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[Lu pour vous] Philosophie Magazine – Analyses habiles de Star Wars

Par Neodandy @Mr_Esthete
[Lu pour vous] Philosophie Magazine – Analyses habiles de Star Wars

L'appellation Star Wars achèvera l'année 2015 dans un opportunisme édito-commercial effréné. Alors que Dark Vador ne finit plus de se trouver des filles et des fils spirituels, quelques publications rendent un hommage circonstanciel tout en étant passionné et passionnant. Parmi elles, le numéro 27 hors-série de Philosophie Magazine mérite un détour d'intérêt : l'écriture croisée de 18 auteurs s'autorise un éloge rempli de nuances de la saga, en critique l'actuel et soudain angélisme et questionne la matière première de l'univers Star Wars, à savoir l'imagination orchestrée par George Lucas.

Depuis 1977 et les innombrables témoignages publics de George Lucas, Star Wars confond son identité à celui d'un puzzle à l'apogée de sa variété. En moins de 100 pages, Philosophie Magazine isole fragment après fragment les grandes inspirations à l'origine des deux trilogies de Star Wars. Selon un principe canon, l'intégralité des films est passée au crible en s'appuyant sur des illustrations issus des longs-métrages, en proposant des idées clefs et en aboutissant à un développement démonstratif clair. La Force n'a jamais été aussi rationnelle dans un format si réduit.

" Médiévalement " vôtre.

Bien et Mal, mythes et légendes, narration et retour sur un succès peu prémédité en 1977 : presque tout tourne autour d'une planète culturellement médiévale. La comparaison spatiale est d'autant plus approprié qu'une myriade de références s'incruste au sein des chroniques puisqu'il y est question d'arts martiaux nippons, d'un conte façonné par les codes littéraires issus du Moyen Âge eux mêmes finalisés par des apports antiques greco-romains. Cette conception de réunir des lots de référence avec un cheminement principal, George Lucas n'a jamais dissimulé son inspiration jusqu'à l'épuisement de de Joseph Campbell (Le héros aux milles visages). L'on soupçonnerait probablement moins les ressources citées, exactes et larges venues d'Asie, de l'érémitisme monastique et des différences qui justifient le distinguo entre la Trilogie Originale (Episode IV - V - VI) et la " Prélogie " (Episode I - II - III).

Il souffle sur la Trilogie Originale les premiers vents coulis, les prémices morales de la religion Jedi, l'éthique et l'esthétique des Lightsabers ou le charisme fou apporté à la plus petite et la plus philosophe des marionnettes : Maitre Yoda. Du code courtois à l'arme chevaleresque symbolique, Ollivier Pourriol et Alexis Lavis accordent leur opinion sur la propre fascination américaine universitaire des années 1960 - 1970 où le Japon émerveillait, où la reconsidération du Moyen Âge se faisait hésitante à propos des savoirs qu'elle apportait ... La réussite majeure de Star Wars a consisté à renvoyer, le temps de quelques créations, Orient et Occident dans une même unité culturelle. A l'auteur Julien Baggini de rédiger l'antépénultième chronique de ce Philosophie Magazine à la page 91 : " Trop de spectateurs se laissent distraire par la rassurante sagesse Jedi [...] même si elle n'offre guère mieux, en définitive, qu'un bric à brac spirituel et une philosophie de comptoir. " Digne de tout écrivain, le scénario de George Lucas revêt un courant hippie éclatant : péjoratif pour les uns, ambitieux pour son créateur, réconfortant pour d'autres.

En arrière plan, Star Wars décrit le plus fidèlement possible la personnalité de George Lucas. Probablement bien plus que THX 1138 (1971) ou American Draffiti (1973), les deux premières réalisations de jeunesse de G. Lucas. Les ambitions d'indépendance ont existé, du moins dans les premiers temps de la saga, témoignant alors d'une voie distincte de la Prélogie, qualifiée à plusieurs reprises, de produit Hollywoodien.

Prélogie politique ?

