Suzanne

Publié le 21 novembre 2015 par Polyphrene
Suzanne takes you down to her place near the riverYou can hear the boats go byYou can spend the night beside herAnd you know that she's half crazyBut that's why you want to be thereAnd she feeds you tea and orangesThat come all the way from ChinaAnd just when you mean to tell herThat you have no love to give herThen she gets you on her wavelengthAnd she lets the river answerThat you've always been her lover
And you want to travel with herAnd you want to travel blindAnd you know that she will trust youFor you've touched her perfect body with your mind.
And Jesus was a sailorWhen he walked upon the waterAnd he spent a long time watchingFrom his lonely wooden towerAnd when he knew for certainOnly drowning men could see himHe said "All men will be sailors thenUntil the sea shall free them"But he himself was brokenLong before the sky would openForsaken, almost humanHe sank beneath your wisdom like a stone
And you want to travel with himAnd you want to travel blindAnd you think maybe you'll trust himFor he's touched your perfect body with his mind.
Now Suzanne takes your handAnd she leads you to the riverShe is wearing rags and feathersFrom Salvation Army countersAnd the sun pours down like honeyOn our lady of the harbourAnd she shows you where to lookAmong the garbage and the flowersThere are heroes in the seaweedThere are children in the morningThey are leaning out for loveAnd they will lean that way foreverWhile Suzanne holds the mirror
And you want to travel with herAnd you want to travel blindAnd you know that you can trust herFor she's touched your perfect body with her mind.
Bien que cette chanson fut un des premiers et plus grands succès de Léonard Cohen, c’est Judy Collins qui l’a d’abord chantée et enregistrée, en 1966. Elle figura ensuite sur le premier album de Léonard Cohen, en 1967 (Songs of Leonard Cohen). Tout d’abord inspirée par l’atmosphère particulière de ce quartier ancien de Montréal, autour du port et de l’église Notre-Dame-du-bon-secours dédiée aux marins dont les bateaux sillonnaient le Saint-Laurent, cette chanson prit un nom, et s’incarna littéralement en la personne de Suzanne Verdal, artiste (danseuse) que Léonard Cohenrencontra par l’intermédiaire de son mari, Armand Vaillancourt, sculpteur. Léonard Cohen, manifestement attiré et fasciné par cette femme aussi belle qu’originale, continua de la rencontrer après qu’elle se fut séparée de son mari. Les récits de l’une et de l’autres’accordent sur la qualité particulière de cette relation platonique, fondée sur un remarquable accord de sensibilité poétique et spirituelle. Tous deux mentionnent en effet l’absence de contact physique (en dépit de l’attirance que ressentaitmanifestement Léonard) et Suzanne expliquequ’elle a décliné ses propositions pour conserver à cette relation toute sa magie et sa singularité, et ne pas être « une de plus dans la foule » (des conquêtes de Léonard). Ceci offre un éclairage utile sur l’étonnante formuleconcluant chaque refrain : « tu as touché, de ton esprit, son corps parfait… Il (Jésus) a touché, de son esprit, ton corps parfait… Elle a touché, de son esprit, ton corps parfait ». Suzanne, elle-même, ne découvrit cette chanson quelque temps après, par l’intermédiaire d’amis, et en éprouva une certaine gêne, teintée de nostalgie et d’amertume : gêne en raison de l’exposition de son intimité ; nostalgie pour ce temps merveilleux mais lointain ; amertume pour l’état d’esprit que les années et le succès ne peuvent qu’altérer (elle disait être restée, quant à elle, dans le pur esprit des années 60). Les commentaires de Léonard Cohen à ce sujet sont divers et, parfois, moins idéalistes. La strophe centrale dédiée à Jésus fait l’objet de multiples commentaires, parfois très surprenants, mais s’explique sans doute par la genèse de cette chanson, autour de Notre-Dame-du-bon-secours, cette dernière prenant alors les traits de Suzanne.ALN
PS: L'adaptation française de cette chanson par Graeme Allwright est un chef d'oeuvre, et ma propre traduction ne figure ici que par souci de cohérence, comme je l'ai déjà mentionné.

Suzanne

Suzanne t’entraîne   chez elle près du fleuve, en basTu entends passer les bateauxTu peux passer toute la nuit làElle est un peu folle, tu sais çaSi tu restes, c’est pour celaElle t’offre des oranges et du théQui de la Chine sont importésEt quand tu veux dire que pourElle tu ne peux donner d’amourDe ses grandes ondes, elle t’entourePour faire dire au fleuve qui courtQue tu es son amant de toujours
Tu veux, avec elle, voyagerTu veux la suivre, aveugléElle te fera confiance, tu saisCar ton esprit a touché son corps parfait
Jésus était un marinQuand, sur les eaux, il a marchéPendant longtemps, il a observéSeul du haut de sa tour de boisEt quand il fut bien certainQue seuls les noyés le verraientIl dit « Les hommes seront tous marinsJusqu’à c’ que la mer les libèreMais lui-même fut brisé bienAvant que le ciel s’ouvre enfinSombrant sous votre sagesse comme une pierre
Tu veux, avec lui, voyagerTu veux voyager aveugléTu penses pouvoir lui faire confiance Car son esprit a touché ton corps parfait
Suzanne prend ta mainEt te conduit à la rivièreHabillée de plumes et haillonsDont l’armée du salut fait donEt le soleil coule comme du mielSur notre dame, madone du portElle te montre comment voirDans les ordures et fleurs en boutonDans les algues, il y a des hérosEt dans le matin des enfantsQui se penchent pour de l’amourEt se pencheront ainsi toujoursQuand Suzanne tient le miroir
(Traduction – Adaptation : Polyphrène)