Roturière
Le Rotary de Saint-Jean de Luz organise une vente de livres. A la caisse une cliente-donatrice aborde timidement la vendeuse-bénévole. Elle semble la connaître sans véritablement la côtoyer. Elles sont blondes toutes les deux mais l’une a des cheveux longs filasses et mal peignés, tandis que l’autre abhorre un brushing impeccable.
La vendeuse-bénévole répond d’un air détaché qu’ils sont très organisés et qu’un planning a été rigoureusement établi. Sans doute répond-elle à une remarque, dépourvue de malice, sur la pénibilité de la tâche. La cliente-donatrice s’enhardit presque et glisse qu’elle aussi est bénévole, à la Croix rouge, et que c’est beaucoup de travail.
Ne pouvant déroger à ce rapport forcé, la vendeuse-bénévole opte à présent pour un ton d’encouragement :
- C’est bien ! Il faut ! Il faut le faire !
La cliente-donatrice, qui semble ne pas avoir perçu le mépris de classe, s’éloigne, sans doute ravie d’avoir pu échanger quelques mots avec la notable. Qui l’a déjà effacée…
Colette Milhé