The Outcast est une nouvelle minisérie de deux épisodes diffusée les 12 et 19 juillet sur les ondes de BBC One. Peu de temps après la conclusion de la Deuxième Guerre mondiale le soldat Gilbert Aldridge (Greg Wise) rentre au pays et sa froideur contraste grandement avec la jovialité de son épouse Elizabeth (Hattie Marahan) et de leur fils Lewis (Finn Elliot et plus vieux, George MacKay). Par un bel après-midi d’été, la mère et sa progéniture se rendent pique-niquer au bord d’une rivière. Puis, vient le temps de la baignade et Elizabeth dont la jambe est restée accrochée à une sorte de câble se noie sous les yeux impuissants de Lewis. Peu de temps après, son père se remarie pour une seconde fois avec une femme prénommée Alice (Jessica Brown-Finlay), mais malgré tous les gestes attentionnés à l’égard de son nouveau fils, rien n’y fait et Lewis reste dans sa coquille. Adaptation du roman éponyme signé Sadie Jones, The Outcast est un genre de conte triste qui a pour principale fonction de nous tirer les larmes des yeux, mais c’est justement là où la série échoue dans une certaine mesure. Faisant usage d’un peu trop de clichés, de répétition et ne tirant pas assez des formidables acteurs au casting, on est passé à côté d’une fiction qui sur papier avait un fort potentiel.
Étranger de tous
Dans le premier épisode, nous assistons à la transformation d’un jeune homme rieur et généreux à un autre qui après la mort de sa mère demeure renfermé sur lui-même et mélancolique. Puis, à l’adolescence alors qu’il est de plus en plus révolté, il tente dans un premier temps de s’ouvrir les veines et plus tard, il va jusqu’à mettre le feu à l’église de la paroisse tout en reconnaissant son crime par la suite, ce qui lui vaut plus de deux ans de prison. On nous épargne cet intermède et au second épisode, il en sort assagi, mais toujours endeuillé. Il renoue surtout d’amitié avec les deux sœurs Carmichael, Tamsin (Daisy Bevan) et Kit (Jessica Barden) qui ne sont pas insensibles à son charme. Mais leur père Dicky (Nathaniel Parker), les a à l’œil et d’ailleurs les bat régulièrement. C’est par amour pour Kit que Lewis décide de dénoncer l’homme devant tout le village.
Comme titre, The Outcast ne pourrait être mieux choisi. En effet, Lewis, probablement inconsciemment, rend tout le monde mal à l’aise à commencer par son père qui n’a jamais manifesté de tendreté à son égard et qui s’accommode très bien à ce que son fils le surnomme : « sir ». Chez les femmes, c’est la même chose : sa belle-mère a beau tenter de se rapprocher de lui, elle sait qu’elle ne sera jamais plus qu’un second violon; une pâle copie de celle qui a péri au fond du lac. Quant à Tamsin, elle n’est attirée par lui que parce qu’on lui a accolé cette image de rebelle et n’hésite pas une seule seconde à le mettre dans le trouble pour sauver sa peau.
Au départ, on peine à comprendre pourquoi Lewis évite systématiquement les autres, puis, au fil des scènes qui passent, on comprend que la mort d’Elizabeth, telle que nous l’avons vue en tant que téléspectateurs, n’est pas du tout celle imaginée par le reste du village. C’est qu’intimidé ou se sentant coupable, le Lewis de dix ans n’a jamais été très loquace envers les policiers pour expliquer la disparition de sa mère. Et comme il fallait s’y attendre, les ragots ont fait le reste du travail. Certains colportent qu’elle était saoule en cet après-midi fatidique, d’autres que son fils aurait pu la sauver et pire encore, certains croient qu’il aurait tué sa mère. Bien que personne ne l’ait accusé ouvertement, Lewis a senti toute sa vie ces regards pleins de jugements et comme ces doutes ont été transmis à la génération suivante, il comprend enfin qu’il n’y aura point de salut pour lui s’il reste au village.
Yeux secs
Le fait que l’on découvre peu à peu l’ampleur du mépris général envers Lewis explique pourquoi, plus de dix années après le drame, il ne s’en est toujours pas remis, mais ce n’est pas pour autant un facteur qui contribue à toucher la corde sensible du téléspectateur. En fait, tout au long de The Outcast, on voudrait être ému, mais on n’y arrive pas. La mise en scène ne peut pas être mise en cause : les prises de vues sont splendides et la trame sonore envoutante; toutes deux dignes d’un long métrage en salles. C’est dans l’enchaînement des scènes et des dialogues que ça pose problème. On sait qu’éventuellement des protagonistes mentionneront la rivière où s’est déroulé le drame et on sait quel genre de réaction cela aura sur Lewis. Et de par la relation amicale qu’il y avait entre lui et Kit avant la mort de sa mère, on peut prédire assez vite qu’une histoire d’amour naîtra entre eux plus tard. Puis justement, on passe de ce drame personnel à celui que vivent les Carmichael de façon maladroite et quant à la relation entre la belle-mère et Lewis, ça demeure du sur-place sans qu’on arrive à en tirer quoi que ce soit d’intéressant en terme d’émotions. Ensuite, voilà qu’on éclipse toute la période d’internement du principal intéressé qui devrait en principe être un élément clé dans son développement psychologique. Enfin, les flashbacks d’Elizabeth, qu’elle soit au fond du lac ou alors en train de s’occuper de son fils sont beaucoup trop nombreux et placés à n’importe quel endroit si bien qu’ils ne sont plus un vecteur capable d’influencer notre baromètre à larmes.
La programmation du dimanche soir fait des siennes chez la principale chaîne publique, et ce, depuis le mois de mai alors qu’elle lançait Jonathan Strange & Mr Norrell qui a connue un départ à 4,50 millions de téléspectateurs et une finale à 1,70. Puis, The Outcast, s’en est mieux tiré avec 5,12 millions pour la première et 4,51 la semaine suivante, mais parions que BBC One visait plus haut. Justement, après la pluie, le beau temps semble-t-il puisque sa nouveauté à la même case horaire, Partners in Crime qui est une adaptation d’un roman d’Agatha Christie a signé son meilleur départ depuis Poldark. Il est de ces classiques qui auront toujours la cote.