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Réflexions sur l’autocensure, le féminisme, le sexe et la carrière pro.

Publié le 13 octobre 2015 par Maybachcarter

Comment dire…

J’ai passé plus d’une dizaine d’années en France, en tant qu’africaine vivant en région parisienne, en tant que jeune fille noire en France, en tant qu’ado-résidant-hors-Paris-intramuros et tout un tas d’autres catégories auxquelles j’appartenais de manière simultanée. Mais c’est en quittant la France, d’abord temporairement puis définitivement, que je me rendrai compte que ma perception ou du moins, la manière dont je suis socialement perçue est très volatile. Tout d’abord, à New York. Comme beaucoup de gens nés dans les années 90, les Etats-Unis et plus particulièrement les afro-américains représentaient tout ce à quoi un jeune peut aspirer.. des codes de beauté à l’ascension sociale spectaculaire en passant par les expressions ou les looks, l’afro-américain a été un marqueur important pour moi en grandissant, le nier serait mentir. Notamment quand on voit mon attachement à la culture Hip Hop, qui est fortement expliquée par cette influence américaine justement. De ce fait, vivre à New York pour moi représentait – au début de mon adolescence – la quintessence de la réussite perso, le but (entre autres) à atteindre. J’ai fini par aller y travailler en 2011, j’en ai parlé en détails ici donc pas la peine de m’étendre dessus. L’on aurait pu croire qu’en croisant les « sistas » afro-américaines dans la rue, j’allais pousser des « AH ! » remplis d’envie et convoitise.. mais c’est le contraire qui s’est produit. On sait déjà depuis un moment que les « filles des clips américains » (aujourd’hui on dirait les « filles d’Instagram ») ne sont pas réelles/naturelles/représentatives du genre féminin moyen dans les grands centres urbains des Etats-Unis, mais n’empêche. Je n’étais pas impressionnée. Pire, j’avais par moment l’impression d’être une bourge suédoise qu’on a lâché en plein milieu d’un ghetto mal famé. J’avais la sensation d’être peut-être trop « raffinée », trop exigeante, trop « intello »..bref, d’être finalement trop dans le cliché de la « frenchie », et si je zoome sur l’élément, je dirai même trop « parisienne ». Mais pour que je me rende compte de cela, il fallait que je sorte de Paris et que je sois confrontée aux réalités de la culture populaire américaine de manière quotidienne. L’effet de contraste. Entre temps, je suis rentrée en France, et je suis retombée dans les multiples cellules sociales auxquelles j’étais censée appartenir.

Et puis, voilà. Je suis partie donc d’Europe pour faire un retour en Afrique. Pour corser les choses, je ne suis pas rentrée dans mon pays d’origine. Et pour encore plus corser les choses, je suis venue seule, sans mari ni enfant. Et depuis que je suis là, je réalise progressivement que ce n’est plus ma pluri-identité qui est au centre, mais mon étiquette de « Jeune Femme Africaine Moderne » que j’ai aussi endossé à mon arrivée, en plus d’être dans la case « Expat », « Returnee », « Afropéenne », « Afroparisienne », j’en passe et des meilleures.

« Jeune Femme Africaine Moderne« , donc. 4 mots, 1000 définitions. J’ai l’impression que d’un commun accord, on s’est arrêté sur une espèce de compromis disant qu’une JFAM est une jeune femme instruite qui est au diapason des tendances occidentales sans oublier/renier (rayez la mention inutile) ses « racines » africaines. Là encore, à quoi correspondent ces racines africaines dont tout le monde semble chanter les louanges ? Très souvent, les dites racines sont en fait des valeurs. Des choses que l’on considère comme sacrées, parfois même des dogmes. A force d’écouter et d’observer, je réalise que l’expression « racines africaines » ou « éducation à l’africaine » tournent très souvent autour de la même chose. Et comme des poupées russes, à l’intérieur de ces valeurs, on trouve très souvent 2 choses: le respect et la respectabilité. Pour le premier, le respect des aînés, des parents, du chef… bref, la hiérarchie s’apprend et s’inculque à partir du noyau familial pour en principe, être appliqué plus tard à la vie sociale et professionnelle. Pour la respectabilité, en somme, on « nous » (les prétendues JFAM) enseigne à quel point être RESPECTABLE, c’est essentiel, c’est important, ça conditionne notre accès au bonheur…notamment conjugal, forcément. Dans un cas comme dans l’autre, je n’ai bien sûr rien contre le fait d’enseigner cela à des petites filles. En théorie. Sauf que comme disait l’autre, la Théorie c’est le seul endroit au monde où tout se passe toujours comme prévu. Dans les faits, ce devoir de respectabilité entraîne des dérives et une « désappropriation » de soi chez beaucoup de femmes, qu’elles se l’avouent ou non, qu’elles en soient mêmes conscientes ou non. Cela fait qu’on a rendu normales et légitimes des pratiques interventionnistes sur le corps et la vie des femmes, parce que, voyez-vous « c’est pour leur propre bien ». On dira que je fais une comparaison hasardeuse, mais ça m’évoque la colonisation qui était justifiée par le côté « mission salvatrice » et « élévation des nègres du rang d’animaux au rang d’êtres civilisés ». En gros, ‘ »ON » a décidé que pour être acceptable, TU dois être/faire çi et ça de telle manière. Et « ON » s’en fout de ton avis au fait, au cas où tu ne l’avais pas remarqué.

