Pour la production annuelle de son opéra studio, le Bayerische Staatsoper a invité le metteur en scène hongrois Róbert Alfödli qui fut jusqu´en 2013 le Directeur du Théâtre national hongrois. Si la musique et le chant enchantent et font honneur à la partition de Britten, la mise en scène d´Alföldi, les décors de Ildikó Tihanyi et les costumes Fruzsina Nagy rendent une vision fort lissée du livret d´Eric Crozier. La couleur grise du décor et son dépouillement correspondent sans doute bien au manque d´ âme d´un village dont les habitants se corsètent dans une morale rigoriste, mais la construction sur scène d´une espèce de ruelle marchande, bordée de probables échoppes verrouillées par des stores de fer qui se termine par un escalier, réduit encore l´espace scénique déjà restreint du Cuvilliés, -un théâtre de cour du 18ème siècle-, ce qui contraint les chanteurs à ne souvent chanter qu´en rang frontal. Les costumes blancs dont tous les personnages sont revêtus pour la remise de prix au rosier désigné uniformisent les chanteurs, au détriment de la personnalisation de leurs rôles. Seul élément plus coloré, des pommes rouges viennent constamment animer le décor: elles symbolisent la bonté d´Albert qui en distribue quelques-unes au public d´entrée de jeu; pendues à des fils qui descendent des cintres, elles figurent à elles seules les marchandises de l´épicerie: placées sur des tables elles font office de collation pour le banquet, et, enfin, elles dévalent l´escalier au troisième acte pour marquer la débâcle finale. Les effets comiques de la mise en scène sont plutôt réussis, ainsi que la création d´une Lady B hyper caricaturale, mais on sort de la représentation avec l´impression d´un lecture trop superficielle du livret tiré de la nouvelle de Maupassant, Le rosier de madame Husson. Le personnage d´Albert est traité comme celui d´un adolescent timoré et très docile, opprimé par une mère castratrice, ridiculisé en rosier, habillé en rosière avec une couronne de fleurs d´orangers et un voile de communiante, et qu´un peu d´alcool va libérer de l´emprise maternelle et d´un contrôle social des plus rigide. Bien sur, il s´agit d´on opéra comique, mais il y avait davantage de nuances et de profondeur psychologique à tirer du livret et du texte de Maupassant. qui sait "peindre des personnages entre médiocrité et démesure, ces existences minuscules dévorées par une ambition folle, un défaut ou une obsession qui vont peu à peu prendre des proportions inouïes et les conduire à leur perte." (extrait d´une interview de Marie-Anne Chazel qui interpréta le personnage de madame Husson dans la série télévisée Chez Maupassant, saison 2). La mise en scène d´Alföldi tient la route sur le plan du comique de caricature et du comique d´effets, Sur ce plan, on passe une bonne soirée, sans plus.
Albert Herring: J. Kammler (Mr. Gedge),
I. Tsarkov (Kommissar Budd), M. Keys (Lady Billows),
J. O. Mills (Mr. Upfold), D. Uzun (Florence Pike),
L. Subramaniam (Miss Wordsworth)
A écouter les jeunes chanteurs de l´Opéra Studio, on se rend bien compte que l´Opéra munichois continue sur sa lancée sidérale et se prépare de nombreuses années radieuses.
Crédit photographique: Wilfried Hösl
Prochaines représentations: les 9, 11, 14, 21, 23 et 25 avril, le 15 mai et le 3 juin 2016. Voir le site du Bayerische Staatsoper.