Benoît Poelvoorde tourne beaucoup, et, à quinze jours d'intervalle, on a pu le voir dans " Une famille à louer ", dont je vous ai parlé la semaine dernière, et, cette semaine sort " le tout nouveau testament ", titre un peu rébarbatif, qui désigne évidemment une réécriture des Evangiles mais une réécriture assez particulière ! Un film blasphématoire ? Non, pas du tout... Mais on va y venir.
Le réalisateur, Jaco Van Dormael (flamand comme son nom l'indique, quatre films au compteur seulement depuis 25 ans) a réuni ici la crème du casting belge (outre Poelvoorde, nous avons Yolande Moreau, François Damiens et bien d'autres) pour une histoire complètement déjantée, puisqu'il nous raconte carrément l'histoire de Dieu, installé à Bruxelles ( joué par Poelvoorde, évidemment), qui, depuis son ordinateur sur lequel il travaille en solitaire, crée le monde le plus foutraque possible, dans une ambiance, qui, par certains côtés, évoque le fameux " Brazil ", de Terry Gilliam. Mais Dieu a des problèmes : malgré l'autorité tyrannique qu'il fait régner chez lui sur sa femme, sa fille, et sur JC, son fils (oui, Jésus Christ, qui ... mais non, c'est complètement irracontable !), les choses ne se passent pas comme il l'entend, et sa fille flanque une pagaille d'enfer.
Nous savons depuis longtemps que les créateurs belges ont un sens de l'absurde très développé, dans le domaine de la peinture, du spectacle vivant, mais aussi du cinéma. D'ailleurs, le premier, et très beau film, de Van Dormael, " Toto le héros ", débordait de scènes cocasses, mais d'une inventivité visuelle extraordinaire (dans ce film, par exemple, la vision fugace d'une famille réunie autour d'un gâteau d'anniversaire avec bougies, dans un camion bâché). C'est un film comique complètement dingue, d'un comique qui va, par certains côtés, dans le sens d'un Bruno Podalydès lorsqu'il réalise " comme un avion " (beau succès à Toulouse, 12 000 entrées, quand même...) mais qui va beaucoup plus loin dans la description d'un monde chaotique, où cependant le merveilleux peut surgir à tout moment. Grâce à la magie des effets spéciaux, Jaco Van Dormael fait, par exemple, suivre un oiseau par l'un de ses personnages, et ce jusqu'au Pôle Nord, dans une séquence de poésie pure. Mais des séquences comme celle-là, il y en a des dizaines, et, malgré une légère baisse de rythme en milieu de film, celui-ci se termine en apothéose.
Donc, vous l'avez compris, vous mélangez le chiffre 18, les entrailles inquiétantes d'une machine à laver le linge, un orang outan, Catherine Deneuve et une équipe de base-ball, et vous avez le film le plus drôle qui soit, d'une drôlerie qui vous fait sortir de la salle ébahis, un peu hébétés, un peu " sur un nuage ", en tout cas contente ou content d'avoir vu cela, plutôt qu'une histoire de quinquagénaires trompés par leur femme, avec toujours les mêmes acteurs .Triomphe à Cannes, cette année, où il a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, ce film va pétarader à Toulouse... Et, après l'avoir vu, vous regarderez votre ordinateur d'un œil différent !
[email protected]