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La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

Par Rambalh @Rambalh
Me voilà relancée dans le partage de mon ressenti du moment. C'est un texte un peu décousu, qui part dans tous les sens sans réellement approfondir un point en particulier mais j'avais envie d'aborder le sujet.
Aujourd’hui, je vais vous parler d’un sujet qui me taraude : éditer de la daube parce que ça se vend et, surtout, participer à cet engrenage malsain en tant que critique amateur.
C’est en écrivant une chronique sur une saga mal écrite et sans profondeur que j’ai eu envie de faire cet article, après avoir discuté du sujet au cours de ma lecture avec mes potos lecteurs. Maintenant, certains éditeurs (principalement américains j’ai l’impression), se contentent de publier des ouvrages médiocres parce qu’ils savent qu’ils les vendront. Pourquoi travailler sur la qualité quand on est déjà assuré de la quantité ? Prendre le lecteur pour une bonne poire avec un porte-monnaie, c’est « moderne ». Si on semble épargné en France avec nos maisons d’édition plus modestes, celles qui traduisent en masse les ouvrages bien vendus à l’étranger entrent tout de même dans cet engrenage malsain. Mais pourquoi est-ce que ça fonctionne ?
La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

Quand on écrit un texte de bit-lit/urban fantasy/young adult fantastique, si on est mauvais, ce n’est pas bien grave parce qu’à coup de grandes campagnes de pub, la maison d’édition saura soutirer de l’argent aux pauvres lecteurs qui aiment ça et ont, malheureusement, appris à se contenter du médiocre. Pourquoi se fouler à donner une histoire bien écrite quand quelque chose de moyen à mauvais se vend quand même ?
L’exemple le plus actuel vient avec toutes ces fan-fictions qui deviennent des best-sellers : les lecteurs font fi de la forme pour se concentrer sur le fond. Mais réveillez-vous ! Vous méritez mieux ! On vous considère comme un sous-lectorat alors que, par le slip de Merlin, vous avez tout aussi droit à un beau texte qu’un amateur d’essais philosophiques. Encore une fois, on fait de l’argent sur le dos de personnes qui ne savent pas qu’elles peuvent demander mieux… Et ça m’écœure. Je ne critique pas ceux qui aiment ces livres, loin de là, je crache par contre mon dégoût au visage de ceux qui ne font pas l’effort d’offrir de la qualité à un lectorat fidèle et qui paye.
Et ça ne concerne pas uniquement ces genres. C’est un peu le même combat en littérature jeunesse : sous prétexte que l’on s’adresse à des enfants ou des adolescents, on fait parfois moins d’efforts. Pourtant, les lectures font elles aussi partie des petites briques que l’on utilise pour se construire. Certains genres semblent même s’être fait une raison et c’est triste : la Littérature du Terroir, par exemple, avec ses histoires à base de terres arides à faire revivre et de pauvre veuve fatiguée qu’un bel ingénieur agronome va aider… Certains auteurs ne se foulent plus, débitant trois/quatre livres à l’année avec un lectorat ciblé et fidèle, parce que ça fonctionne comme ça et que changer n’est pas utile.
La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

On mérite mieux que ça ! Seulement, on a aussi le droit de s’en contenter mais, là aussi, le bât blesse. Rares sont les personnes qui assument lire des ouvrages qui sont franchement peu recherchés et mal écrits parce qu’on entre alors dans le débat sans fin de la qualité de la lecture. Il y a, en France en tout cas, une idée assez vilaine qui dit que lire de la littérature dite « bas de gamme » c’est Le Mal. Mais à quel moment a-t-on commencé à laisser ce clivage bonne lecture (celle qui fait réfléchir et est écrite avec des mots compliqués) - mauvaise lecture (comprendre qu’elle n’est pas faite de tous les effets de style nécessaires à la masturbation intellectuelle) prendre de l’importance ? Sûrement depuis des décennies.
Hiérarchiser les lectures est encore et toujours un moyen de se situer au-dessus des autres. Si ce n’est pas ce sujet que je souhaite aborder, il touche tout de même mon problème du doigt : puisqu’il y a une sorte de jugement dans le regard des autres quand on expose ses lectures, on cherche à se justifier. Et c’est bien dommage de 1) parce que chacun lit ce qu’il veut quand il veut quoi qu’en pensent les autres, de 2) parce qu’on en vient à mentir sur la qualité de l’ouvrage que l’on lit.
Quantité, Qualité, Honte, Masse l’Hypocrisie quand nous prend pour pigeons sans cervelle.
Rienafoutr' de ce que les autres pensent !