Le combat féministe, en toute franchise, ça ne suscitait pas grand chose chez moi. D’abord parce que j’ai été un garçon manqué pendant un bon moment et je ne sais pas si c’est pour cela, mais je n’avais jamais l’impression de ne pas pouvoir faire ou dire quoi que ce soit à cause de mon genre. Pour rester dans le cliché, j’avais une vingtaine de poupées Barbie mais ça ne m’empêchait pas de jouer aux jeux-vidéos, de me castagner avec des garçons à l’école ou d’avoir une fascination pour les bolides. Ca c’était l’enfance. Les choses bien sûr ont commencé à se gâter à l’adolescence, où très rapidement les notions de féminité symbolisées par des trucs aussi futiles que le makeup ou les talons hauts ont commencé à me stresser. On ne naît pas femme, on le devient. Subitement, moi qui ne m’en étais jamais vraiment inquiétée, je comprends qu’une femme, ça doit plaire. C’est son rôle, son but ultime, sa définition prioritaire et sa principale voie d’accès au bonheur. Alors comment on fait quand pour plaire quand on se sent aux antipodes des codes ? Bah, on se force à rentrer dans le moule, sans trop réfléchir. Parce que c’est ce qu’il faut faire. Je ne vais pas analyser toute ma crise de genre de 13 ans à 18-19 ans par là, mais disons que certaines choses qui me sont arrivées m’ont progressivement poussée à faire 3 pas en arrière et me demander si me forcer était vraiment la bonne solution. Il n’y a pas de hasard… que je décide de revoir certaines choses sous un autre angle correspondait aussi à une prise de confiance en soi et une affirmation de personnalité qui généralement survient quand on finit avec l’adolescence et qu’on entre dans la vie adulte. Je l’ai dit souvent ces derniers temps pour rigoler, mais j’ai l’impression d’avoir la quarantaine ces derniers temps. De savoir ce que je veux ou non, ce que je tolère ou non, et de me sentir suffisamment à l’aise pour remettre les gens à leur place s’ils empiètent sur un territoire me concernant sans que je ne leur en ai donné l’autorisation. Cela explique donc entre autres pourquoi ces derniers mois, je durcis le ton concernant le droit des femmes de dire non, de ne pas nécessairement vouloir fonder une famille dans l’immédiat, en somme, d’être égoïste sans qu’on ne les regarde comme des êtres indignes de pouvoir donner la vie et ne pas vouloir le faire. Ou du moins, ne pas le faire dans les temps qu’ « on » leur impose.

A la question de savoir qui est « ON », j’ai envie de dire que c’est personne et tout le monde, en même temps. Ca fait un an que de manière répétée, je me vois interrogée sur quand je vais enfin procréer, pourquoi je ne veux pas « adoucir » ma personnalité en vue d’être Madame Un Tel, qu’on me répète quasi quotidiennement « Tu sais, on peut avoir une carrière et fonder une famille » comme si j’avais un jour dit que c’était infaisable… En fait, ça n’effleure personne que j’ai ma propre feuille de route et que mon utérus m’appartient d’abord, et par définition, que j’en fais en principe ce que j’en veux… quand je le décide. Si au début, j’ai souvent balayé ces réflexions d’un revers de la main avec des réponses courtes et sarcastiques, la répétition a fini par gratter la surface.. et par ricochet, ça a fini par me rendre agressive ou du moins, sur la défensive. Je n’aime pas qu’on tente de m’imposer des choses, non pas par défiance, mais parce que c’est ma personnalité, ceux qui me connaissent le savent.

