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Schéma contre paillettes avec colère et combativité, ou le SDRIF bouge encore…

Publié le 13 juin 2008 par Jean-Paul Chapon

Il régnait une étrange atmosphère mercredi dans la salle du Conseil Régional où l’on attendait l’avis de la Commission d’enquête sur le SDRIF (le Schéma Directeur de la Région Ile-de-France), petit suspense et avis favorable à l’unanimité des 19 membres de la Commission annonce son Président Jean-Pierre Chaulet. Quelques applaudissements dans la salle, qui ne parviennent pas à réchauffer l’ambiance de ce « moment important » comme le souligne Jean-Paul Huchon, le Président PS de la Région, porteur de ce SDRIF avec Mireille Ferri vice-Présidente Verte à ses côtés. Et lorsque Huchon ajoute qu’il s’agit aussi d’un moment « de joie », on a du mal à le croire tant la joie semble intérieure. Beaucoup de tension et de colère que le Président de la Région Ile-de-France laissera éclater lors du point presse qui suivra la présentation de l’avis de la Commission d’enquête.
De l’avis de la Commission d’enquête…

Dans leur communiqué de presse, Jean-Paul Huchon et Mireille Ferri regrettent à propos de l’attaque de la veille de François Fillon, que « le Premier Ministre veuille ignorer l’opinion de l’ensemble des Franciliens ». Belle figure de style, mais restons modestes. Certes l’élaboration du SDRIF a été l’occasion d’une large concertation, « on n’a pas agité tout le Landernau de l’Ile-de-France pour rien » dira même Huchon, certes il y a eu la plus grande enquête publique dit-on avec une durée de 55 jours et des bureaux dans 187 lieux de la région, mais la Commission n’a reçu en tout et pour tout que « 5021 lettres ou observations ». Rapporté à une population de près de 11 millions de personnes… Et encore comme me l’a précisé Jean-Pierre Chaulet, les réponses individuelles de citoyens sont minoritaires.

Mais les thèmes abordés par ses réponses sont tout de même intéressants. Sur ces plus de 5000 remarques, 60% concernent les transports. D’où la première recommandation de la Commission qui « estime que la place faite à l’économie et aux transports mis en avant dernière et dernière priorités du SDRIF ne correspond pas à l’idée qu’elle se fait des priorités à retenir, nomment s’agissant des transports mis très largement en tête des préoccupations exprimées par les Franciliens et Franciliennes et souhaite que cet ordre soit reconsidéré. »

Cette recommandation est complétée par la 5ème. « La Commission d’enquête considère que la gestion des voies routières et des infrastructures ferroviaires ne tient pas suffisamment compte des blocages et saturations constatées actuellement et recommande que les priorités retenues soient davantage liées à ces facteurs ». Et fin de la recommandation qui ne peut que satisfaire la campagne que Paris est sa banlieue avait essayé de lancer* puisque la Commission demande « en outre à ce que le projet phare que constitue le projet « Arc Express Régional**» compte tenu des attentes des populations concernées et de la durée de sa réalisation soit davantage mis en exergue. Elle recommande donc « qu’Arc Express » soit affiché comme la priorité absolue au niveau des transports de ce futur SDRIF ». Et décidément, cette rocade à du mal à passer pour Jean-Paul Huchon, qui lorsqu’il en reparle pendant la conférence de presse, rappelle avec une vivacité retrouvée qu’avec la Tangentielle Nord « on est déjà dans l’actualité !  »

Un autre point important concerne le logement, pour lequel la Commission « pense que la simple « reconstruction de la ville sur la ville » ne suffira pas à réaliser 60.000 logements par an et que des mesures incitatives fortes devront être prises pour atteindre l’objectif visé. » Intéressant par rapport à la conjoncture actuelle, face au besoin inéluctable de trouver du foncier, elle demande que les zones agricoles soient « davantage sanctuarisées » pour les terres ayant une vocation agricole indiscutable.

