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La location solidaire, une action rentable

Publié le 09 octobre 2015 par Blanchemanche
#locationsolidaire
LE MONDE ARGENT | 09.10.2015  | Par Jérôme Porier


La location solidaire, une action rentableLes dispositifs de location solidaire ne sont pas assez connus. Solibail, le plus répandu, existe dans neuf régions où les marchés immobiliers présentent des tensions. A Paris, son nom est « Louer solidaire ». David.Monniaux/Wikimédia


Les associations spécialisées dans le mal-logement le disent  : les dispositifs de location solidaire ne sont pas assez connus. « En 2014, ils nous ont permis de mobiliser 400 nouveaux logements pour des personnes en ­situation d’exclusion, un chiffre en recul de 18,3 % sur un an », dit Sylvie Eschalier, responsable de la mobilisation de logements dans le parc privé chez Habitat et humanisme. Les besoins sont pourtant énormes : le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD) estime qu’il faudrait créer 120 000 logements ­sociaux dans le parc privé en trois ans.
Les dispositifs de location solidaire constituent une partie de la solution. Solibail, le plus répandu, existe dans neuf régions où les marchés immobiliers présentent des tensions. Un mécanisme dont les modalités varient dans chaque ville car certaines localités peuvent y ajouter des subventions.
A Paris, son nom est « Louer solidaire ». Actuellement, ce dispositif permet de loger 2 900 per­sonnes dans 902 habitations de la capitale. « Ce sont des familles logées à l’hôtel, souvent monoparentales, et qui ont un emploi, précise Ian Brossat, adjoint à la Mairie de Paris chargé du logement. Notre objectif est de doubler le nombre de ces ­logements d’ici à 2020, en élargissant le dispositif à des populations plus précaires. »
Comment fonctionne-t-il ? Le propriétaire d’un logement loue à un tarif dit « intermédiaire » à une association, en respectant des plafonds qui varient selon les régions et la surface du logement.
« La plupart des propriétaires choisissent de s’engager sur six ans pour obtenirl’abattement maximal »
Denis Laurent, délégué général de SNL

Ils sont calculés grâce à la formule suivante : loyer intermédiaire (par mètre carré) = loyer de base x (0,7 + 19/surface en m²). Avec une petite subtilité : pour les appartements de moins de 38 m2, le coefficient multiplicateur est limité à 1,2. A chaque degré de tension du marché correspond un loyer de base qui sert donc de référence. Pour 2015, il a été fixé à 16,82 euros en zone A bis (Paris et 29 communes de la petite couronne), 12,49 euros en zone A (Lyon, Lille…), 10,06 euros en zone B1 (Annecy, Bayonne, Chambéry, Saint-Malo, La Rochelle…) et 8,74 euros en zone B2 (autres communes de plus de 50 000 habitants). Pour savoir dans quelle zone est classée une ville, il suffit de se rendre sur le site du ministère du logement.
Le propriétaire qui accepte de confier son logement à une association obtient plusieurs avantages. D’abord, les loyers perçus sont largement défiscalisés. Selon la durée du bail (trois ou six ans), l’abattement est de 30 % ou de 70 %. « La plupart des propriétaires choisissent de s’engager sur six ans pour obtenir l’abattement maximal », précise Denis Laurent, délégué général de Solidarités nouvelles pour le logement (SNL). Agréée par l’Etat, l’association s’occupe de tout, encaisse les loyers, paie les charges, assure le suivi du locataire… « Le propriétaire évite les périodes de vacance ; il est certain de toucher ses loyers et de retrouver son bien en parfait état à l’issue du bail », précise Mme Eschalier.
Le prix de la tranquillité et de la bonne conscience
Plus le propriétaire est dans une tranche d’imposition élevée, plus l’opération est rentable. Par exemple, si vous louez un T2 de 50 m2 à Paris (zone A bis), le plafond sera de 18,17 euros par mètre carré. Ce qui correspond à un loyer mensuel de 908,30 euros, contre 1 240 euros dans le secteur libre (le loyer moyen dans la capitale est estimé à 24,80 euros le m2 par l’observatoire Clameur).
Au final, le bailleur solidaire, si sa tranche marginale d’impôt sur le revenu est à 30 %, et compte tenu de l’abattement de 70 %, obtiendra un revenu après impôt de 9 918,40 euros par an, contre 10 416 euros pour le bailleur « classique », soit un manque à gagner de seulement 4,8 %. En revanche, s’il est imposé à 14 %, l’écart monte à 18,4 % sur Paris : l’opération est beaucoup moins intéressante.
Dans les villes où le marché est moins tendu et où il y a peu d’écart entre le plafond et les loyers libres, l’opération est, en théorie, beaucoup plus avantageuse. A Lyon, par exemple, le plafond autorisé par le dispositif est de 13,50 euros par mètre carré pour le même bien, alors que le loyer moyen est de 12,60 euros selon Clameur. Mais, dans la pratique, les associations acceptent un logement uniquement si le bien est loué à un tarif inférieur d’au moins 20 % au prix du marché. Malgré tout, dans cet exemple lyonnais, et à condition de s’engager sur six ans, le bailleur solidaire imposé à 30 % peut obtenir une rentabilité supérieure de 10 % à celle d’une location classique. S’il est imposé à 14 %, le manque à gagner se limite à seulement 4,6 %. Le prix de la tranquillité et de la bonne conscience, en quelque sorte.

Jérôme Porier
Journaliste au Monde

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