Star Wars peut se voir comme un ersatz de la morale américaine, la même qui a poussé l'écriture d'une constitution fondatrice des Etats-Unis : dès la Trilogie Originale, le Bien affronte le Mal, un héros et ses compagnons viennent à bout d'un Empire tyrannique ... A ce détail près que le charme du conte pour enfants eut l'idée ou l'avidité de se compléter par une fable politique où être Républicain signifie être du " Bon côté ".

Que vous soyez d'accord ou non, la recherche de sens derrière quelques symboles amplifie et identifie avec clarté en quoi Star Wars jouit aujourd'hui d'une renommée mythique dépassant alors les cadres du cinéma. Le simple fait que l'analyse politique outrepasse l'étude des personnalités introduites ou précisées dans la Prélogie, révèle, en un sens, l'effacement progressif d'Anakin en qualité de personnage clef. L'écrivain Slavoj Zizek, à travers son développement intitulé " Anakin, il est trop bien ", étudie le futur Vador en tant qu'individu matérialiste dans un régime où l'équilibre constituerait une norme de la Prélogie. Lorsque l'Homme devenu machine reprend sa place dans le système politique, les pensées de Socrate illustrent des maximes provocantes, finalement parvenues à point pour expliciter la (fine) trame scénaristique de la Prélogie : " Nulle n'est méchant volontairement " signifierait alors qu'il faut, au contraire, lutter pour que l'optimisme advienne, afin que les desseins sombres s'imprègnent de bienveillance.

Star Wars bénéficiait d'une presse plutôt favorable. Heureusement critiqué et défendu, l'Empire des jouets conçu par George Lucas, son opposition entre Bien et Mal ... Autant d'éléments à priori abscons à analyser, à décrypter 40 ans plus tard pour le public visé : des millions d'enfants devenus adultes, des millions d'adultes qui ont accompagné et suivi leurs progénitures dans une aventure sans commune mesure.

Aimer sans savoir, s'adresser au public adéquat.

La fascination des écrivains à détricoter le rêve américain reproduit dans la saga agit aujourd'hui en modèle que l'on questionne ouvertement. Les exemples, eux, témoignent de cette universalité commune à songer Star Wars et à l'expliciter grâce à des penseurs variés, dont, entre autres : Rousseau, Machiavel, Platon, Socrate, Heidegger, Saint Augustin ... et le collectif de 18 auteurs. Le retour à la matérialité de Star Wars définiit probablement la part la plus fascinante à décomposer dans Star Wars.

Plus que les concepts abstraits de Force, du mythe d'Oedipe et les autres abstractions importantes de Star Wars, la richesse de George Lucas s'exprime aussi dans la volonté de dynamiser la part des produits dérivés, dans sa revisite d'American Draffiti à travers un large panel de véhicules mêlant technologie de pointe et bricolage. (A la manière de Stanley Kubrick et 2001 : L'Odyssée de l'Espace (1968), définitivement maître dans cette volonté.) Résumer de façon infantile la Trilogie Originale à sa seule opposition entre la part lumineuse et l'obscurité d'autres individus revient à oublier des milliers d'annexes imaginatives. Toutes ces choses qui rendent Star Wars unique, d'un seul tenant, et pourtant intégralement inspiré.

Imaginez Star Wars à l'exemple de la Cantina Band de Tatooine (Episode IV) est, probablement, l'image clef pour décrypter 6 oeuvres de science-fiction. Et surtout, sa Trilogie Originale. Dédié autant aux enfants qu'à leurs parents, Star Wars eut l'ambition de s'adresser à tous les publics et d'en concrétiser assez bien le rêve à travers le succès qu'on lui connait. Un hors-série intrigant, richement illustré d'exemples et capable de démontrer facilement les façonnages variés de l'univers étendu de Star Wars.

Si les essais mêlant cinéma, analyses et Star Wars vous passionnent, le Blog LaMaisonMusee.com vous recommande expressément d'Ollivier Pourriol.


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