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#Brexit – Le Conseil des 27

Publié le 02 mars 2016 par Michael Vincent @0vinz
A quoi ressemblerait le Conseil Européen du vendredi 24 juin 2016, au lendemain du référendum sur le Brexit, si le Royaume-Uni décidait de quitter l'Union Européenne ? Retrouvez l'épisode 1 - Le jour d'après ici

Episode 2 - Le Conseil des 27

Dans son discours de "victoire", fort du plébiscite électoral, Boris Johnson plaide pour une sortie rapide de l'Union, avant le 31 décembre 2017. Très vite, dans les matinales, à la radio, à la télévision, les soutiens du out reprennent en chœur cette demande, Michael Gove en tête. C'est une énième provocation envers le Premier Ministre : le gouvernement sait bien qu'une sortie rapide est peu probable. A ce sujet, le Cabinet avait déjà prévenu dans un rapport fin février - le processus de sortie et les négociations sous-jacentes vont prendre plusieurs années, les estimations les plus pessimistes faisant état d'une sortie pouvant s'étaler sur ... 10 ans !

Sortant de son silence, David Cameron dit prendre acte du référendum et décrit une décision "lourde et irréversible", semblant ne pas avoir encore apprécié toute la mesure du résultat. En continuant à user du registre de la peur, comme il l'a fait durant la campagne, Cameron joue une partition à contretemps. Le vote prononcé, culpabiliser les électeurs semble contre-productif et très bientôt il faudra rassembler, rassurer les électeurs du in. Ainsi que les marchés : à l'ouverture ce vendredi 24 juin, le FTSE 100 perdait déjà 9 %.

Ironie du calendrier, une réunion du Conseil Européen était prévue depuis des mois pour les 23 et 24 juin 2016. David Cameron avait bien essayé de repousser la tenue du sommet, mais ses futurs ex-partenaires ne l'entendaient pas de la même façon. Certes, tous savaient que les conditions de sortie de la Grande Bretagne auraient été le sujet de toutes les discussions, Cameron présent ou pas. Mais il fallait essayer d'avancer, la gestion de la crise des migrants étant toujours si peu satisfaisante et loin de faire consensus.

Optant donc pour la chaise vide, David Cameron aura raté son dernier Conseil en tant que véritable membre de l'Union. Évidemment, cette sortie ne sera pas actée du jour au lendemain, mais désormais sur le départ, on imagine mal le Royaume-Uni être en position de traiter autre chose que de son processus de sortie.

Ce vendredi 24 juin, les 27 le savent : ce n'est pas la dernière fois qu'ils parleront de la situation britannique. L'agenda du Conseil est remanié pour aborder la question, laissant de côté les discussions inachevées de la veille.

Aucun précédent, aucune jurisprudence. Le traité de Lisbonne prévoit bien à l'article 50 un retrait de l'Union, mais tout reste à définir en pratique. Pierre Moscovici, Commissaire Européen, le disait quelque mois plus tôt à la télévision française : il n'y a pas de plan B. " Pour nous, il n'y a qu'un scénario : le Royaume-Uni qui reste dans une Europe unie ".

Bien entendu, il ne s'agit que de la position officielle de la Commission, pour ne pas donner de grain à moudre aux partisans du out et pour éviter que d'autres pays ne s'engouffrent dans la brèche. En coulisses, un groupe de travail transversal au sein de la Commission a planché sur le sujet. Rien de conclusif malheureusement, le timing était trop serré. Cette sortie, créant de fait un précédent, doit être irréprochable.

La seule certitude, c'est que l'espoir d'une sortie rapide est illusoire : Le traité prévoit une période de négociation de deux ans une fois la demande britannique effectuée officiellement au Conseil Européen. Ces deux années n'ont que peu de chances de suffire : Le Groenland, dont la situation était bien plus simple à gérer en comparaison du Royaume-Uni, est bien sortie de la CEE en 1985, et la procédure a pris trois ans !

Le référendum terminé, la négociation commence vraiment, et elle s'annonce âpre. 2 ans pour négocier à 28 ? Impossible. Etendre la période ? Pourquoi pas, mais cela ne pourra se faire qu'avec l'accord à l'unanimité du Conseil. Et certains pays n'hésiteront pas à jouer la montre pour avoir ce qu'ils veulent ! D'ailleurs, la partie de poker menteur commence dès ce vendredi 24. l'absence anglaise est une aubaine, et certains acteurs européens en profitent pour tirer les premiers, impulser leur dynamique. La République Tchèque, notamment, considère que l'enjeu mérite un débat public. Faut-il laisser le Royaume-Uni sortir comme il peut, ou en profiter pour penser une procédure de sortie plus simple ?

Permettre une sortie rapide et des démarches simplifiées : c'est la position qui séduit certains membres de l'Union. Déjà en embuscade, les eurosceptiques de tout poil réclament eux aussi de sortir, ragaillardis du résultat britannique. Ces pressions au niveau national ont poussé certains pays membres à demander un nouveau traité, explicitant un véritable mécanisme de sortie. Une option dont la Commission se passerait bien, ne voulant pas pérenniser la démarche, et alourdir une procédure qui s'annonce déjà complexe et qui va ankyloser les sommets européens des prochaines années.

Sans vraiment convaincre les nombreux journalistes qui s'amassent près du rond-point Schuman, Jean-Claude Juncker insiste donc sur le caractère exceptionnel du patient anglais, pendant que Donald Tusk reste vague sur le contenu des discussions du Conseil auquel il vient d'assister.


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