L'année 2015 a vu un changement d'attitude radical des institutions financières vis-à-vis des startups de la FinTech, passant en quelques mois du mépris à l'euphorie. Une des conséquences de cette évolution est la multiplication des accélérateurs et incubateurs. Oliwia Berdak (Forrester) s'interroge : ce mouvement est-il raisonnable ?
Le phénomène est particulièrement visible à Londres et à New York : pratiquement toutes les banques présentes y ont créé – seules ou en combinant leurs forces – des structures d'accueil destinées aux jeunes pousses de la finance. Cependant, même dans les régions et les villes (dont Paris) qui sont encore très loin de l'emballement des deux grandes capitales de la FinTech, la question de fond est parfaitement justifiée : ces initiatives produiront-elles les résultats attendus et peuvent-elles perdurer à long terme ?
Selon Oliwia Berdak, la réponse est sans détour : d'ici 5 ans, la plupart de ces accélérateurs auront disparu. Son principal argument est le coût élevé de ce genre de programme (qu'elle estime à 1 millions de dollars par an), à mettre en regard de promesses de bénéfices qui seront rarement concrétisées. De surcroît, ce risque de défaut de retour sur investissement sera d'autant plus élevé que, dans de trop nombreux cas, les efforts ne sont pas suffisamment focalisés sur la cible visée.
Je crains pourtant que, dans l'ensemble, cette vision ne soit un peu trop « comptable ». Certes, la mise en place d'un dispositif en faveur des startups impose de définir au préalable les objectifs qui lui sont assignés. Mais, déjà à ce stade, j'estime que ce qui est important est de déterminer la valeur que l'organisation souhaite retirer (identifier de futurs partenaires, participer à des expérimentations, apprendre à innover…) et pas nécessairement de délimiter précisément le périmètre des solutions à soutenir.
Sur un autre plan, concernant l'avenir de ces structures, je n'adhère pas non plus à la perspective que propose Oliwia Berdak. Je soupçonne que, d'ici 5 ans (ou un peu plus), le paysage de la finance aura tellement changé que l'idée d'un incubateur dans une banque n'aura probablement plus de sens : les institutions historiques se seront acclimatées à la nouvelle donne et n'auront plus un besoin aussi pressant (et aussi en amont) des startups pour appréhender leur propre transformation, tandis que ces dernières (re-)commenceront progressivement à vouloir reprendre une certaine distance.
Enfin, je suis peut-être un peu naïf, mais je ne crois pas qu'un budget annuel d'un million de dollars puisse être considéré comme élevé, s'il est affecté à une initiative qui – pour peu qu'elle soit menée correctement – a vocation à accompagner la révolution culturelle de l'entreprise et à lui permettre de survivre aux grandes mutations en cours. Après tout, cela ne représente qu'une fraction des dépassements chroniques de coûts affectant des projets pharaoniques dont la valeur est souvent bien plus discutable…