Knight of Cups // De Terrence Malick. Avec Natalie Portman, Christian Bale et Teresa Palmer.
Il y a quelques années de ça, j’ai développé une certaine fascination pour le cinéma de Terrence Malick. Depuis que j’ai découvert Le Nouveau Monde en 2005 je suis émerveillé à l’idée de découvrir une nouvelle de ses oeuvres. J’avais par la suite récupéré mon retard et puis j’avais été bouleversé par The Tree of Life en 2011. J’ai d’ailleurs eu beaucoup de mal à m’en remettre mais peu importe. Le suivant, A la merveille était légèrement décevant. Son retour, je l’attendais et c’est pour cela que je me suis plus ou moins jeté sur Knight of Cups non sans une certaine appréhension malgré tout. Le réalisateur continue donc d’explorer des terrains qui lui sied à merveille, à mi-chemin entre une histoire labyrinthique sur la crise existentielle que l’on peut connaître après 40 ans et quelque chose de beaucoup plus intéressant, captant les émotions de façon brillante. Terrence Malick continue d’utiliser ce qui fait le charme de son cinéma ici, entre ces longs plans contemplatifs et cette voix off presque là pour nous bercer au rythme des séquences. Tout s’enchaîne, parfois étrangement mais c’est une jolie fable qui nous est contée ici, utilisant à merveille les miroirs que Hollywood peut lui offrir. Puisque Knight of Cups c’est aussi un peu le constat du Hollywood actuel, alors qu’un homme tente juste de sauver ce qu’il reste de lui.
« Il était une fois un jeune prince que son père, le souverain du royaume d’Orient, avait envoyé en Égypte afin qu’il y trouve une perle. Lorsque le prince arriva, le peuple lui offrit une coupe pour étancher sa soif. En buvant, le prince oublia qu’il était fils de roi, il oublia sa quête et il sombra dans un profond sommeil… » Le père de Rick lui lisait cette histoire lorsqu’il était enfant. Aujourd’hui, Rick vit à Santa Monica et il est devenu auteur de comédies. Il aspire à autre chose, sans savoir réellement quoi. Il se demande quel chemin prendre.
Knight of Cups c’est la quête d’un homme qui cherche à savoir ce qu’il veut faire du reste de sa vie sans vraiment savoir pourquoi et comment il va s’y prendre. Le minimalisme des dialogues laisse donc place à un flot d’images toutes très bien pensées car elles ont toutes une portées. Je pense notamment à cette grande sauterie dans une splendide villa (avec en caméo Antonio Banderas ou encore Jason Clarke). Cette scène est probablement celle qui dépeint le mieux les problèmes du Hollywood dans lequel le héros ne se reconnaît plus. Cette façon de parler de soirées étranges sous kétamine ou encore de tout un tas d’autres choses. D’ailleurs, on voit notre héros naviguer dans cette soirée sans véritablement y prendre part. Les dialogues sont structurées afin de ne jamais donner la parole au héros et de faire en sorte qu’il ne soit que spectateur de la médiocrité du monde dans lequel il est en ce moment. Terrence Malick reste fidèle à son cinéma expérimental qui raconte des histoires sans jamais vouloir le faire comme tout le monde. Ce minimalisme se retrouve même dans les décors (le peu de meubles dans les maisons, etc.) permettent de se poser des questions sur d’autres choses et d’attirer notre oeil ce qui est véritablement essentiel.
Car si Knight of Cups peut montrer aussi la démesure (notamment à Vegas avec tous ces plans sauvages du Caesar Palace entre cette immense terrasse et tout le reste), ce n’est pas toujours ce dont le film a besoin pour faire exister les choses. Car le film est capable de capturer diverses choses et de nous donner l’impression qu’elles s’opposent. Par moment c’est donc très lent, très posé et puis d’un coup, le film surgit et semble raconter quelque chose de légèrement différent. Knight of Cups c’est aussi probablement ce que True Detective n’a pas réussi à faire dans sa saison 2, dépeindre le Los Angeles d’aujourd’hui et la pieuvre de routes qu’elle peut être. Ces routes sont aussi symboliques par rapport aux chemins que le héros peut prendre dans sa vie (on va à un moment avoir droit à un plan de route, comme si l’on était dans une voiture en simple spectateur de ce chemin qui nous conduit petit à petit ailleurs). Après Tree of Life et A la merveille, Terrence Malick referme proprement une trilogie qui voulait explorer la vie, ses problèmes et la façon dont les relations sont faites. C’est aussi ici un film étonnant car peut-être le plus lisible des trois, beaucoup plus ancré dans une certaine forme de réalité pesante dans un Los Angeles brillamment mis en scène.
Note : 9/10. En bref, une fable métaphysique étonnante aux questions et aux réponses d’autant plus merveilleuses.