Je voudrais militer pour le droit à lire de la merde, mais ce, en toute honnêteté. Combien de fois me suis-je retrouvée avec un livre entre les mains parce que je n’en avais entendu que des éloges alors, qu’en fait, c’était terriblement mauvais ? Pourquoi ne pas assumer avoir aimé un livre moyen à mauvais pour ne pas berner les personnes suivantes ? On a le droit d’aimer un livre bancal. On a le droit de dire « c’est mal écrit, c’est cliché, niais, mais j’aime ».
Par pitié, copains de la sphère des critiques amateurs du web, arrêtez de berner le monde à coup de « c’est un super livre » parce que vous n’assumez pas de lire de la daube. Soyez honnêtes. Permettez aux suivants de savoir à quoi s’attendre. Ce n’est pas un crime d’aimer quelque chose de mauvais. Ce n’est pas honteux de payer 20 euros pour un livre écrit avec les pieds (c’est de vous le vendre qui est honteux). Par contre, participer à cette mascarade en faisant croire que chaque livre pourri est le livre du siècle, c’est arnaquer la moitié du lectorat, cette moitié qui refuse de se contenter du médiocre ou qui n’a pas envie de mettre ces 20 euros dedans. Parce que la prochaine fois que je lis un livre en m’attendant à quelque chose de chouette parce que j’ai lu une super chronique dessus alors, qu’en fait, la chronique n’était pas honnête, je trucide le responsable sur la place publique (bon, ok, peut-être pas, mais attention tout de même).
La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

Et petit point mineur dans cet article mais non dans la vie : j’ai vu des gens se sentir mal parce qu’ils n’avaient pas aimé ce que la Masse glorifie… MAIS NON ! Chacun ses goûts, ses envies, ses préférences… Mais, surtout, il faut garde en tête que, en plus, certaines chroniques ne sont pas complètement honnêtes (et cela parfois en toute inconscience). Vive la pluralité des goûts, elle fait de ce monde quelque chose de beau est d’intéressant ! Affichez haut et fort vos différences, elles font ce que vous êtes et elles permettent de vrais débats et non une simple surenchère d’avis mielleux. N’ayez pas peur d’avancer à contre-courant, moi, je vous aime quand vous écrivez avec vos tripes. Et dans le même ordre d’idée : n’ayez pas honte de vos lectures ! Assumez-les jusqu’au bout, sans rougir.
La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

La Masse n’est pas un gros mot, et en faire partie n’est pas un problème. Cette Masse est ce qui nourrit ces pratiques honteuses : on nous habitue à de la qualité bancale et on finit par ne plus savoir, à titre personnel, ce qui est bon ou mauvais pour nous, ce qu’on attend personnellement d’un livre.
J’ose vous demander, gens de la sphère des critiques amateurs du net, d’être plus honnêtes avec ceux qui vous lisent, d’assumer aimer des choses qui, franchement, ne sont pas bonnes. Je le fais personnellement. J’essaie de tempérer mes émotions quand je m’emballe pour un livre et que je sais que ce qui fonctionne sur moi ne peut pas forcément fonctionner sur les autres. Faites-en de même. Merci.
Je hiérarchise mes lectures en fonction de leur qualité mais aussi de mon ressenti. Et cette hiérarchisation m’est personnelle. Je ne demande à personne d’y adhérer, au contraire. Et, surtout, je n’autorise personne à venir taper dans mon échelle de lecture comme un gamin dans une fourmilière. Chacun est libre d’aimer ce qu’il veut, de préférer Marc Lévy à Victor Hugo, Tolkien à Bottero. Le but d’un livre est de nous transporter, de nous faire voyager et réfléchir. Qu’importe si c’est grâce à Oui-Oui fait de la peinture avec un pinceau en poils pubiens que vous atteignez la plénitude, tant que vous ne nous dites pas « Oh la la cette idée est brillante et c’est le texte le mieux écrit de tous les temps ».
PS : Résistons face à la médiocrité pour faire des sous ! Affirmons haut et fort qu’on mérite mieux ! Et assumons au passage si on ne souhaite pas mieux. Mais, surtout, lisons ce que l’on veut quand on le veut !
La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

PPS : Si tu veux venir débattre avec d'autres passionnés, n'hésitez pas à rejoindre le sujet sur A&M;.

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