© Ruth McDowall
Lu dans Culture Box
Photoreporter : les victimes de Boko Haram dans l'oeil de Ruth Mcdowall
Publié le 05/10/2015 à 13H51

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Au début, il n'était pas question de les photographier. "Je leur rendais visite de temps en temps, je partageais des moments avec elles mais je me contentais de photographier des paysages", dit-elle. De plus, ces adolescentes, pour lesquelles le retour dans leurs familles est impossible, ne veulent pas "montrer leur visage pour des raisons de sécurité".
Ces jeunes filles "veulent oublier"
Peu à peu, la confiance s'est pourtant établie et l'idée de la pose photographique a fait son chemin. "Nous avons parlé ensemble de la façon dont elles souhaitaient apparaître, des vêtements qu'elles voulaient porter (...) Elles ont réfléchi à la façon de contrôler leur image et c'était très important pour elles de ne pas être seulement un sujet".Résultat : une douzaine de portraits, dont celui d'un jeune homme. Car, si l'on en parle moins, "beaucoup de jeunes gens sont également enlevés par Boko Haram qui en fait des combattants et des tueurs contraints" quand les adolescentes sont censées devenir, sous peine de mort, des "épouses" d'islamistes.Selon Ruth Mcdowall, ces jeunes filles "veulent oublier, elles ne veulent pas évoquer leur captivité", sauf parfois par des dessins dont certains sont présentés au sein de l'exposition. "Elles doivent reconstruire leur vie. Mais elles sont traumatisées et elles ne bénéficient pas du soutien qui leur serait nécessaire", regrette la photographe. "Je me souviens d'une de ces adolescentes enlevée il y a trois ans. Elle est toujours en larmes trois ans après. Beaucoup sont brisées, on leur a volé leur innocence".
Profession indispendable à l'information
Comme chacun des dix photojournalistes dont le travail est présenté au festival, Ruth McDowall a bénéficié d'une bourse offerte par Photoreporter, un soutien à une profession en difficulté pourtant indispensable à l'information. "En début d'année, un appel à projets est lancé sans thème prédéfini. Le festival en a reçu cette année près de 250 venant du monde entier parmi lesquels le jury fait ensuite son choix", explique Alexandre Solacolu, directeur de ce festival gratuit.
Les photographes ont ensuite quelques mois pour réaliser leur reportage, jusqu'à leur exposition à Saint-Brieuc à l'automne. Les dix reportages sélectionnés cette année arpentent les routes du monde : la Moldavie, "terre silencieuse", l'Italie et les femmes disparues, l'Afghanistan et la vie en temps de guerre ou encore l'Afrique du sud post-apartheid chez les jeunes Xhosa. "Jusqu'à présent, j'avais du mal à faire connaître mon travail et je travaillais avec peu de moyens (...) Ce festival est une grande chance pour moi", confie, sourire aux lèvres, Ruth Mcdowall.
Le Festival Photoreporter, qui a débuté samedi, reste ouvert un mois, jusqu'au 1er novembre.