Au total 15 recommandations***, qui ne sont pas obligatoires, mais qui pèseront dans les décisions finales concernant le SDRIF. D’ailleurs Jean-Paul Huchon a bien insisté sur le fait qu’il veillerait à suivre ces recommandations, à commencer par le changement de l’ordre de priorité concernant l’économie et les transports. Et Jean-Paul Huchon de faire remarque que les transports sont tellement une priorité pour lui qu’il a même organisé une conférence de presse le 19 juin prochain pour présenter son plan de 17 milliards, annoncé en réponse aux 300 millions du Président de la République pour le RER A…

Bref, la Commission d’enquête a émis 4 réserves, « réserves de forme » insiste Jean-Paul Huchon qui s’engage à les lever, condition sine qua non pour que le SDRIF l’avis de la Commission ne passe pas de favorable à défavorable.
De façon étonnante, c’est le Président de la Commission qui parle le plus région développement et urbanisme, car ensuite, on s’enfonce dans le politique ou plutôt dans le politicien de la plus belle (?) espèce.

… à une conférence de presse à l’atmosphère particulière

Au Premier Ministre qui a fait parvenir une lettre dénonçant le manque d’ambition du SDRIF et menaçant de ne pas adopter le texte l’état, Jean-Paul Huchon répond qu’ « on lui a encore fait écrire des bêtises, comme il y a un an… on lui a encore fait faire une erreur d’appréciation ». Et, sans être nommé, « on » reviendra souvent planer dans la salle de conférence. Le Président de la région en appelle au respect de la loi et annonce combatif qu’il a mobilisé 3 juristes pour dire quel est le pouvoir réel de l’Etat d’arrêter le SDRIF. Le ton monte, Jean-Paul Huchon s’échauffe, « je ne suis pas comme mes adversaires qui ne font rien d’autre que de paralyser la région… Ils insultent l’avenir et vont contre les Franciliens. »

Et lorsqu’un journaliste envisage la possibilité que le SDRIF ne soit pas adopté, Jean-Paul Huchon réplique que « ça fait quatre ans qu’on a commencé, on ne vas pas attendre le bon vouloir de quelqu’un pour se mettre à travailler… sinon on organise l’effondrement de cette région pour de basses raisons politiques. » Le ton est donné. A Béatrice Jérôme du Monde qui revient sur la lettre de François Fillon, Jean-Paul Huchon tonne « on nous bourre le mou avec des chiffres qui ne tiennent pas la route, je pense qu’il vaut mieux s’en passer ».

Bref, si l’Etat veut être un partenaire d’accord, d’ailleurs que ce soit Jean-Paul Huchon ou Jean-Pierre Chaulet, les deux ont dès le début insisté sur le travail fait en partenariat avec l’Etat, l’avancée sur certains point bloquants, comme les autoroutes, pour lesquelles l’Etat a renoncé à certaines prétentions sur l’A12 notamment. Mais sinon, c’est la guerre ou ça y ressemble, parlant même de « trois agités dans un bocal » qui ont poussé le Premier Ministre à écrire, « et ces trois agités dans un bocal, on les connaît, il ne sont pas loin d’ici… » (ici en l’occurrence, c’était rue Barbet de Jouy ) et emporté dans son élan, Jean-Paul Huchon énervé assène, « on va faire mieux que les trois mois de paillettes, danses et chants » avec les 10 équipes sélectionnées la semaine dernière pour réfléchir au Grand-Paris. Sybille Vincendon de Libération pose alors à Jean-Paul Huchon une question « personnelle », lui demandant si « personnellement » il a lu les notes d’orientation stratégiques et méthodologiques des 10 équipes pour parler de « pailletes, danses et chants » ? Réponse « moi j’ai le SDRIF à lire, c’est long… on est dans la libre expression du désir, du plaisir… » et après avoir cité le nom de Roland Castro, de comparer le travail de 4 ans avec celui à venir de trois mois, « il y a plusieurs manières de gouverner ».

Et le Président de la région de conclure « Moi j’ai fait un schéma, on peut dire que ce n’est pas assez ambitieux, les électeurs jugeront, et je préfère que ce soient les électeurs qui jugent et pas les journalistes. » Il y avait vraiment une étrange atmosphère mercredi après-midi rue Barbet de Jouy.

Jean-Paul Chapon

* merci au passage aux médias que j’avais contactés de ne pas avoir relayé quoi que ce soit, mais il est vrai qu’à ce moment ils n’avaient pas encore découvert l’existence des transports en commun et de leur état…

** Arc-Express est le nom donné par la Région au projet de métro de rocade de banlieue, appelé Métrophérique par la RATP.

*** Les documents devraient bientôt être en ligne, j’actualiserai la note à ce moment. Quant au communiqué sur le site de la région, il y a visiblement un webmaster et/ou un service de presse qui devrait faire plus attention ;-)


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