Il y a quelques mois, j’allais assouvir mes envies gourmandes chez Des Gâteaux et Du Pain, qui est une des principales (et VERITABLES) pâtisseries d’Abidjan. En sortant de là, les mains pleines de cartons de cakes et autres tartes, je fais signe à un taxi. Le chauffeur s’arrête, je monte, lui donne ma destination et puis on démarre. Alors que j’étais en train de rêver du moment où j’allais m’asseoir sur mon canapé à dévorer mes sucreries devant je ne sais plus quel vieux film de Francis Coppola (chacun ses plaisirs solitaires), le chauffeur commence à me parler. Il me fait un compliment, et poliment, je le remercie. Bien décidé à poursuivre la conversation, il me demande si j’ai des enfants. J’ai trouvé ça un peu intrusif mais une fois de plus, je réponds poliment que non. Là tout de suite, il se gare sur le côté et se retourne vers moi, avec l’air grave: « Mais tu n’as pas d’enfants ? Tu attends quoi ? Si tu ne les as pas maintenant, qui sait si Dieu va te donner la chance quand tu voudras ? ».J’étais tellement incrédule qu’aucun mot n’arrivait à sortir de ma bouche. Il a fini par redémarrer son véhicule et face à mon silence, il m’a fait tout un sermon sur la nécéssité pour moi de faire des enfants « vite » parce que ça m’apporterait plus d’épanouissement, jusqu’à ce qu’il me dépose devant chez moi. Une autre fois, à un dîner, alors qu’un ami racontait mon parcours pour expliquer ma venue à Abidjan, un jeune homme que je ne connais pas s’est permis de glisser: « Avec un tel CV, j’espère qu’elle sait faire à manger quand même« . Ca ne m’a pas fait rire, boutade ou pas. Je considère que je bosse assez dur pour qu’on limite ma personne, mes compétences, mes ambitions à la cuisson de mon rôti de veau. Donc oui, par la force des choses, je suis devenue autiste sur ces sujets. Etre en permanence ramenée à son genre quand quotidiennement on veut pouvoir s’en détacher, c’est agaçant, c’est chiant, c’est injuste. Devoir expliquer ses choix de vie à des gens à qui on ne doit AUCUNE explication en principe, ça bouffe ma patience. Avoir à ne pas baisser la tête parce qu’on juge votre féminité à des broutilles qui n’ont aucune pertinence vu notre époque actuelle, c’est pénible à force. Quand j’entends « Une vraie femme doit… » j’ai envie de dire, « Fermez-là » et surtout « FOUTEZ-MOI/NOUS LA PAIX, bordel« .

Stop telling us how to be women..

— The Pimped Butterfly (@PhiweMandondo) August 26, 2015

L’apprentissage de la vie est déjà en soi bien compliqué, mais si en plus on doit en permanence ne pas agir comme on le souhaiterait mais comme notre genre sexuel tel que vu par la société souhaiterait que l’on agisse, on n’est pas sorti de l’auberge. Et finalement, je réalise que comme il a fallu que je vive à NY pour réaliser qu’il y avait une part de frenchie en moi, il a fallu que je sois ici pour que mon pendant féministe prenne forme. Est-ce qu’il était là avant et attendait d’éclore ou est-ce que ma sensation d’être parfois « agressée » sur certaines questions a fait naître la chose ? Je n’en ai aucune idée. Toujours est-il qu’une personne dotée d’un phallus ou pas n’est aucunement en position de me dire ce que je dois faire de ma vie, de mes croyances, de ma carrière, de mon corps (et avec qui)…sur la base de ce qu’il/elle fait de sa vie, de ses croyances, de sa carrière etc. Je veux avoir la liberté de ne pas être une fée du logis sans avoir à raser les murs à cause de ça, jusqu’à preuve du contraire, les chromosomes femelles ne sont pas en forme de casseroles de couscous sauce gombo pour qu’on réduise l’essence de ma personne à cela. Je veux être jugée en tant que personne, en tant qu’être humain, en tant que femme d’une origine ou d’une catégorie sociale X à la limite. Mais pas en permanence ramenée à ma « condition féminine » et le carnet de notes qui va avec pour savoir à quel point je respecte et fais honneur à mon groupe d’appartenance. C’est quasiment impossible ce que je demande, mais ça ne m’empêche pas d’obliger ceux et celles qui interagissent avec moi de changer leur langage et leur approche.

