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Les animaux et la nature peuvent aider les hommes

Publié le 08 septembre 2015 par Raymond Viger

Aide aux hommes en difficultéLa nature, une bonne alimentation, un bon sommeil… tout cela est mis de l’avant dans cette maisonnée. Benoît Houle, propriétaire et fondateur de l’organisme, m’a accueillie chaleureusement dans cette demeure qui apporte aide et soutien aux hommes par le biais de la nature et de l’agriculture. J’ai aussi eu la chance de m’entretenir avec Christian, usager depuis quelques semaines.

L’arrivée

Cet organisme à but non lucratif existe depuis maintenant 14 ans. La maison est bâtie sur un terrain où cohabitent hommes et animaux: vaches, poules, lapins, chats, chiens… Ce n’est pas, à proprement parler une maison de thérapie, mais les animaux apportent une richesse à l’homme, particulièrement dans un contexte où les gens ont besoin de renouer avec leur affectivité.

D’après le propriétaire, Benoît Houle, les animaux sont bénéfiques aux hommes de la maisonnée: «Y’a des gars qui parlent aux chats et ils ont l’impression que ces animaux sont plus animés que les êtres humains. Le fait de caresser un chat leur permet de transmettre leur affectivité. Même chose avec les chiens. Quand ils les prennent, les gars se couchent à côté d’eux, comme si c’était leur blonde. Y’a quelque chose qui vient remplir le manque affectif qu’ils peuvent vivre», affirme-t-il.

Soutien et confitures

À l’Auberge de Roxton Falls, ils cultivent des fruits, dont des baies sauvages, de toutes sortes: bleuets, mûres, fraises, pommes… Cette variété de fruits leur permet de cuisiner des confitures, et les usagers y travaillent à raison de 3 jours par semaine.

«On fait environ 500 pots par semaine, c’est un peu artisanal, mais c’est 12 mois par an. Nous avons des clients dans quelques villes au Québec. On ne peut pas employer quelqu’un pour le développement, donc on essaie d’en faire la vente nous-mêmes», précise M. Houle. Grâce à un terrain de 6 acres de terres cultivables et un bon congélateur, ces messieurs produisent les fruits l’été et les congèlent de façon à pouvoir travailler toute l’année.

Pour ce travail de confiserie, les hommes reçoivent un montant symbolique de 20$ par jour, afin de les encourager dans leurs démarches. Néanmoins, chaque usager de l’Auberge doit débourser un montant mensuel selon ses revenus. Cette contribution personnelle permet de subvenir aux besoins de base de toute la maisonnée.

À bout de souffle

Malgré cette activité de financement, la ferme de l’Auberge manque d’argent.

Chaque année, Benoît Houle demande des subventions mais cela ne marche jamais. «Ce qui nuit, c’est que je suis propriétaire de la maison donc ils me disent que je suis en conflit d’intérêts, car j’en suis aussi le directeur. J’ai ouvert ma maison à d’autres personnes et je crois qu’ils ont de la difficulté à croire ça. Ils se disent: “Il doit avoir de quoi en arrière de la tête, il doit vouloir se faire de l’argent avec ça!” Moi, j’étais animateur de pastorale dans les écoles, c’est plus une mission que pour faire de l’argent. De toute façon, la plupart des gars qui arrivent ici n’en ont pas, ils payent la pension selon les revenus qu’ils ont.»

Le gouvernement ne contribue pas financièrement à cette ressource, mais des établissements gouvernementaux, tels que les hôpitaux, sont bien heureux de pouvoir y recommander leurs patients, qui sont de plus en plus nombreux à utiliser leurs services. En effet, le nombre de références augmente depuis les dernières années: au moins une demande par jour. Des professionnels de la santé recommandent même des patients atteints de schizophrénie.

Évidemment, les demandes sont traitées individuellement, tout dépendant de la gravité de la pathologie.

