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Ziggurats

Publié le 13 mars 2016 par Aelezig

Une Ziggurat est un édifice religieux mésopotamien à degrés, constitué de plusieurs terrasses supportant probablement un temple construit à son sommet. Il s'agit du monument le plus spectaculaire de la civilisation mésopotamienne, dont le souvenir a survécu bien après sa disparition grâce au récit biblique de la Tour de Babel, inspiré par la ziggurat de Babylone. Bien que rappelant par leur aspect les édifices pyramidaux d'Egypte ou d'Amérique précolombienne, les ziggurats s'en distinguent aussi bien par leur apparence que par leur fonction.

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Choga Zanbil, Iran

Depuis la mise au jour des grandes capitales mésopotamiennes, plusieurs de ces bâtiments ont pu être analysés, même s'il n'en reste plus d'intacts, beaucoup étant très délabrés et se présentant sous l'aspect de collines, tandis que d'autres ont complètement disparu. La civilisation mésopotamienne en a également laissé peu de descriptions, que ce soient des textes ou des images. Certaines ziggurats (avant tout celle de Babylone) sont mentionnées par des auteurs grecs (Hérodote et Ctésias). Si leur aspect général est maintenant assez bien connu, il existe toujours des points d'ombre quant à leur signification et à leur fonction en l'absence de texte explicite à ce sujet.

Développement

Historiquement et du point de vue architectural, on voit couramment dans les ziggurats les héritières des édifices cultuels qui sont bâtis sur des terrasses en Basse Mésopotamie. Cette filiation a longtemps reçu des critiques, mais elle paraît aujourd'hui admise, même si les ziggurats présentent des caractères propres qui en font des édifices originaux et que des zones d'ombres persistent sur les conditions exactes de leur émergence.

Le plus ancien exemple d'édifice sur terrasse pouvant être interprété comme un temple est attesté à Eridu durant la période d'Obeid, vers -5000. Il s'agit de quatre constructions successives de taille croissante au cours du temps et de plan tripartite, ordinaire à cette époque, mais situées sur une plateforme haute de plus d'un mètre. Si ce type de construction sur terrasse basse est courante dans la Mésopotamie proto-historique, certaines constructions se distinguent par le fait qu'elles sont érigées sur une terrasse haute (en gros plus de deux mètres). C'est le cas de l'édifice d'Uruk appelé « ziggurat d'Anu » par les fouilleurs du site, une haute terrasse supportant un temple remarquablement conservé (le « Temple blanc »), déjà précédé par des édifices semblables datant de la période d'Obeid. Le temple sur terrasse haute le mieux conservé a été exhumé à Tell Uqair, en Basse Mésopotamie. Il date de la fin de la période d'Uruk et de la période de Djemdet Nasr (fin du IVe millénaire avant JC). Il est constitué de deux terrasses superposées, la première avec une façade curviligne tandis que la seconde est rectangulaire, sur lesquelles est bâti un édifice interprété comme étant un temple, encore en partie conservé.

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Ziggurat d'Ur, Irak, restaurée

Quand apparaissent les premiers édifices pouvant être qualifiés de ziggurats ? Le terme n'apparaît qu'au début du II millénaire. Les textes antérieurs à Ur III du roi Gudea de Lagash évoquent des constructions désignées par le terme sumérien giguna, qu'il faut peut-être identifier comme des temples sur terrasse, et plus précisément le temple construit sur la terrasse puisque ce terme est repris par la suite sous une forme akkadisée gigunû pour désigner le temple qui surplombe la ziggurat. Des constructions ressemblant à des ziggurats (i. e. des édifices à plusieurs étages) apparaissent sur des sceaux-cylindres dès la fin de la période d'Uruk et à l'époque des Dynasties archaïques, mais rien ne confirme qu'il s'agisse bien de temples sur terrasse car il pourrait s'agir d'autels à degré ou d'autres constructions cultuelles.