Je ne sais pas si l’on a tous conscience de l’effet domino que conditionner les femmes au devoir permanent de respectabilité provoque, des complexes que ça crée…et même de l’autocensure que ça engendre…que ce soit dans le cadre professionnel ou privé. Je vais exceptionnellement sortir de ma réserve (publique) sur le sujet, mais combien de fois ai-je eu à refuser des « One Night Stand » alors que:

1- j’étais intéressée

et

2 – je n’étais pas en couple

Combien de fois parce que « non, une fille ça ne fait pas ça« , « il va me prendre pour une fille facile » et autres. J’ai moi-même au début eu la mauvaise habitude – et je m’en excuse – de juger des filles sur leur vie sexuelle très active, sans me rendre compte qu’en faisant cela, je mettais moi-même une limite à la mienne. J’ai dû vraiment faire un travail sur moi (encore en cours) pour apprendre à m’écouter d’abord et être en accord avec moi-même avant de me focaliser sur ce qu’il serait « acceptable » ou non que je fasse. Et ça, c’est un exemple parmi tant d’autres d’opportunités et de choses sympas que j’ai laissé filer parce que je ne devais pas déborder d’un certain cadre. Autant le dire, depuis que j’ose plus, je vais plus vite, et plus loin. Même si j’ai  littéralement l’impression de m’arracher un muscle à chaque fois, j’apprends à ne plus être en situation d’attente face à un homme qui m’intéresse. Bien sûr, je ne drague pas, je ne le ferai probablement jamais de ma vie, mais j’arrête les envois de signaux à la con (qui sont souvent unilatéraux et jamais captés par la personne concernée). Je me suis même surprise à inviter un ravissant bellâtre à dîner, chose que je n’aurais JAMAIS imaginé faire y a 2 ou 3 ans encore car persuadée qu’une fille, ça se fait belle et ça attend qu’un courtisan se manifeste. Encore plus récemment, j’ai pris sur moi de manifester mon intérêt à quelqu’un, mais c’était limite plus pour ne plus avoir à faire semblant et pouvoir passer à autre chose que de continuer à cultiver un truc qui allait finir par me ronger de l’intérieur à force de me demander si je tente le coup ou pas. Peu importe la suite, j’ai fait le pas et je suis plutôt contente d’avoir réussi à le faire. Je m’arrête à ça. Donc en gros voilà, j’essaie de manière pragmatique de sortir de ce qu’on impose à mon genre dans le privé mais aussi en termes de carrière professionnelle.

A ce sujet d’ailleurs, comme certain(e)s le savent déjà, j’ai un nouveau job (à vrai dire, je cumule 2 jobs en un). Niveau épanouissement pro, je nage comme un poisson dans l’océan, j’ai quasiment tous  mes centres d’intérêts réunis au même endroit et même si le volume de travail qui m’attend pour 2016 a l’air dingue, je suis impatiente. Peut-être parce que pour une fois, je ne vais pas me contenter d’imaginer des choses et les noter quelque part sur mon ordi, mais parce qu’on va (en principe) me donner les outils pour les concrétiser. Et bien sûr, au passage, c’est très gratifiant pour moi d’avoir ce job sur mesure sans piston, sans même l’avoir cherché, et uniquement sur la base de mon expérience.. qui plus est dans un pays qui n’est pas le mien. L’autre point gratifiant est aussi de travailler au service de la vision d’une personne dont je respecte le parcours (mais j’en ai déjà parlé en détails sur Instagram ici).

Sur le job en lui-même, je ne suis pas très dépaysée par rapport à mon activité chez Fashizblack, c’est même à quelques égards plus simple parce que j’ai plus de moyens à ma disposition (et notamment un service commercial rôdé, ça vous change la vie, ça). Pour ce qui est de ma mission, qui est en gros d’être une sorte de  Super Chef de Produit de Marque Média (puissance 1000) et de revamper l’existant tout en apportant une nouvelle vision plus moderne, c’est aussi dans mes cordes. Finalement, ce n’est pas tant sur le métier en soi que je sens que je vais devoir me mettre au pas très rapidement, mais sur le management d’équipe.