À la ferme de l’Auberge, il n’y a pas de limite de temps. Les hommes peuvent rester aussi longtemps qu’ils en ont besoin s’ils acceptent de participer aux tâches quotidiennes de la maison. La petite ferme peut recevoir jusqu’à 10 usagers à la fois; chacun à sa chambre.

Christian

Christian, 27 ans, demeure à la petite ferme de l’Auberge depuis peu. Il était à la recherche d’un endroit pour réfléchir à sa vie et pour se dissocier du monde de la consommation. «Le fait d’être dans la nature me reconnecte avec ce qui est concret. Je veux dire qu’avant, c’était plutôt le matériel qui comptait. Et là, je pense que ça me fait du bien de revenir aux choses fondamentales, ça me reconnecte à mon cœur.

«Disons qu’avant je vivais pour l’argent, et finalement, je m’y perdais. Je n’avais aucune fierté personnelle. C’est sûr que j’avais un problème de drogue, mais ce n’était pas le fond de la chose. J’avais un vide de sens, un vide de “pourquoi je suis ici, qu’est-ce que je fais?”», confie Christian en toute humilité.

Le vide

Christian est né au Rwanda et est arrivé au Québec à l’âge de 2 ans. Il fait souvent des allers-retours entre le continent africain et le Canada au cours de son enfance, car son père était appelé à voyager pour son travail. Mais à l’âge de 27 ans, il perd son emploi ainsi que sa copine. Il ressentait un grand vide intérieur et la vie effrénée du quotidien ne le satisfaisait plus.

Tout a commencé lorsqu’il avait 14 ans. À cette époque, sa copine consommait et il a commencé à faire de même. Il a continué à prendre de la drogue au fil des années, alors que son vide intérieur s’accentuait. «Quand tu ressens ce vide-là, t’as encore plus envie de consommer», dit-il. Il se posait des questions sur la vie en général; elle lui paraissait lourde et sans intérêts.

«Quand une société met tout en avant pour te divertir, je pense qu’il y a des questions à se poser. Il faut voir pourquoi le besoin de s’évader est aussi présent. Si on en a autant besoin, c’est que notre pression est vraiment intense. Ce qu’on nous dit, c’est que la “normalité”, c’est d’avoir un travail, de l’argent et d’accumuler du matériel.

«Pour moi, il y avait un blocage lorsque je pensais à ça, ce n’était pas une finalité. Je remettais en cause les principes fondamentaux de la société. Je me suis dit que ce n’était pas tant la consommation de drogue le problème, mais la consommation comme mode de vie», renchérit-il.

Prendre le temps

Et visiblement, l’Auberge lui a donné le temps et l’espace nécessaires pour trouver un sens à sa vie. «Je pense voir des portes. J’y pensais avant, mais je ne prenais pas le temps. C’est ça l’affaire. Travailler, aller voir des amis, consommer… À un moment donné, on ne prend plus le temps. Cela passe vite, puis on oublie. On ne prend pas le temps de penser à soi-même. Ici, j’ai tout le temps et ça fait du bien, je n’ai plus de tracas avec le monde extérieur. Cela fait en sorte que je peux davantage me recentrer sur moi», explique le pensionnaire. À l’avenir, Christian compte entreprendre des études en technique de génie industriel.

Christian n’est certainement pas le seul à se questionner sur le sens de la vie dans notre société. Éprouver un vide, c’est déjà reconnaître que quelque chose manque à notre vie. Essayer de le remplir avec la nature, c’est tenter de revivre.

Tout mon respect à Christian, pour cette merveilleuse démarche, ainsi qu’à Benoît Houle qui permet à des gens de prendre du temps afin de s’arrêter et respirer. Ils nous enseignent à écouter notre cœur et à partir à la découverte de notre potentiel. En espérant que des projets favorisant le contact avec la nature et l’agriculture se développeront au Québec, pour le mieux-être des gens qui éprouvent des difficultés dans leur vie. Longue vie à la petite ferme de l’Auberge

Coordonnées de L’Auberge Benoît Houle:
728 chemin Bachand Roxton Falls (Québec)
J0H 1E0 (450) 548-2736

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