L'année 2014 a marqué un tournant en matière de réduction des émissions de carbone dans les économies du G20. C'est ce que révèle le cabinet d'audit et de conseil PwC dans la septième édition de son étude annuelle " Low carbon Economy index ", qui modélise l'intensité carbone des grandes économies - à savoir les émissions des gaz à effet de serre liées à la consommation d'énergie par million de dollars de PIB. En effet, l'intensité carbone a chuté de 2,7% en 2014, soit sa plus forte baisse depuis 2000. La France fait office d'exemple : elle a réduit son intensité carbone de plus de 9% en 2014, ce qui représente la 2ème plus forte réduction des pays du G20, juste derrière le Royaume-Uni (- 10,9%).
Intégrer les coûts dans les décisions stratégiquesMais l'étude souligne aussi que, malgré les objectifs ambitieux de réduction des émissions de carbone dans les différents pays du G20, les entreprises doivent intégrer les coûts du carbone et la réglementation carbone dans leurs décisions. Les secteurs de l'énergie, des transports et de la finance sont, à cet égard, les premiers concernés. PwC révèle que l'intensité carbone des économies du G20 a chuté de 2,7% en 2014, une diminution sans précédent depuis la première publication de l'étude il y a sept ans.
Ainsi, l'économie mondiale a connu une croissance de 3,2% en 2014 moyennant une augmentation de seulement 0,5% des émissions de gaz à effet de serre liées à la production d'énergie. À moins de deux mois de la COP21, qui réunira à Paris les chefs d'État et de gouvernement, cette étude dévoile des signes positifs de " découplage ". Or, le " découplage " - la suppression du lien entre les émissions de carbone et la croissance économique, est essentiel pour éviter les pires effets du changement climatique.
De nombreux pays ont réduit leur intensité carboneC'est la première année où plusieurs pays enregistrent un taux de décarbonisation au moins égal à 6,3% - taux requis au niveau mondial pour limiter à 2°C le réchauffement climatique. Le Royaume-Uni arrive en tête avec un taux remarquable de 10,9%, qui s'explique par une économie solide, une baisse de la consommation de carbone et un hiver plus doux. Il est talonné par la France (9,1%), dont la réduction des émissions de carbone est en fait légèrement supérieure, mais dont la croissance du PIB est plus faible. L'Italie et l'Allemagne enregistrent aussi des taux de décarbonisation très élevés, à respectivement 7,8% et 7,1%. La première voit ses émissions chuter rapidement, mais son économie se contracter légèrement. En Allemagne, en revanche, la réduction relativement rapide des émissions s'accompagne d'une croissance économique de 1,6%.
La Chine, plus gros émetteur de CO2 au monde, apparaît comme le pays le plus performant hors UE, avec un taux de décarbonisation de 6%. L'Australie perd sa première place, mais affiche encore un taux de décarbonisation de 4,7%. L'intensité carbone a cependant augmenté dans cinq pays : l'Afrique du Sud, l'Inde, le Brésil, l'Arabie saoudite et la Turquie. Sylvain Lambert, associé en charge du Développement durable et du Changement climatique chez PwC, commente : " Ces résultats témoignent d'un début de découplage entre la croissance et les émissions de carbone. La tendance en Chine montre que les choses évoluent et que les énergies renouvelables sont en progression. Mais il reste encore du chemin à parcourir et les engagements pris à l'approche du sommet de Paris ne sont pas suffisants. Nous franchirons véritablement un tournant lorsque les énergies renouvelables seront à parité de coût avec les énergies fossiles. "
Des progrès pas suffisantsPourtant, les économies du G20 sont encore loin d'atteindre le taux de décarbonistation nécessaire pour limiter à 2°C le réchauffement climatique. Malgré les progrès réalisés dans certains pays, l'étude révèle que, globalement pour la 7ème année consécutive, l'objectif cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre par unité de PIB n'est toujours pas atteint. Une décarbonisation rapide et durable, d'environ 6,3% par an, est pourtant nécessaire, à l'échelle mondiale, pour limiter à 2°C la hausse moyenne des températures sur la planète. À l'approche de la COP21, les États ont soumis des objectifs et des plans de réduction des émissions.
Connus sous le nom de INDC (contributions prévues déterminées au niveau national, ou " Intended Nationally Determined Contributions " en anglais), ces objectifs impliquent un taux moyen de décarbonisation de 3% au niveau mondial - soit plus du double de celui généralement constaté depuis 2000. Ces objectifs fixés à l'échelle nationale devraient inciter les secteurs de l'énergie, des transports et de la finance à prendre des mesures. Bon nombre de pays ont placé la réglementation sur le charbon au centre de leurs plans et défini des objectifs pour les énergies renouvelables et les véhicules à faibles émissions. Une réorientation en profondeur des investissements sera nécessaire pour atteindre de tels objectifs et développer les technologies du charbon propre, comme la capture et le stockage du charbon.
Pour cela, le secteur de la finance devra mobiliser les investisseurs et concevoir de nouveaux produits afin de financer et d'assurer de tels projets. De même, dans le secteur automobile, l'État pourrait soutenir le développement des véhicules de prochaine génération à zéro ou faibles émissions dans les pays comme le Japon ou la Corée du Sud, ou imposer des objectifs de rendement énergétique plus stricts dans d'autres.
Les entreprises doivent être plus impliquéesOlivier Muller, directeur au sein du département Développement durable de PwC, explique : " L'implication des chefs d'entreprise dans les débats en amont de la COP21 est mitigée, mais s'il est un point sur lequel ils doivent centrer leur attention, c'est bien les INDC proposés par les différents pays à l'approche de la conférence de Paris. Les objectifs proposés dans ces plans auront un impact important sur les réglementations nationales, les investissements et la politique industrielle. Une forte attention est portée sur les objectifs, mais très peu sur la réalisation des investissements nécessaires pour les atteindre. "
Quoique reconnus dans le rapport comme un pas positif vers la décarbonisation, les objectifs de la COP21, s'ils sont atteints, ne feront que stabiliser à 3°C le réchauffement climatique d'ici à la fin du siècle. Olivier Muller ajoute : " M ême s'ils impliquent un changement décisif, les objectifs proposés pour la COP21 ne sont pas suffisants pour limiter le réchauffement à 2°C. C'est pourquoi l'accord qui sera conclu à Paris devra prévoir des mesures pour évaluer les progrès réalisés au niveau national et permettre ultérieurement de relever les ambitions. "
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