Suivant la typologie héritée de Lenzen, il est d'usage de distinguer les édifices construits sur une seule terrasse et ceux érigés sur plusieurs étages, qui seraient des ziggurats à proprement parler. Il est généralement admis que les constructions à trois étages réalisées dans les grands centres religieux de Sumer par Ur-Nammu d'Ur et son successeur Shulgi autour de -2100 sont de véritables ziggurats, même s'ils n'emploient pas ce terme (ni de terme précis) pour les désigner. Si l'on retien ce nombre de trois terrasses pour parler d'une ziggurat, cela fait de celles de la période d'Ur III les plus anciennes connues avec certitude. Même si le sujet continue de faire débat, ce minimum de trois terrasses est généralement retenu dans la définition des ziggurats.

La distinction entre les édifices à trois étages et les terrasses monumentales antérieures à un ou deux étages peut paraître artificielle dans la mesure où la filiation qui existe entre eux est difficilement contestable et en fait vraiment des édifices de même nature. Mais en même temps, si on s'intéresse à l'aspect fonctionnel de ces édifices, les ziggurats n'ont jamais la fonction de temple principal qu'ont manifestement eu certains temples sur terrasse. Leur rôle cultuel est limité voire inexistant, elles ont été conçues comme des éléments des complexes monumentaux cultuels qui émergent à la fin du IIIe millénaire dans les grands centres de culte du sud mésopotamien, où elles ont un place secondaire par rapport au temple majeur qu'elles voisinent.  

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Dur Kurigalzu, Irak

Les ziggurats de la Troisième Dynastie d'Ur (XXIe siècle avant JC)

Que les rois de la Troisième Dynastie d'Ur soient les inventeurs des ziggurats ou non, cette époque est en tout cas décisive pour le succès futur de ce genre de constructions. C'est en effet à partir des débuts de la Troisième dynastie d'Ur que les grands centres cultuels de Basse Mésopotamie sont tous dotés progressivement de ces édifices qui sont conçus selon un même modèle, bien qu'ils ne soient pas strictement identiques.

Ces constructions ont apparemment été initiées par le fondateur de la dynastie, Ur-Nammu (-2112/-2094), et poursuivies par son fils et successeur Shulgi (-2094/-2047). Quatre ziggurats au moins ont été construites, dans les principaux centres religieux du pays de Sumer, d'où provenait la dynastie : Ur, Uruk, Eridu et Nippur (peut-être aussi une autre à Larsa). Ces édifices sont construits selon le même principe : trois terrasses empilées qui supportent probablement un temple, auquel on accède par deux escaliers latéraux parallèles à la base et un grand escalier central perpendiculaire, mais leur orientation est différente. Deux d'entre elles au moins (celles d'Ur et d'Uruk) succèdent à d'anciens temples sur terrasse qui sont alors agrandis et surélevés, ce qui semble bien confirmer la filiation entre les deux types d'édifices. Ces constructions ont nécessité la mise au point de nouvelles techniques de construction, et la mobilisation de nombreux travailleurs. Si on s'intéresse au contexte de réalisation de ces édifices, on remarque qu'ils s'inscrivent dans la politique de grands travaux mis en œuvre par les souverains de ce véritable empire dominant alors toute la Mésopotamie, et servi par un appareil bureaucratique et une foule de dépendants qui atteint des quantités jamais atteintes auparavant. Cela explique pourquoi ces quatre ziggurats sont construites selon un même modèle presque standardisé, en quelque sorte « en série ». Plus largement, les rois d'Ur III ont particulièrement insisté sur l'aspect religieux de leur rôle, mis en avant dans plusieurs hymnes royaux et par leur « divinisation », et l'édification des ziggurats sous cette dynastie est sans doute à replacer dans ce contexte idéologique.

