie active, des guerres, des enfants, des mariages, des divorces, des repas et des fêtes. Nous avons tous des photos , en toutes saisons, je les ai étalées sur la table du salon, immense, remplie de toutes les générations, en couleur et noir et blanc. Miracles de voir des parents petits, des enfants inconnus, du moins, je ne peux mettre un prénom dessus, des militaires, des paysans, des fêtes locales, des mariées, des chevaux et des jardins, des couleurs seventies, des tenues de tous âges, je voyage depuis deux jours dans ma famille. Sans leur présence, sans leurs commentaires aigris pour certains, sans leurs rires non plus face à nos sourires figés d'autres décennies, je classe au mieux, je vais ranger tout cela dans un boîte à chaussures, les numériser pour tous, enfin pour ceux qui souhaiteront connaître le passé.

Je ne suis pas nostalgique car c'est simplement une partie de moi, plus qu'un gène, une tranche d'histoire.

Et là-haut, j'ai ouvert des armoires, des lieux interdits quand j'étais petite, pour éviter que nos jeux abîment les meubles, les lits, les armoires. Des endroit oubliés quand je venais moins souvent dans ma période adolescente, préférant la ville à la campagne tranquille, paradoxe d'un âge. J'ouvre les portes, j'ouvre les armoires, les commodes, tout est là, l'odeur de la lessive, des bouquets de lavande maison et un peu de renfermé. J'aère les lieux et les esprits.

Sur une tringle, posées, des robes, des années 40 à 70, trente ans de mode, du fait maison, avec de petits moyens, une robe de mariée (à qui appartenait-elle ?), des robes provenant de petits magasins, du village ou de la ville. Je regarde, je la vois dedans, le souvenir des photos vues hier soir, avec ce modèle, elle a tout conservé. Là une robe fifties, corolle et froufrous d'origine, blanche dessous, des pois dessus, je ne peux résister. Je me glisse dedans.

J'adore traverser le temps, je ferme les yeux, je les ouvre face au miroir, elle est encore là, à travers moi, nos traits communs, cette robe.

Nylonement


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