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Même les anciens chauffeurs du KGB ont droit à l’oubli

Publié le 05 septembre 2015 par Elisa Viganotti @Elisa_Viganotti

Même les anciens chauffeurs du KGB ont droit à l’oubli La divulgation, 13 ans après les faits, d’informations relatives à l’emploi de chauffeur occupé par un Estonien au service du KGB s’analyse en une violation du droit de l’intéressé au respect de sa vie privée

CEDH, 1èreChambre, Affaire Sõro c. Estonie (requête no 22588/08)


Le 3 septembre dernier, la Cour européenne des droits de l’homme a dit, à la majorité, qu’il y a eu :

Violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée) de la Convention européenne des droits de l’homme


Dans cette affaire, M.SORO se plaignait de la publication, au journal officiel estonien de 2004, d’informations relatives à l’emploi de chauffeur qu’il avait occupé au service du Comité pour la sécurité de l’État de l’URSS (le KGB) à l’époque soviétique. 
La Cour a estimé que la publication d’informations sur l’emploi de chauffeur occupé par le requérant au service du KGB a nui à la réputation de l’intéressé et qu’elle s’analyse par conséquent en une ingérence dans le droit de celui-ci au respect de sa vie privée. Il ne prête pas à controverse entre les parties que cette ingérence, fondée sur la loi sur la divulgation, était légale. La Cour considère en outre que l’ingérence dénoncée poursuivait des buts légitimes aux fins de l’article 8, à savoir la protection de la sécurité nationale et de la sûreté publique, la défense de l’ordre, et la protection des droits et libertés d’autrui.
En ce qui concerne la question de savoir si la mesure incriminée était proportionnée aux buts poursuivis, la Cour rappelle avoir conclu, dans un certain nombre d’affaires précédentes dirigées contre d’autres États et mettant en cause des mesures analogues, que les mesures en question n’étaient pas suffisamment individualisées. Il en va de même en l’espèce. La Cour observe que la loi sur la divulgation ne fait aucune distinction selon le degré de l’engagement passé des personnes visées envers le KGB.  Enfin, si la loi sur la divulgation n’emportait pour le requérant aucune restriction d’activités professionnelles, celui-ci affirme que ses collègues l’ont dénigré et qu’il a été contraint de quitter son emploi. S’il ne s’agit pas là d’un effet recherché par la loi, cela n’en reflète pas moins la gravité de l’ingérence subie par le requérant dans son droit au respect de sa vie privée. A la lumière de ces considérations, la Cour conclut que l’ingérence en question n’était pas proportionnée aux buts poursuivis. En conséquence, il y a eu violation de l’article 8.
Pour en savoir plus : L'arrêt SORO contre Estonie (en anglais) +Viganotti Elisa Avocat de la famille internationaleMême les anciens chauffeurs du KGB ont droit à l’oubli

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