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quel projet sociétal commun pour notre pays ?

Publié le 21 mars 2016 par Mister Gdec

question

La guerre de tous contre tous, seul horizon indépassable ?

A force d’être dans la radicalité permanente, chacun dans son camp, dans son coin, selon ses spécificités, ses origines, son positionnement social, culturel, idéologique, voire spirituel,  et donc selon la nature de ses combats favoris, on perd le sens des priorités générales, et à mon sens, des réalités. Les féministes radicales refusent à quiconque le droit de parler pour elles, et parfois même, avec elles. Les anti-racistes à la sauce du PIR refusent aux « non-racisés » de parler d’anti-racisme, et leur dénient même le droit de s’associer à leurs luttes, sous prétexte qu’ils sont blancs. Ou pas noirs, pas arabes, pas des cités, pas musulmans, pas femmes, pas pauvres, etc etc…. Les républicains ¹ méprisent tous ceux qui voient bien à quel point cette doctrine si confortable et dépassée sert d’alibi à une certaine forme de racisme larvé, non avoué, et intolérant. Ils rejettent les anars, les libertaires, les croyants (d’ailleurs plus volontiers s’ils sont musulmans que catholiques intégristes qui eux font plus partie de leur univers mental traditionnel), les athées militants, l’extrême gauche, les socialistes pour de vrai, la gauche critique et de transformation sociale, etc… Les gauchistes, dans leur majorité,  rejettent pour une bonne part ceux qui ne soutiennent pas Mélenchon, faute d’autre solution politique immédiatement mobilisable. Ou alors ils se réfugient dans leurs groupuscules avec la seule ambition de ne surtout rien changer à leurs habitudes de penser et d’agir,  de ne pas faire poids, ce qui conduit à une certaine forme de conformisme excluant. Les anars discriminent d’emblée, et crachent sur tous ceux qui ne le sont pas, tout aussi prisonniers de leurs préjugés.  Les catholiques n’aiment pas les musulmans. Leur part extrêmement traditionaliste déteste les trois quarts de l’humanité. Les musulmans ont du mal avec les catholiques, et pour certains encore plus avec les juifs, et ne supportent pas ces ultimes mécréants que sont les athées. Les intégristes religieux se rejoignent dans leur haine des athées et des homosexuel(le)s, et dénient aux femmes le droit d’avoir un avis politique et personnel contradictoire tout aussi éclairé que le leur, surtout si elles refusent, à juste titre,  la domination masculine.. Chacun à sa place, n’est-ce pas, dans le schéma  culturel archaïque, et les cochons seront bien gardés. Les riches, les catégories aisées, majoritairement à droite (mais il y en a aussi dans une certaine gauche vallsiste et hollandaise) ainsi que les libéraux pur jus méprisent les pauvres, les chômeurs, les « bénéficiaires » (sic) d’aides sociales, les gauchistes, les socialistes réels, les arabes, les étrangers (sauf s’ils sont riches, ce qui  les rend plus fréquentables),  les anars et libertaires. Ils  se méfient de la jeunesse à laquelle ils refusent le moindre esprit de responsabilité et d’information pertinente, comme on l’a vu très clairement dans le cadre de la mobilisation de la loi El Khomri. Tant de mépris d’une certaine classe est sidérant. . Ils  rejettent en fait sans autre forme de procès tout ce qui risquerait de nuire à leurs intérêts si personnels, et si désespérément matériels. Les pauvres jalousent, raillent  et méprisent les riches, allant parfois  jusqu’à se lâcher dans  la haine. Une frange non négligeable d’entre eux vont jusqu’à se demander si les étrangers, même s’ils ont la nationalité française d’ailleurs, ne seraient pas mieux lotis qu’eux, ne bénéficieraient pas de passe-droits, ce qui est bien évidemment faux. Les patrons ne supportent pas les syndicats, et voient d’un mauvais œil le simple fait d’être syndiqué. Ceux qui contrarient leurs intérêts sont forcément de dangereux communistes le couteau entre les dent, et ils les renvoient volontiers à leur passé stalinien ou sibérien… Une grande partie des personnalités politiques prennent les électeurs pour des cons qui n’ont rien compris s’ils s’opposent à eux, sous le prétexte pas toujours avoué qu’ils n’ont pas quant à eux, ces manants, fait l’effort de s’engager publiquement. Une bonne part des français, surtout à droite et son extrême,  méprisent parfois jusqu’à l’insulte les fonctionnaires… jusqu’à ce qu’ils aient besoin d’eux. etc etc….etc.. On pourrait multiplier à l’infini les exemples de tensions entre telles et telles catégories françaises engagées, ou pas.

