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Je vais vous raconter l’histoire de ces visages d’anges que les rues ont sali. Je vais vous décrire leurs petites mains tendues à qui veut les aider. Ils se rassemblent à chaque coin de Beyrouth, espérant obtenir par-ci, par-là, des sous, avant les heures les plus sombres du soir. Ils ont au visage un sourire, ou presque.
Ce sont de petits personnages d’une histoire d’horreur sans fin, des enfants de guerre. Le conflit dans leur Syrie natale les a poussés à venir au Liban. Pas d’école, à peine un pantalon déchiré, une chemise froissée et des paires de chaussures trop petites, ou trop grandes, jamais à leur pointure.
Ils se lèvent tôt le matin, comme pour partir au travail. Les conditions météorologiques ne les empêchent pas d’assumer leur tâche. Ils sont là, au petit coin de la place Bechara El-Khoury, dans les ruelles de Hamra ou encore aux portes des églises et des mosquées. Le feu tourné au rouge, c’est leur alarme, il leur permet de se déplacer parmi les voitures pour vous vendre un chewing-gum, une boîte de mouchoirs ou une fleur. En échange d’une moindre pièce d’argent, ils ont surtout leurs prières à vous vendre en merci.
Allez lire la fin tragique de Farès, le vendeur de fleurs à Hamra, l’ami des Beyrouthins, celui qui rêvait de devenir avocat pour défendre les enfants qui travaillent. Un style irréprochable, un sourire que les guerres des grands n’ont pas réussi à écraser, il veillait près des bars du quartier le plus fameux de Beyrouth. Tout le monde l’attendait impatiemment, lui offrait à manger ou à boire. Puisque son intelligence et sa sociabilité ont fait de lui le chouchou de Hamra. Hélas, reparti en Syrie fêter la fin du mois de Ramadan, Farès a été tué par une bombe. Impossible de décrire les réactions de ses innombrables amis. La page de la rue de Hamra sur Facebook a même mis sa photo en profile.
Nombreux sont les petits innocents avec lesquels la vie a été trop injuste, nombreux à être des héros dignes de l’histoire de "La petite fille qui vendait des allumettes".