Magazine Humeur
Mardi 3 novembre. Non loin de la Grande poste les bouquinistes s'installent pour une nouvelle aventure... Je me suis rendu directement au Musée des Beaux-Arts. 70 marches, rappelez-vous et 200 dinars. « Laissez votre sac à dos à l’entrée. Gardez bien le ticket ». Numéro 4. Longue bâtisse sur quatre niveaux.
De sa terrasse on peut observer toute la baie de la capitale. « Quelques photos s’il vous plaît. C’est pour mon site, vous ne connaissez pas ? 10 ans pourtant et beaucoup de visiteurs… http://leblogdeahmedhanifi.blogspot.com/ . C’est pour faire connaître ce magnifique lieu ». « Une seule ? » « non quelques-unes ». J’ai renouvelé cette demande plusieurs fois car les gardiens qui circulent à travers les différentes travées sont nombreux. Que de beaux ouvrages en effet, de la peinture, de la sculpture, art déco et contemporain… bref, des siècles d’histoire de l’Art en Algérie. De Utrillo, Bourdon à Matisse, Vlamenck, de Gammiéro à Maya. De l’espace Belmondo à Racim… Un régal. Deux heures plus tard, je ne sentais plus mes jambes. Il me fallait reprendre quelques forces, attablé à la gigantesque terrasse.
Je reprends le métro et le tram jusqu’à… vous avez deviné : « La Foire ! » Mon ami… A.K. me fait faux bond. Un sociologue très demandé. Je prends un thé dans la grande Kheima de Béchar. Les allées du Salon me semblent moins bondées. On circule mieux. C’est moins le souk. Si la majorité des personnes ont le cou libéré, d’autres portent, pendues autour, des cartes rouges avec cette mention « 20° SILA », d’autres celle-ci « Presse », sur des cartes blanches. De la chaise où je me suis installé pour charger mon appareil photo (j’ai oublié de m’en occuper à l’hôtel). J’aperçois au stand du très sérieux CRASC, un professeur que je connais pour avoir participé à une de ses interventions(en cercle réduit) à Manosque. Monsieur Q. J-M. Il tient entre les mains le dernier ouvrage (reconnaissable par ses volume et couleurs) du centre de recherches anthropologiques. CRASC : « Dictionnaire du passé de l’Algérie : de la préhistoire à 1962. » Je débranche mon Leica Lumix le temps de prendre en photos monsieur le professeur. Il est plongé sur la même page qu’il semble lire et relire. Je participerai un peu plus tard à sa conférence intitulée « L’enfant, le livre et l’école : l’expérience française »
Tiens voilà quelqu’un d’autre que je connais (ou plutôt « reconnais », nos relations sont certes amicales, mais superficielles). S. H. éditeur de son état. « Bonjour, bonjour » « quoi de neuf, » « ça va ? » « oui ça va » « et Marseille ? » « Ah, Marseille… » J’ai peine à comprendre ce qu’il dit. Il traîne d’une main une lourde (en apparence) valise mauve sur roulettes noires et de l’autre il presse un sandwich quelconque, qu’il porte à sa bouche encore pleine. Il lève un bras pour dire « désolé, je dois continuer ». Il ne le dit pas, car il mâche, goulûment, son sandwich, mais je comprends. Il hoche la tête devant une dame qui le croise. Une journaliste. Elle le croise, elle vient donc vers moi. Cette fois ce sont nos propres regards qui se croisent. Dans le sien je vois un point d’interrogation aussi gros qu’une boule de pétanque prête à être lancée sur le cochonnet qui l’attend. Je lui tends la main et lance « La Tribune ? », elle dit « Chaîne 3 ». Les journalistes, comme les éditeurs, et contrairement aux chercheurs, sont toujours pressés. L’actualité leur colle au corps pour mieux les berner et nous avec. Je lui offre mon dernier recueil dont elle lit le titre et lance « Ah ghrompawghawch ! ». Comme vous, moi non plus je n’ai pas vraiment saisi ce qu’elle m’a envoyé. Etait-ce une amabilité ? Pendant ce temps mon appareil photo se gave de particules élémentaires. A l'Espace Institut français, Maïssa Bey et les représentants de l'Institut (M. Alexi A...) récompensent les lauréats de La nouvelle fantastique.
Plus tard j’assiste à une table-ronde assez animée sur « La nouvelle littérature africaine, vers la rupture ? » Un ébat chaud disais-je, avec le dynamique et talentueux Armand Gauz, avec aussi Kangni Alem, Parkes Nii Ayikwei et la traductrice Sika Fakambi. La modératrice ne fut hélas pas à la hauteur.
Mercredi 4 : « Gare d’ Agha ». 8 heures. Départ du train à destination d’Oran où l’on arrive à 12h52 (oui, parfaitement, tel qu’annoncé).