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Le(s) problème(s) avec les filles qui font « le premier pas ».

Publié le 16 octobre 2015 par Maybachcarter

Y a quelques semaines, je déjeunais avec une copine ivoirienne qui est rentrée s’installer à Abidjan y a pas longtemps. En rigolant, je lui demande « Mais où est-ce qu’on rencontre des mecs sympas dans cette ville à la fin ? » Elle m’a répondu du tac au tac: « Ah ma chère, le championnat à Babi est difficile« . Je suppose que je n’ai pas besoin de traduire.

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Le fait est qu’elle, comme moi et beaucoup d’autres sommes des jeunes femmes récemment (ou non) revenues sur le marché du célibat, mais très investies dans leurs boulots respectifs et qui ont donc peu ou moins de temps qu’il n’en faut pour faire des rencontres. Ou du moins, des rencontres qui n’ont rien à voir avec le travail. Or, on passe énormément de temps à bosser ou à sortir avec des gens plus ou moins dans le même cercle, ce qui réduit bien évidemment les chances. Finalement, je remarque que comme à Douala, à Abidjan les jeunes actifs sont souvent issus des mêmes écoles ou de la même entreprise. Résultat: tout le monde connaît tout le monde, est plus ou moins sorti avec tout le monde et les options sont assez réduites. A chaque occasion que j’ai donc eu d’échanger avec des jeunes hommes ici, je leur ai posé la question de savoir comment ils réagiraient si une femme les approchait.  A chaque fois que le sujet est évoqué - et encore pas plus tard qu’hier soir à un dîner – les hommes disent toujours qu’ils n’attendent que ça, une femme « entreprenante », et qu’un homme ne dira jamais non à une femme qui leur fait une proposition. Et encore une fois, il y a comme un énorme décalage entre la théorie et la réalité, je m’explique.

Bien que je lui reconnaisse une certaine « modernité » dans certains domaines, la société ivoirienne m’a l’air tout de même profondément phallocratique et les « traditions » résistent bien, SURTOUT dans les rapports Hommes – Femmes. J’ai l’impression que l’on donne une forme de « permission » aux femmes de sortir de la norme mais il arrive toujours un moment où le couperet tombe et on leur fait comprendre qu’il faut s’en tenir à l’ordre établi. Sur ce sujet en particulier, la structure familiale avec le chef en père de famille et la femme qui – bien qu’éduquée et active – doit rester « soumise » à son mari est encore d’actualité. Tout cela a donc forcément une incidence sur la manière dont l’amour et le sexe sont codifiés, même quand on n’est pas marié. C’est encore plus marrant à observer dans la tranche d’âge 25 – 35 ans, où toute relation amoureuse semble être une forme de « période d’essai » devant déboucher sur une demande en fiançailles (si la période d’essai semble concluante). Ce n’est pas un hasard si le titre « Diplôme » de la chanteuse ivoirienne Josey marche autant en ce moment, il traite de ce sujet. L’homme est quasiment en situation de contrôle absolu sur le devenir d’une relation et pour cause, c’est généralement LUI qui décide quand ça commence, et comment ça évolue (si ça évolue, d’ailleurs).

(Lyrics Video de « Diplôme » par Josey)

Du coup, il suffit que les rôles soient inversés pour que ça devienne le flou artistique, en tout cas du côté des hommes. Sur le papier, une femme qui fait le premier pas, ça a l’air « sexy », m’a-t-on dit. Cela donne l’impression qu’elle sait ce qu’elle veut, qu’elle est « forte » et autant le dire, j’ai l’impression que beaucoup interprètent cela comme un signe que la dite femme est forcément une tigresse au lit.  Mais une fois qu’on insiste un peu, très rapidement le langage sur le sujet change. Une fille qui fait le premier pas, c’est « bizarre », ça effraie, c’est bien trop suspect. Les trois hypothèses qui me sont revenues le plus souvent aux oreilles sont:

  1. si elle fait le premier pas, c’est forcément parce qu’elle veut autre chose qu’une relation ou un coup d’un soir, donc forcément, sa démarche vise l’obtention d’argent, de statut social, d’informations spécifiques…bref, c’est un piège
  1. si elle fait le premier pas, ça veut dire qu’aucun homme ne l’approche, ce qui signifie qu’elle est (au choix) trop difficile à vivre/trop moche/trop en « jachère » (ou « coagulée ») comme on dit.. et partant du principe qu’une femme ne peut pas être en déficit de sexe (dans la logique masculine, il y a TOUJOURS un moyen pour une femme de trouver un partenaire sexuel), cela signifie qu’une femme qui approche un homme de manière claire est forcément quelqu’un de bizarre dont il faut s’éloigner, et vite
  1. si elle fait le premier pas, ça veut dire qu’elle est très à l’aise avec sa sexualité, voire même trop. C’est sûrement une nymphomane/croqueuse d’hommes, bref quelqu’un de « sale », pas présentable/respectable

Back to square one, donc. Les hommes veulent bien que les femmes osent, mais quand elles le font, c’est la levée de bouclier en face. Je crois que l’autre souci, c’est aussi que cette inversion des rôles met les hommes dans une posture qu’ils jugent peut-être humiliante: celle de la proie. En gros, être courtisé pour un homme, c’est flatteur… tant qu’il reste quand même aux manettes, faut pas déconner non plus :D.

Que faire donc quand on est une femme dans tout ce méli-mélo, que l’on n’a pas nécessairement envie d’attendre que « ça se passe » mais qu’on ne veut pas non plus que sa démarche soit comprise selon une des 3 hypothèses formulées plus haut ? Je ne vous le fais pas dire, c’est un vrai casse-tête..encore plus quand les hommes auxquels ont fait face ont reçu une éducation traditionnelle très stricte que des années de vie/d’études en Occident n’auront pas effacé. On fait donc comment ?

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Meka et Yvonne, de la websérie nigériane Gidi Up

Je n’ai pas de solution-miracle donc ma seule approche là-dessus est de se jeter à l’eau et voir ce qui se passe. Plus facile à dire qu’à faire, je sais, mais vous ne savez pas à quel point ça vous fait gagner du temps. Les messages codés, les « signaux » qu’on envoie, les messages subliminaux, c’est mignon mais 95% de vos messages ne sont pas suivi d’accusés de réception. Parfois parce qu’en face, ils ont compris votre manège mais ne sont pas intéressés, mais parfois aussi, parce qu’en fait… ils ne voient RIEN. Genre rien du tout. Vous avez l’impression que vous leur faîtes des appels de phares gros comme un camion mais je peux vous l’assurer, très souvent le principal concerné ne se rend absolument compte de rien. Vous allez commencer à vous imaginer que son absence de réaction témoigne d’une absence d’intérêt alors qu’en fait, si ça se trouve, il pourrait (notez mon usage du conditionnel) aller dans votre sens. Bref, si vous pouvez, évitez donc les messages codés ou arrêtez de croire que le body language sera suffisant pour faire comprendre à X qu’il vous intéresse. Ce sont des méthodes certes qui mettent votre orgueil à l’abri d’un rateau direct (se mouiller sans se mouiller), mais quand on évalue ce que ça demande d’énergie, de stress (il n’a pas compris qu’il me plaît ou il ne veut pas comprendre ?) et tout le reste, ça n’en vaut pas la peine. Je parle d’expérience, ça va sans dire

:D

Bon maintenant qu’on a dit ça, concrètement, on approche un homme comment ? Je ne suis pas une experte sur la question mais ce dont je suis sûre, c’est qu’il ne faut clairement pas le faire de la manière dont les hommes approchent les femmes. Prendre la drague au masculin et l’adapter en mode copié-collé quand on est une femme, cela m’a l’air d’une fausse bonne idée. Tout d’abord parce que comme énoncé plus haut, les hommes sont a priori moins habitués à être la proie consentante dans les jeux de séduction et donc, l’attaque frontale peut les faire fuir en moins de deux (analogie avec le monde animal: si un lion voit subitement une gazelle lui foncer dessus avec assurance, il est probable qu’il déguerpisse assez rapidement). Et ensuite, j’ose croire que ces choses-là doivent être faites/dites de manière simple mais délicate. Ceci dit, encore une fois, je ne suis ni Stephen Harvey ni une Dr Love des internets, c’est juste ma vision des choses.

Quoi qu’il en soit, pour que les filles osent plus faire le premier pas, ce serait cool que la gente masculine se rende..comment dire.. un peu plus « disposée » à cela (en des termes plus triviaux « Aidez-nous un peu quoi, merde ?!« ). Mais est-ce que les hommes – dans le fond – sont VRAIMENT (et sincèrement) prêts à laisser le pouvoir aux femmes dans ce domaine ? You be the judge.


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