La découverte d’une nouvelle mutation responsable d’amylose héréditaire, par une équipe de l’Assistance publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM) apporte un grand espoir de traitement pour les patients et leurs familles. Ces travaux, présentés dans la revue Nature Communications, ouvre en effet l’opportunité d’un traitement existant pour les patients atteints de cette forme de la maladie et incite à rechercher la mutation chez d’autres groupes de patients.
L’amylose héréditaire (ou familiale) est une maladie rare. 500 cas environ ont été recensés en France. La maladie, liée à une mutation génétique dans le gène TTR, touche principalement les nerfs, le cœur, et dans certains cas les yeux et les reins. La mutation entraîne une modification de la protéine codée, la transthyrétine, et ses dérivés amyloïdes toxiques se déposent dans les tissus et organes, altérant ainsi leurs fonctions. Certains cas d’amylose sont également liés à des fibrilles de transthyrétine non mutée, plus fréquents chez les sujets âgés. Cependant, dans la plupart des cas, c’est la présence d’une mutation sur le gène codant pour la transthyrétine qui est en cause.
Ici, le Dr Noémie Jourde-Chiche et le Pr Sophie Valleix identifient, en menant des investigations chez un patient et plusieurs membres de sa famille, une nouvelle mutation responsable d’amylose. Les membres de la famille atteints souffraient depuis l’âge de 25-30 ans d’une sécheresse oculaire et buccale, d’une hypertension artérielle, d’une insuffisance rénale chronique progressive pour laquelle certains ont été greffés, et d’une atteinte cardiaque. Ces patients ne présentaient aucune des mutations connues jusqu’alors pour être responsables d’amylose et présentaient un profil lipidique particulier (avec un taux bas de triglycérides et une élévation du HDL-cholestérol).
Une mutation dans l’apolipoprotéine C3 : L’équipe, de la Conception, de la Timone, en collaboration avec Cochin (AP-HP) et de nombreux autres équipes françaises, européennes et américaines a donc cherché à caractériser cette nouvelle amylose et pu identifier une mutation du gène codant pour une protéine synthétisée par le foie et impliquée dans le métabolisme des lipides : l’apolipoprotéine C3. Les membres de la famille atteints d’amylose étaient porteurs de la mutation, et la protéine mutée retrouvée dans tous les prélèvements tissulaires de ces patients.
Or il existe un traitement connu pour diminuer la synthèse hépatique de cette protéine mutée : le fénofibrate. Le traitement par fénofibrate a donc été proposé aux patients atteints, dans le but de diminuer la production hépatique d’apolipoprotéine C3 et de ralentir voire arrêter la formation des dépôts amyloïdes dans les organes. La surveillance rénale, cardiaque, et la quantification des dépôts amyloïdes par scintigraphie au cours des années à venir permettra d’évaluer l’efficacité de cette stratégie.
Enfin, la mutation de l’apolipoprotéine C3 va également pouvoir être recherchée dans les familles de patients atteints d’amylose héréditaire pour lesquelles aucune mutation génétique n’a été identifiée jusqu’ici.
Source : Communiqué AP-HM 8 mars 2016 et Nature Communications Jan, 2016 doi:10.1038/ncomms10353 D25V apolipoprotein C-III variant causes dominant hereditary systemic amyloidosis and confers cardiovascular protective lipoprotein profile