Les ziggurats aux IIe et Ier millénaires

Après l'effondrement de la Troisième Dynastie d'Ur vers -2004, la construction de ziggurats se poursuit sous l'impulsion des rois d'origine amorrite des États de la Basse Mésopotamie du début du IIe millénaire, qui ont l'habitude de reprendre les traditions héritées de leurs prestigieux prédécesseurs sumériens. Il est souvent difficile de savoir à qui attribuer la construction ou la reconstruction des ziggurats fouillées sur des sites, que l'archéologie ne peut généralement que dater d'une période générale. Des inscriptions de fondation et d'autres textes royaux commémorant la construction ou la restauration d'une ziggurat peuvent aider à situer plus précisément la date de travaux observés lors de fouilles, mais il n'y en a que pour une minorité de cas. Les rois amorrites à qui peuvent être attribués une grande activité de construction de ziggurats sont ceux de la première dynastie de Babylone. Le plus célèbre d'entre eux, Hammurabi (-1792/-1750), a construit ou reconstruit celle de l'Ebabbar de Larsa (dédié au dieu-soleil Shamash) d'après ce que rapporte une inscription postérieure de Nabonide qui a restauré à son tour cet édifice. Mais c'est son fils Samsu-Iluna (-1749/-1712) qui a laissé des textes sur la construction de ziggurats : une inscription de fondation commémorant la construction de celle de l'Ebabbar de Sippar (autre grand sanctuaire du dieu-soleil), célébrée aussi dans le nom de sa dix-huitième année de règne ; et une autre rapportant des travaux sur la ziggurat de Kish dédiée à Zababa et Ishtar. Le premier état de la ziggurat de Babylone est également attribuable à un de ces souverains, et sans doute aussi celles des villes voisines de Borsippa et Akkad. Les premières ziggurats de Haute Mésopotamie sont construites vers le début du XVIIIe siècle à Tell Rimah (sans doute l'antique Qattara) et à Assur pour le dieu tutélaire de la ville, Assur. Le meilleur candidat pour leurs constructions est le roi Samsi-Addu (-1815/-1775), qui a laissé une inscription commémorant celle d'une troisième ziggurat dans la région, à Ninive où elle n'a pu cependant être repérée sur le site même. En Elam, la ziggurat de Suse est attestée par des inscriptions de souverains du début du XVIIIe siècle et milieu du XVIIe siècle. 

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Tentative de reconstitution de la ziggurat d'Ur

Durant la seconde moitié du IIe millénaire, de nouvelles ziggurats sont bâties, alors qu'on continue d'entretenir les précédentes. En Babylonie, un des deux rois kassites nommé Kurigalzu en érige une dans sa nouvelle capitale éponyme, Dur-Kurigalzu (Aqar Quf). D'autres rois kassites restaurent des ziggurats, et celle de Babylone est agrandie, peut-être sous le règne de Nabuchodonosor Ier (-1126/-1105). Les rois assyriens de la même période construisent plusieurs ziggurats en même temps qu'ils restaurent celles déjà existantes. Deux ziggurats connues par les fouilles sont bâties dans le temple double d'Anu et Adad à Assur (ce qui fait en tout trois ziggurats identifiées par l'archéologie dans cette ville), et une autre à Kar-Tukulti-Ninurta, ville nouvelle fondée par Tukulti-Ninurta Ier (-1245/-1208). Une inscription du roi assyrien Salmanazar Ier (-1275/-1245) rapporte la restauration de plusieurs temples. Au même moment, plusieurs sont construites dans le royaume élamite (dans le sud-ouest de l'Iran actuel), à commencer par celle de la nouvelle ville fondée par le roi Untash-Napirisha (-1345/-1305), Dur-Untash (Chogha Zanbil). Des inscriptions de ce même royaume mentionnent qu'il existait à cette période deux autres ziggurats, dans la grande ville de Suse et peut-être aussi sur le site de Chogha Pahn.

