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Les fournisseurs d’accès Internet et le filtrage des spams

Publié le 11 février 2016 par Gerardhaas

Conceptual keyboard - Spam (red key)

Le fournisseur d’accès internet Free a, une nouvelle fois, été pointé du doigt pour sa politique de filtrage des publicités, jugée non conforme au principe de neutralité du net.

En l’espèce, Free a mis en place un filtre permettant de bloquer les courriels envoyés par la société Buzzee France, spécialisée dans la gestion de courriers internet de masse et identifiée comme envoyant des spams aux utilisateurs disposant d’une adresse en @free.fr

La pratique du « spamming » se caractérise par l’envoi massif de messages, notamment publicitaires, non sollicités, qui viennent encombrer la boîte du destinataire et augmenter anormalement le trafic sur les réseaux.

Free argue que « les spams encombrent inutilement les réseaux de télécommunications et, par leur volume croissant, rendent plus difficile, ou plus couteux, le maintien de la continuité et de la qualité de service ». En outre, dès lors que la société s’adresse à des particuliers, les courriels litigieux ne satisfont pas aux dispositions de l’article L34-5 du Code des postes et des communications électroniques (ci-après, le Code).

Ce dernier prévoit en effet un système d’« opt-in » en matière de communication électronique de sorte que la personne physique destinataire du message doit avoir donné son accord préalable pour le recevoir. De la même manière, elle doit pouvoir revenir de manière simple, à tout moment, sur ce consentement, selon le régime de l’« opt-out ».

Dans une ordonnance de référé du 20 janvier 2016, le tribunal de commerce de Paris a fermement condamné le système de filtrage de courriels établi par l’opérateur.

Il a rappelé dans un premier temps qu’aucune clause des conditions générales de vente de l’opérateur ne le mandate pour filtrer les messages destinés à ses clients.

Dans un second temps, le tribunal a affirmé que la société Free n’est pas chargée de veiller au respect des dispositions de l’article L34-5 du Code et que, quand bien même le voudrait-elle, elle n’en a pas les moyens puisqu’elle ne peut être informée du consentement du client destinataire, ni ne peut vérifier les possibilités de révocation de ce consentement, sauf à prendre connaissance du contenu des messages qu’elle achemine. Ce faisant, elle violerait le secret des correspondances prévu par l’article L.32-3 du même code.

Enfin, le tribunal rappelle qu’un opérateur qui prend l’initiative de filtrer certains messages plutôt que d’autres ne satisfait pas à l’obligation de neutralité de l’Internet. Ce principe fondateur garantit que les opérateurs télécoms ne discriminent pas les communications de leurs utilisateurs mais demeurent de simples transmetteurs d’information. Il permet à tous les utilisateurs, quelles que soient leurs ressources, d’accéder au même réseau dans son entier.

Ainsi, en filtrant de manière discrétionnaire des messages identifiés comme de potentiels spams provenant d’une ou de plusieurs sociétés et à destination d’une catégorie de clients seulement, les opérateurs ne se livrent pas à un traitement égal et non discriminatoire.

Alors que selon  l’étude Sourcepoint/ComScore de juin 2015, un internaute sur quatre utilise des « adblokers » en France, la question de l’avenir des publicités en ligne et des spams fait débat.

En 2013, Free avait déjà tenté d’améliorer l’expérience de navigation de ses abonnés, en introduisant dans son offre une fonction de filtrage des publicités activée par défaut. Ce blocage, mettant en péril la pérennité du modèle économique de nombres d’entreprises dépendant de la publicité en ligne, avait été vivement dénoncé, notamment par Google.

Ces tentatives de Free répondent à un besoin croissant de respect de la vie privée des internautes, qui ne souhaitent pas être importunés dans leur navigation.

Si un filtrage peut effectivement être opéré par le fournisseur d’accès internet, il ne peut être fait qu’avec l’autorisation des utilisateurs. La possibilité d’accorder un tel mandat devra être prévue dans le cadre de contrats types ou dans leurs conditions générales de vente.

Pour tout renseignement complémentaire, n’hésitez pas à contacter le Cabinet HAAS avocats.

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