Ma règle du je

Cette fois, je pense que j’ai compris… Ou pour être plus précis, je vois au sens propre du terme ce qui me tracasse. Voilà pas mal de temps en effet que je redoutais le franchissement de ce cap on ne peut plus virtuel qu’est celui du demi-siècle. Après tout, il est bien vrai que le chiffre en lui-même n’a aucun sens et que si les années duraient deux fois plus longtemps, je ne serais âgé que de vingt-cinq ans.
Pourtant, il reste un drôle de malaise au goût très amer qui me gagne régulièrement depuis ce jour fatidique et néanmoins dignement fêté avec ma tribu et un aréopage d’amis fidèles avec lesquels je me sens en harmonie.
Et pourtant… L’impression que les années filent à la vitesse de l’éclair, qu’il n’y a plus un instant à perdre, que jamais on ne disposera du temps nécessaire pour entreprendre tout ce qui, régulièrement, nous passe par la tête et qu’on reportait presque mécaniquement à plus tard, convaincu que rien ne pressait jusque là.
Mais pourquoi aujourd’hui plus qu’avant ? Vous allez rire, certainement… tout ceci relève d’un phénomène essentiellement visuel.
Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours vu intérieurement ma vie, en fermant les yeux, de la naissance à la mort, comme une sorte de double décimètre où le zéro correspondrait naturellement au point de départ et où le chiffre vingt marquerait la fin du parcours, que bizarrement je me suis fixé quelque part aux alentours de soixante-quinze (ne me demandez pas pourquoi, je l’ignore !).
C’est dire qu’en considérant cette vilaine réglette, sur laquelle j’avançais inexorablement depuis le début de ma vie, je suis bien obligé, désormais, de « voir » que ce qui est devant moi n’est plus constitué que de quelques misérables centimètres. Il m’en reste moins de sept à parcourir alors que j’en ai déjà gravi plus de treize.
Autant dire rien, ou presque. Carpe diem !