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Les symboles du marché de l’art : artistes syriens et iraniens aux ventes de Dubaï

Publié le 27 octobre 2015 par Gonzo
Acheteurs aux dernières enchères de Christie's à Dubaï (AFP)Acheteurs aux dernières enchères de Christie’s à Dubaï (AFP)

Voilà presque vingt ans que Christie’s exploite le filon du marché de l’art dans le Golfe. Un marché de niche, qui ne père pas très lourd à l’échelle des sommes colossales que la société d’enchères réalise à l’échelle mondiale. Les dernières ventes à Dubaï il y a quelques jours se montent ainsi à un peu plus de 7 millions de dollars, une goutte d’eau à côté des huit milliards et demi de dollars réalisés par les ventes d’art en 2014.

Apparemment, les dernières enchères – des artistes contemporains en même temps que des montres hors de prix – se sont révélées un peu décevantes selon un article publié sur le site Raseef. Une petite déception pour les spéculateurs de l’art, qui tient en premier lieu à la baisse des revenus pétroliers. Vendu aujourd’hui à peine plus de 40 dollars le baril, même pas la moitié de son prix il y a encore un an, l’or noir ne remplit plus aussi généreusement les caisses publiques ou privées (sachant que ce sont les fortunes princières, de type semi-public si l’on veut, qui constituent le premier cercle des acheteurs). La situation financière dans le Golfe est d’ailleurs si préoccupante que la révolte grossit dans les rangs de la riche famille régnante saoudienne, surtout depuis que le FMI met ouvertement en garde contre une possible banqueroute du royaume en 2020.

Mais l’épuisement des ressources financières n’est pas la seule explication à l’anémie du marché de l’art arabe à Dubaï. L’autre problème, tout aussi conjoncturel, est plus directement politique puisqu’il s’agit des retombées, un peu inattendues, du « printemps arabe » sur la cote des divers artistes régionaux. Depuis l’année 2011 et les soulèvements que l’on sait dans le monde arabe, les créateurs syriens ont la cote, y compris au sens littéral du terme. Évoqué dans un billet il y a de cela deux ans, le « boom » de l’art syrien si l’on peut se permettre cette image malheureuse dans ce contexte, a continué à enfler. Comme on peut le lire dans cet article du site Aljazeera America (quel drôle de nom tout de même quand on y pense!), certains intermédiaires avisés tel que le galériste Khaled Samawi, un banquier syrien qui est aussi un des acteurs majeurs de la « globalisation » de l’art moderne dans la région (voir ce billet de juillet 2010), ont réalisé, en se mettant au service des plasticiens révolutionnaires, des opérations très gratifiantes, y compris sur le plan financier.

Mais les meilleures intentions ne sont pas suffisantes pour imposer leur conduite aux acheteurs et le marché finit par dicter ses lois, en fonction de l’offre et de la demande. Surexploité, surévalué, le gisement syrien – nourri par des artistes souvent réduit aux pires nécessités – a fini par s’épuiser. À l’issue des enchères organisées par Christie’s à Dubaï, pas un artiste syrien figure dans les dix meilleurs ventes. En revanche, on y trouve six artistes iraniens. Tout un symbole peut-être par rapport à l’avenir de la géopolitique régionale !


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