Les rois assyriens de la première moitié du Ier millénaire restaurent à plusieurs reprises les anciennes ziggurats, et deux d'entre eux en construisent des nouvelles dans les capitales qu'ils bâtissent pour leur royaume, ce type d'édifice étant indispensable pour une grande ville mésopotamienne : Assurnasirpal II (-883/-859) en fait construire une à Kalkhu (Nimrud) vers -870, Salmanazar III (-858/-824) est peut-être à l'initiative d'une autre sur le site de Tell el-Hawa, et Sargon II (-722/-705) en fait ériger une à Dur-Sharrukin (Khorsabad) à la fin du VIIIe siècle. Le roi Assarhaddon (-680/-669) fait bâtir ou restaurer la seconde ziggurat d'Uruk, dans le sanctuaire d'Anu. Plusieurs grandes ziggurats existantes en Basse Mésopotamie sont restaurées voire agrandies par les souverains Assyriens et Babyloniens de la première moitié du Ier millénaire. La mieux connue est la ziggurat de Babylone, Etemenanki, remaniée entre le VIIe siècle et le début du VIe siècle par les rois assyriens Assarhaddon et Assurbanipal (-669/-627) puis les babyloniens Nabopolassar (-626/-605) et Nabuchodonosor II (-605/-562), marque l'aboutissement de ce type de constructions. 

Des listes de ziggurats classées par villes ont été trouvées sur deux tablettes dont les exemplaires datent de la période néo-assyrienne et de la période néo-babylonienne, mais qui sont probablement des copies de textes plus anciens. Elles listent respectivement 22 et 23 ziggurats pour les sites de Basse Mésopotamie uniquement. Mais elles entrent parfois en contradiction avec les découvertes archéologiques, donnant notamment plusieurs ziggurats pour des sites où une seule a été repérée, comme à Nippur, et leur interprétation est donc difficile. Il pourrait en tout y avoir eu une trentaine de ziggurats en Mésopotamie (une vingtaine avec certitude) et trois en Élam, construites entre la fin du XXIe siècle et le VIIIe siècle, en sachant qu'il pouvait en exister d'autres dans des sites non fouillés et non attestées par les textes. De plus, il y a parfois des divergences chez les archéologues pour savoir si la construction en présence est une ziggurat ou un temple sur terrasse, en raison des problèmes de définition évoqués précédemment, notamment pour des édifices dont les fouilles sont anciennes et qui datent de la période archaïque : c'est le cas de la première « ziggurat d'Anu » d'Uruk, qui correspond plutôt à un temple sur terrasse, ou bien des deux « ziggurats » du Tell Inghara à Kish, dont les ruines ne sont pas suffisantes pour les caractériser ainsi. 

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Côté de la ziggurat d'Ur

La fin des ziggurats

Les ziggurats de Babylonie continuent à être entretenues au moins jusqu'à la chute du royaume de Babylone en -539. Ces édifices suivent le destin de la tradition religieuse mésopotamienne qui s'étiole lentement durant la seconde moitié du Ier millénaire. Les derniers grands travaux entrepris sur des ziggurats se situent à Uruk durant la période séleucide, au milieu du IIIe siècle, quand la ziggurat de l'Eanna est réaménagée et celle du nouveau complexe cultuel du dieu Anu est construite à partir des ruines d'une plus ancienne. Parallèlement, il semble que celles de Babylone et la principale d'Assur continuent à avoir un rôle cultuel. Elles cessent de fonctionner aux alentours de 100. Il est manifeste que la plupart des ziggurats sont progressivement tombées en ruine après la chute des empires mésopotamiens, n'étant plus entretenues. Certaines sont reconverties pour un temps en forteresse à l'époque parthe, à Nippur et peut-être à Assur. Toutes les ziggurats sont finalement abandonnées comme la plupart des anciennes grandes villes mésopotamiennes où elles se trouvaient et souvent leurs briques ont été utilisées comme matériaux de construction par les populations vivant à leur proximité. Cela n'a pas empêché certaines de rester encore impressionnantes malgré l'épreuve des siècles et de susciter encore l'imagination des voyageurs... 

D'après Wikipédia


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