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We are your friends, hymne déconcertant à la beaufitude

Par Rémy Boeringer @eltcherillo

We are your friends, hymne déconcertant à la beaufitudeMax Joseph, dont c’est le premier long-métrage, risque fort de ne pas percer comme son héros, interprété par l’histrion Zac Efron. Réfractaire à l’électro bas de gamme distillée à longueur de journée sur les ondes mais pas opposés au genre, nous nous attendions à ce que We are your friends s’adresse à un public de passionnée qui savent que l’électro est née en Allemagne avec Kraftwerk, qui apprécient davantage Birdy Nam Nam, Zombie Zombie ou Kavinsky que le dernier David Guetta formaté à la petite cuillère. A la place, on assiste impuissant à l’apologie bête et méchante de ce qui tue à petit feu tous les sous-genres musicaux : la promotion de l’argent-roi.

Cole Carter (Zak Efron), aidés par ses trois amis, Mason (Jonny Weston qui après avoir participé au délirant John dies at the end, a malheureusement continué sa carrière avec un trio maudit, Divergente 2: l’inssurection, Project Almanac et Taken 3), Ollie (Shiloh Fernandez) et Squirrel (Alex Shaffer), ambitionne de devenir le meilleur DJ de Los Angeles. Fortuitement, il fait la rencontre de James Reed (Wes Bentley que l’on a vu dans American Horror Story), un DJ reconnu et de sa ravissante compagne Sophie (Emily Ratajkowski aperçue dans Gone Girl). Ces derniers vont décider de le soutenir.

We are your friends, hymne déconcertant à la beaufitude
Cole (Zak Efron) et James (Wes Bentley)

Les quatre compères de We are your friends sont des petits cons. Rien d’autre. Ils donneront raison à n’importe lequel de vos vieux oncles réactionnaires incapable de comprendre les motivations d’une jeunesse cherchant des défouloirs pour échapper à la morosité. Parce qu’ils perpétuent tous les clichés qui rendent détestable le milieu de la nuit qui a troqué l’underground contre les paillettes, l’art contre la soupe facile et interchangeable. Parce qu’ils ont oublié, qu’à la suite de la musique disco qui parsemait les dancefloors de réflexions sociales succinctes mais sans équivoques (replongez-vous dans les paroles d’Abba ou de Boney M pour vous en convaincre), l’électro, reprenant des phrasés simples, mettait en contradiction l’aliénation des grandes villes et la libération supposée par les outils technologiques. Loin de promouvoir la superficialité, elle la dénonçait et prôner un lâcher prise salvateur. Un lâcher prise que les marketeux des boites de productions ont transformé en grande foire de l’égocentrisme et qui n’a plus grand-chose avoir avec les origines. Dans les boites de nuits, les entre-soi regarde leur nombrils et noie leur solitude dans la drogue et l’alcool.

We are your friends, hymne déconcertant à la beaufitude

Sophie (Emily Ratajkowski)

A cela, se rajoute une véritable culture de la beauffitude dont les amis de We are your friends sont de sincères porte-étendards. Sincères, oui, vraiment. On sent bien que Max Joseph a voulu faire d’eux d’authentiques personnages appréciables. Tous les travers dans lesquels il se trouvent sont traités avec une empathie qui confine parfois le spectateur un brin critique au dégoût. Premièrement, les quatre gosses n’ont pas d’autre ambitions que de brasser de la maille. Comme si c’était forcément le seul accomplissement que l’on pouvait espérer dans une vie. Ils acceptent même de travailler pour un escroc, Paige (Jon Bernthal que l’on a pu voir dans Fury et dans la première saison de The Walking Dead), qui finit le travail des banques en ruinant des familles. Et ils sont assez débiles pour feindre de ne pas se rendre compte de la teneur de leur métier. Les femmes, ensuite, ne sont que de la chair à mater et l’occasion pour le réalisateur de filmer des culs sans autre prétentions que de faire vendre. De la même manière que la vacuité artistique des productions électro actuelles est généralement comblée par des clips misogynes et remplis de femme-objets. L’héroïne elle-même est présentée comme une cruche soumise. Une autre activité enrichissante du groupe de mâle alpha est de ramener un maximum de filles pour qu’elles se trémoussent en soirée, inconsciente d’être la marchandise première de ce jeu de dupe. Rajoutez à cela, exaspérante manière de glisser du langage « jeune » dans chaque réplique et on s’attend à voir surgir Kev Adams à chaque seconde.

We are your friends, hymne déconcertant à la beaufitude
Squirrel (Alex Shaffer), Cole (Zac Efron), Mason (Jonny Weston) et Ollie (Shiloh Fernandez)

Aucun des protagonistes de We are your friends ne parvient à animer la moindre empathie du public. Rendus détestables par leur conception lourdingue et grossière de la vie, tous les efforts de Max Joseph pour donner de la substance à leur discours et aux dialogues abscons rate immanquablement. Fil d’Ariane du film, le triangle amoureux qui se noue est aussi vide d’émotion que le dernier clip de Maître Gims. Les tentatives de rendre passionnantes les phases créatives ne font que révéler maladroitement les failles d’une génération devenue incapable de rêver, le héros rencontrant le succès en se reconnectant avec la nature, délaissant ses écouteurs pour la première fois. We are your friends élude rapidement cette problématique, plus complexe qu’il n’y paraît pour revenir dans le champ des apparences dans un final très décevant. We are your friends essaie juste une fois de plus de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Rien de plus.

Boeringer Rémy

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