Je reprends le récit de mes tribulations d’auteur improbable perdu dans l’immensité du monde de l’édition. Résumons-nous : deux éditeurs m’ont signifié leur refus, considérons-les comme professionnels, et un semblant de manuscrit a atterri, protégé par un sac en plastique, au fin fond d’un placard.
C’était à la rentrée, il y a deux ans déjà, donc une période très favorable pour ceux avec projets sous le bras ou très néfaste pour ceux qui en sont dépourvus. Mon cas.
J’avais, malgré tout, deux idées en tête. La première : faire relire par un oeil extérieur ma prose et la deuxième : bâtir une stratégie notamment vis-à-vis d’un éditeur, puisque manifestement je n’étais pas douée. Je me suis alors rappelée quelqu’un de mon réseau, une charmante personne, qui avait pas mal gravité dans ce secteur. Munie de ces objectifs précis, je lui ai téléphonée. Quant à relire l’opus, elle m’a dit non et pour le reste elle m’a proposé une séance, car me disait-t-elle : "j’ai un exercice génial pour secouer ta créativité ". Au point où j’en étais, tout était bon à prendre. Nous nous sommes vues, nous avons bien rigolé mais je suis sortie sans rien. Je n’avais pas avancé d’un iota : rideau.
J’ai creusé un peu plus le sujet et trois questions cruciales ont surgi.
- Ce livre est-il important pour moi?
- Si oui, pour quelle raison ?
- Et alors, comment reprendre l’ écriture pour qu’il soit publié ?
Dans mon esprit franchement à la ramasse, j’ai malgré tout capté qu’y répondre procédait de ma seule responsabilité. Je passais beaucoup de temps à m’entretenir avec des entrepreneuses qui me déroulaient leur histoire et me racontaient comment elles avaient choisi de prendre leur destin en mains. Donc le noeud était en moi, personne ne pouvait agir à ma place ni me dicter les solutions. Il me revenait de déterminer si ce bouquin procédait d’une intention réelle ou si c’était un fantasme nébuleux.
Premier pas à franchir, et non des moindres : me dégager de toutes ces pensées négatives dont j’avais été gavée généreusement entre le défaut de légitimité et un texte jugé nul ou insuffisamment abouti. M’éclaircir le citron. Après tout, j’étais coach. Il m’est revenue alors la fameuse Julia Cameron dont j’avais entendue parler dans les réseaux divers où je m’étais baguenaudée. Pour la petite histoire, cette Julia a été mariée brièvement au metteur en scène américain Martin Scorsese, le temps d’avoir une fille avec lui. Ce n’est pas cet épisode de sa vie qui l’a rendue mondialement célèbre mais un livre intitulé "Libérez votre créativité". Une démarche à suivre pendant 12 semaines pour, en quelque sorte, renaître, reprendre son souffle, virer toutes les idées toxiques que l’on trimballe, donner un sens nouveau à sa vie et comme elle le définit, retrouver l’enfant artiste qui dort en nous et que pour des raisons diverses, on a mis de coté.
Je me suis dit : 12 euros, soit le prix du bouquin, pour bosser toute seule, je ne risque pas grand chose et si ça marche, tant mieux. Action!
L’auteur a découpé ces semaines de la 1 à la 12 avec pour chacune d’elle des exercices précis à effectuer selon une progression globale assez chiadée. Sur la totalité de ces trois mois, deux sont récurrents.
Tout d’abord, ce qu’elle nomme les "morning pages", 3 pages obligatoires à remplir tous les matins sans exception, avec tout ce qui passe dans notre cerveau atrophié à cet instant, sans contraintes ni préjugés, car ces feuilles sont nos vraies bonnes copines. Pour la blogueuse que je suis, si écrire ne me pose pas de problèmes, le démarrage n’a pourtant pas été foudroyant. Ainsi certains jours je me suis contentée d’aligner "je n’ai rien à dire" ou "ça m’ennuie". Cependant, ça s’est fait. Depuis j’ai conservé cette habitude même si ce n’est pas tous les jours.
Suit la deuxième proposition qui s’inscrit plus difficilement. Il s’agit de prendre une heure, au moins, toutes les semaines pour promener ce fameux "enfant artiste", comme un rendez-vous avec soi-même pour se libérer et ouvrir son regard. En réalité, c’est vachement dur. Trouver quelque chose pour soi sans éprouver de culpabilité à traîner au cinéma, au musée, dans une librairie, se balader dans la rue, seule, et sans justification autre que se faire plaisir. En toute vérité, je n’y arrive que maintenant, soit deux ans après. Sans compter certaines suggestions difficiles à suivre, genre s’interdire de lire, y compris les journaux, pendant une semaine. Moi qui suis une accro à la lecture…Ou encore cueillir des fleurs au coeur de l’hiver.
Bref, trois mois après, la ligne d’arrivée était atteinte. J’avais consciencieusement noirci deux cahiers, que je n’ai relu que récemment. J’avais exprimé toute ma colère, ma frustration, mes angoisses mais j’avais aussi écrit beaucoup d’autres choses et notamment autour de l’argent. Si, si, c’est vrai, je vous jure.
Et un déclic s’est produit. Une idée a germé, enfin.
Je vous raconterai la suite dans un prochain numéro.
A bientôt, donc !