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Rosetta : découverte de nouvelles traces de glace d’eau sur la comète Tchouri

Publié le 17 janvier 2016 par Pyxmalion @pyxmalion
La région baptisée Imhotep, sur le plus grand lobe du noyau de Tchouri, vue ici de profil. Au centre, on peut distinguer le gros rocher Cheops comme poser au milieu d’une plaine relativement lisse. L’image a été prise le 2 janvier 2016 avec la caméra Osiris NAC (Narrow Angle Camera) de Rosetta à 86,8 km de la surface. Depuis décembre 2015, des « images du jour » d’Osiris sont publiées régulièrement. Retrouvez la galerie [ici] -- Crédit : ESA, Rosetta, MPS for OSIRIS Team, UPD, LAM, IAA, SSO, INTA, UPM, DASP, IDA

La région baptisée Imhotep, sur le plus grand lobe du noyau de Tchouri, vue ici de profil. Au centre, on peut distinguer le gros rocher Cheops comme poser au milieu d’une plaine relativement lisse. L’image a été prise le 2 janvier 2016 avec la caméra Osiris NAC (Narrow Angle Camera) de Rosetta à 86,8 km de la surface. Depuis décembre 2015, des « images du jour » d’Osiris sont publiées régulièrement. Retrouvez la galerie ici — Crédit : ESA, Rosetta, MPS for OSIRIS Team, UPD, LAM, IAA, SSO, INTA, UPM, DASP, IDA

De nouvelles traces de glace d’eau ont été identifiées sur la surface de la comète Tchouri. Observées avec l’instrument Virtis, leur étude indique une taille de grains différente de ceux détectés dans la région d’Hapi. La formation des plus gros pourrait être associée à la sublimation et ne pas dater de la création du noyau cométaire.

Cela fait un an et demi déjà que Rosetta escorte le noyau de la comète 67P/Tchouryumov–Gerasimenko alias Tchouri pour l’épier à travers ses instruments le long d’une partie de son périple de six ans et demi autour du Soleil. Par petites touches, différentes équipes de chercheurs qui se penchent sur son anatomie, sa composition et son comportement pre et post-périhélie s’efforcent ainsi de composer un portrait, le plus détaillé possible, de l’un de ces corps glacés considérés comme de véritables fossiles de la formation de notre Système solaire. Il faudra certainement plusieurs années voire une décennie pour analyser toutes les données que la sonde spatiale collectera jusqu’à la fin de sa mission prévue en septembre prochain.

Dans une nouvelle étude publiée le 14 janvier 2016 dans Nature, un collectif de chercheurs dirigés par Gianrico Filacchione, de l’institut d’astrophysique et de planétologie (IAPS) de Rome, a enquêté sur la glace d’eau repérée en de rares endroits sur l’astre bilobé. Certes, ce n’est pourtant pas cette molécule qui manque dans la chevelure mais supposée provenir des couches inférieures à la croute de la comète, elle se fait rare en surface. Celle-ci est beaucoup plus aride, sombre et sale, car riche en petits grains de matière organique et cependant, parfois mélangés à de petites quantités de glace d’eau, ainsi que l’ont montré les observations avec l’instrument Virtis (Visible and Infrared Thermal Imaging Spectrometer).

Dans les mesures de Virtis effectuées entre septembre et novembre 2014 (quelques semaines après l’arrivée de Rosetta), l’équipe a identifié deux plaques de glace situées dans une région nommée Imhotep (connue entre autres pour ses gros rochers, tel Cheops), sur la partie ventrale du plus gros des deux lobes caractéristiques de Tchouri. Brillant dans le visible, ces taches blanches s’étendent sur plusieurs dizaines de mètres à flanc de falaises ou dans des éboulements (voir photo ci-dessous). Selon Virtis, leur température moyenne durant cette période était de – 120 °C.

Les modélisations sur la façon dont les différents grains de glace peuvent être mélangés dans un pixel et les observations du spectromètre indiquent qu’il y avait environ 5 % de glace d’eau pure pour chaque pixel de la région échantillonnée, le reste étant principalement constitué de matériaux plus sombres. L’équipe a distingué deux tailles de grains dans les données : plusieurs dizaines de micromètres ou environ deux millimètres. Ces derniers se révèlent être plus gros que ceux qui ont été repérés précédemment à Hapi, une région du « cou » de ce noyau cométaire qui évoque aux chercheurs un canard pour le bain.

Pour l’auteur principal de ces investigations : « la variété des populations de grains glacés à la surface de la comète implique différents mécanismes de formation et aussi différentes échelles de temps de leur formation »

glace d'eau sur Tchouri

Au-dessus : la région d’Imhotep, sur le plus grand des deux lobes du noyau de Tchouri. En dessous à gauche et à droite : détails des reliefs où de la glace d’eau a été observée avec Virtis. Sur ces images prises dans le visible avec la Navcam de Rosetta les 17 (la plus grande), 20 (en bas à gauche) et 15 septembre 2014 (en bas à droite) entre 28 et 30 km de distance, les plaques de glace sont identifiables — Crédit : ESA, Rosetta, NavCam–CC BY–SA IGO 3.0

Une conséquence de l’activité cométaire et de son évolution

Les processus apparaissent plus complexes à Imhotep qu’à Hapi, où pour ce dernier les grains très fins sont associés à une fine pellicule de gel nocturne. De quelques dizaines de micromètres, ils sont communs à l’ensemble des comètes étudiées, y compris Tchouri. Quant à ceux de tailles millimétriques trouvés dans le grand lobe, ils semblent au contraire se former plus lentement et « être rarement exposés par l’érosion ».

Pour expliquer leur présence, les chercheurs ont pensé à la croissance de cristaux de glace secondaire. Cela peut se produire soit par compactage des grains de glace ou « frittage », soit par sublimation. Dans ce processus, qui a la faveur de l’équipe après que des tests aient été réalisés en laboratoire, outre qu’une partie de l’eau enfouie dans le sous-sol s’évapore sous l’effet du Soleil, une autre partie (environ 80 %), plus conséquente, n’est pas libérée et se recondenserait dans les couches sous la surface. À cela s’ajoute que le changement de structure de la glace à basse température, transition entre les phases amorphe et cristalline, apporterait de surcroît un complément d’énergie dans le processus de sublimation.

« L’accroissement des grains de glace peuvent créer des couches souterraines riches en glace de plusieurs mètres d’épaisseur, susceptibles ensuite d’affecter la structure à grande échelle, la porosité et les propriétés thermiques du noyau » explique Fabrizio Capaccioni qui dirige l’instrument Virtis et a participé à l’étude. Ces fines couches de glace démasquées par endroit seraient en réalité davantage « une conséquence de l’activité cométaire et de son évolution » et pas « nécessairement produites plus tôt dans l’histoire de sa formation ».


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