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Publié le 29/11/2015 par Jean-Bernard Gilles L’agroalimentaire, la sous-traitance aéronautique et quelques belles entreprises de taille intermédiaire tirent un développement encore trop dépendant de l’extérieur
Les grands groupes stars sont maîtres d’un destin qu’ils façonnent ici dans la grande région, où ils sont nés.La grande région a ses entreprises stars. Legrand, créée à Limoges, devenue en quelques décennies un des leaders mondiaux de l'électricité, emploie 2 500 salariés en Haute-Vienne. Fayat, à Bordeaux, partie de Libourne et devenue la quatrième major du BTP français, est présente en Chine, en Afrique et aux États-Unis. Maaf Assurances, à Niort, symbole d'un pôle mutualiste, troisième place financière française. Delpeyrat ou Labeyrie, plus au sud, parmi les champions du jambon, du foie gras et d'un saumon qui commence à s'exporter.Ces grands groupes sont maîtres d'un destin qu'ils façonnent ici dans la grande région, où ils sont nés. Mais ce n'est pas la règle générale. Il est frappant de voir comment Cdiscount, leader français de l'e-commerce, né à Bordeaux et désormais adossé au groupe Casino, perd de son autonomie en même temps qu'il tente de conquérir une part de marché mondiale pour exister face à la déferlante du chinois Alibaba.
© PHOTO SO INFOGRAPHIEFilière animation à Angoulême
Suprenant aussi que le siège d'Airbus Safran Launchers, la toute nouvelle société européenne créée pour préparer le lanceur Ariane 6, garde son siège à Issy-les-Moulineaux alors que plus du tiers de ses savoir-faire, de ses salariés et de sa technologie est clairement girondin. Même le secteur bancaire ne dispose pas, quoi qu'il en dise, d'une capacité financière d'intervention autonome (sans visa de Paris) supérieure à 10 millions d'euros.
Mais la grande région sait se prendre en main. Le boom de la filière animation d'Angoulême, qui héberge désormais un bon tiers de l'excellence française, avec 600 emplois et 38 studios, est une belle illustration de cette créativité territoriale. La reconversion du bassin de Lacq, à travers le projet Lacq 2030, qu'il a fallu imposer à Paris, en est un autre exemple. Et la filière aéronautique, qui multiplie les investissements à Bordeaux ; Tarnos avec Turbomeca ; Biarritz et Mérignac, où Dassault et ses Rafale créent de l'emploi.Si les ateliers de luxe de Dordogne, de Charente et de Haute-Vienne ne parviennent pas encore à se fédérer autour du pôle de formation de Thiviers, la filière nautique, tirée par des entreprises de pointe à La Rochelle, avec Fountaine Pajot, ou à Bordeaux, avec Beneteau, surfe elle aussi sur une vague porteuse. Le tourisme enfin, et ses 80 000 emplois, qui partout pourrait se développer, dans le sillage de Lascaux en Dordogne, de la future Cité du vin à Bordeaux, de l'Aquarium de La Rochelle et de la Côte basque, ses totems.
Reste l'innovation, qui doit aujourd'hui primer. Dans le laser et l'optique et ses 10 000 emplois affichés en Gironde, trop rares sont encore les start-up qui volent de leurs propres ailes, tandis que le CEA tire à lui la couverture et l'argent public. Le numérique apparaît comme un des plus formidables leviers de développement. Dans ce secteur, en dépit de l'avance structurelle prise par les Américains, les chances sont à nouveau égales. Les PME basques, de Bordeaux ou de Limoges sont à la pointe. Les fonds d'investissements viennent y faire leur marché.La grande région aura bien besoin de cette nouvelle génération qu'il faudra accompagner en lui laissant la liberté d'entreprendre. Car, dans le nouvel ensemble, le taux de pauvreté s'établit à 14 %, selon l'Insee, les inégalités de revenus sont importantes et les salaires moins élevés qu'ailleurs. Le taux de chômage est en hausse et la population vieillit dans les départements de l'intérieur. Le changement de cadre n'effacera pas la réalité économique et sociale d'un seul clic.
http://www.sudouest.fr/2015/11/29/une-economie-sans-autonomie-2200943-2780.php