Résultat : la France est aujourd’hui le théâtre d’une guerre insoluble de tous contre tous. Clans contre clans. Caste contre caste. Corporation contre corporation. Religion contre religion. Combat social contre un autre combat social. Famille politique contre autre famille politique…. Orientation sexuelle contre autre orientation sexuelle, même entre adultes pourtant consentants. Femmes contre homme ou l’inverse. Partout où je vais, où je milite (ou plus), dans les discussions publiques, professionnelles ou personnelles, je vois bien à quel point les tensions sont palpables, et combien les gens sont à fleur de peau. Le débat serein devient de plus en plus difficile. L’intolérance et  l’agressivité prennent un peu trop vite le dessus, partout, même chez ceux qui se prétendent humanistes. Le respect des opinions différentes devient de plus en plus problématique.  Moi qui fréquente si abondamment les réseaux sociaux, je vois bien à quel point il est difficile d’y échapper. Et à quel point une masse non négligeable ne supporte plus la moindre contrariété, la moindre divergence, la moindre parole différente, pourtant le point clé nécessaire au débat intelligent. Je m’inclus également dans ce constat, n’étant nullement irréprochable et encore moins chevalier blanc.  Alors, je me pose la question. Qu’est-ce que nous  avons raté, collectivement ?  Quelle est la part d’irresponsabilité des politiques de tous bords dans cette perception ? Pourquoi le fait de simplement évoquer le sujet éminemment politique et le désir personnel de mieux vivre ensemble en toute sérénité est-il devenu un sujet de moquerie plutôt que de convergence ? Pourquoi les religions, dont la vocation principale devrait pourtant consister à cultiver l’amour de son prochain sont-elles bien plus souvent des facteurs de propagation de haine et d’exclusion, de discrimination, de domination ? Le fait de rejeter la faute sur l’Autre tient-il la route une seule seconde, et cela ne relève-t-il pas de la malhonnêteté intellectuelle ? Les grandes idéologies d’autrefois, qu’elles se nomment esprit républicain, amour de la patrie ou appartenance religieuse et politique ne font plus sens, ne font plus corps, ni société commune.  Seul l’argent, l’appât du gain, si possible facile, semblent constituer le dernier moteur d’une société en pleine régression sociale, minée par cette haine de tous contre tous. Sans vouloir jouer les vieux cons que pourtant je suis en regard du seul critère de mon âge, même le respect n’est plus une valeur commune. La génération lol cat, désabusée, railleuse, cynique, qui joue si volontiers les trolls en disant noir un jour et blanc le lendemain, et gris s’il est pris en tenaille par la cohérence de l’argumentation, est en train de creuser sa tombe, dans ce tableau duquel elle n’est pas sans responsabilité commune, à force de se moquer de tout… Nous avons tous une part de responsabilité. Mais loin de me lamenter, je cherche une véritable issue, convaincante. Et maintenant, ayant écrit tout cela, on en sort comment ? Il est temps de se bouger les fesses, car aucune société n’a jamais été depuis ces dernières années aussi enfermée dans un cul de sac sociétal, où plus aucun discours n’ouvre de perspectives d’évolution, mais juste, ce qui est assez médiocre,  d’adaptation à la réalité comme elle va, c’est à dire mal, sous couvert fallacieux d’un pragmatisme de bon aloi qui n’est que le sien. La question politique centrale, aujourd’hui, m’apparait donc celle-ci : comment vit-on ensemble en bonne intelligence, si possible bien, avec un minimum de dignité, sans être sur le seul registre de la peur qui entraîne bien souvent la haine de l’autre ? je n’ai pas de réponse à cette question, qui me dépasse grandement. Juste un ressenti. Une poursuite de ma réflexion si personnelle…

¹ Républicain ? Il conviendrait de définir ce que cela veut dire,  tant ce vocable est particulièrement élastique, prête à confusion,  puisqu’il va de la gauche souverainiste à l’extrême droite en passant par les nationalistes de tous bords… Et que certains se disent républicains alors qu’ils sont racistes, xénophobes, islamophobes, ce qui m’apparait au regard de sa devise, particulièrement peu fraternel et égalitaire… Et manque également de de respect inconditionnel  de la liberté.


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