Jusqu’ici, j’ai eu à gérer mes propres projets, avec des gens que j’avais choisi parfois bien, parfois mal. Dans un cas comme dans l’autre, je savais à peu près quelle ligne tenir. Or, je me retrouve à devoir gérer une équipe mise en place par mon prédécesseur à un poste qui n’avait pas été occupé pendant un an, faute de personne suffisamment qualifiée pour impulser une nouvelle dynamique (d’après ce que l’on m’a dit)…. du moins, jusqu’à ce que j’arrive. Les challenges  auxquels je fais donc face ne sont pas tellement sur ce qu’il faut faire, mais comment et avec qui. Je ne vais pas apprendre à être rédac’chef, i already figured that out a while ago, mais apprendre à diriger dans un cadre hyper normé (du moins plus normé que ceux dans lesquels j’ai évolué jusqu’ici). C’est un défi en soi dans une configuration loin d’être anodine.. en plus d’être performante dans mon travail et d’imposer ma marque de fabrique, je dois trouver mon propre style de management. Du moins, je commence à le trouver mais il n’est pas encore aussi affirmé qu’il le devrait (et en même temps, je viens d’arriver et doit gérer plusieurs urgences en même temps).

Lecture d'un article issu d'un des derniers numéros du Harvard Business Review.

Lecture d’un article issu d’un des derniers numéros du Harvard Business Review.

J’aurais pu être terrorisée. De me dire qu’après tout, je suis une jeunette qui a sous sa responsabilité des personnes qui ont l’âge de son père. Mais je ne le suis pas, ou du moins, j’approche le challenge autrement: si des gens bien plus expérimentés que moi ont choisi de me faire confiance et de me donner quasiment carte blanche, c’est qu’ils ont probablement vu ce que je ne vois peut-être pas encore en moi en termes de leadership. Entre la carotte et le bâton, être aimée ou être crainte, j’entrevois une solution à mi-chemin. Plusieurs fois,on m’a répété « You need to OWN the space« , parce que j’étais encore dans le doute quant au comportement à avoir… D’une part, parce que je viens d’une startup que j’ai monté avec des associés dans le même domaine que mon poste actuel et que tout ce que je parviens à faire aisément aujourd’hui, je ne pouvais pas le faire dans ma propre boîte, faute de moyens. Du coup, parfois, je m’autocensure involontairement. Je réfléchis en mode StartUp alors que je suis dans une des plus grosses structures de communication de la sous-région, je pense comme un média en phase de pré-développement alors que je gère des marques qui sont leaders dans leur sillon…des fois, je n’ose même pas demander des choses auxquelles mon poste me donne accès. Pas par peur ou par fausse modestie, mais parce que j’ai l’impression que tout doit tourner autour du magazine et de sa production et que TOUT le reste est vraiment non-nécessaire/accessoire…ce que je faisais chez Fashizblack. Je crois que je fais une forme de transfert de mon propre mag à celui d’autrui (lol), ce qui devait, je présume, arriver de toute manière. Je dois encore m’habituer à la possibilité de pouvoir me lever tous les matins, aller faire un truc qui me booste, pouvoir être décisionnaire et… CREER, sans être entravée par les éternelles restrictions budgétaires même pour prendre un café, qui ont commencé à lentement tuer ma passion à petits feux. En gros, j’ai la responsabilité de la partie créative et business sans perdre le sommeil la nuit parce que je dois aussi gérer la survie du projet (puisqu’il ne m’appartient pas cette fois). Cela me fait des vacances, ma foi. Ceci dit… Je dois donc inventer ma manière de travailler en évitant certains écueils.. Par exemple, je ne veux pas incarner la rédac’chef hystérique, capricieuse et caractérielle.. mon prédécesseur étant un homme, je ne veux pas non plus que le fait que son poste ait été confié à une femme soit perçu comme une rétrogradation… Qui plus est, j’ai une équipe exclusivement masculine à gérer. Cela me ramène donc à cette sensation d’autocensure liée au genre dont j’ai parlé plus haut. Je reconnais que j’ai encore des hésitations sur l’attitude à adopter vu mes nouvelles responsabilités hiérarchiques, je n’ai pas de problèmes à dire que je me cherche encore un peu là-dessus, mais jamais je ne laisserai le fait d’être une femme entraver mon envie de faire les choses, de dire ce que je pense ou d’attendre des résultats conformes de la part de mon collaborateur X ou Y. C’est cette indifférence au genre dans le travail qui m’a menée jusqu’ici, il n’y a pas de raison que je me « masculinise » ou que je me « fémininise » à outrance pour aller encore plus haut. Et je ne laisserai personne me voler cette liberté là.


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