C’est la démonstration de ces chercheurs de l’Université de Glasgow : Trypanosoma brucei gambiense (Tb gambiense), le principal responsable la maladie du sommeil africaine aurait survécu pendant des milliers d’années sans reproduction sexuée. Et c’est peut-être son talon d’Achille, celui qui le mènera à sa propre extinction. Des conclusions issues du séquençage des génomes d’une grande collection de Tb gambiense, présentées dans la revue eLife et qui suggèrent d’exploiter la capacité réduite du parasite à développer une résistance à certains médicaments.
A l’origine un parasite, T.b. gambiense, transmis aux humains par la piqûre de la mouche tsé-tsé et qui aurait atteint la population humaine il y a environ 10.000 ans. La trypanosomiase africaine ou maladie du sommeil, liée à la piqûre de glossine (ou mouche tsé-tsé) et à l’introduction du parasite dans l’organisme, est toujours endémique en Afrique subsaharienne. Son incidence est estimée à 7.000 cas par an. La maladie peut être mortelle chez l’Homme. Une fois dans la circulation sanguine, T.b. gambiense peut rester dormant durant des mois ou des années sans entraîner de symptômes. Mais il peut aussi envahir le système nerveux de son hôte, entraînant alors des troubles sensoriels, moteurs, psychiques et neurologiques. Les quelques traitements disponibles à ce jour sont très toxiques et nécessitent une hospitalisation de trois à quatre semaines.
L’équipe du Dr Willie Weir montre ici que le parasite existe depuis des milliers d’années en étant asexué et que la population de parasites est donc entièrement composée de clones asexués descendant d’un même ancêtre : T.b. gambiense est donc né d’un parasite unique et, au fil du temps, des mutations se sont accumulées sur chaque copie du chromosome. En raison d’un manque de recombinaison sexuelle, chaque copie d’un gène ou allèle aurait évolué indépendamment de l’autre, selon un phénomène appelé » effet Meselson « . Théoriquement, selon cet effet, chacune des copies d’un gène évolue indépendamment de l’autre, et devrait être de plus en plus différente au fil du temps, mais, le parasite » s’en sort » en écrasant ces mutations à travers un processus de » copier-coller » de l’ADN d’un chromosome à l’autre.
Force ou faiblesse ? L’étude suggère que le parasite ne parviendra pas à très long terme à compenser cette absence de recombinaison sexuelle et que privé de la diversité génétique et de la sélection naturelle liées à la reproduction sexuée, l’espèce pourrait donc finir par s’éteindre. Ensuite, à court et moyen terme, l’identification de cette faiblesse du parasite pourrait aider les chercheurs à développer de nouveaux traitements exploitant l’incapacité du parasite à développer une résistance à certains médicaments.
Source: eLife 26 Jan, 2016 (In Press) Population genomics reveals the origin and asexual evolution of human infective trypanosomes
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