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A qui peut profiter l’impopularité de la loi Travail ?

Publié le 19 avril 2016 par Délis

Depuis plus d'un mois, le tonnerre de l'opinion gronde contre la loi Travail engagée par le gouvernement, ce qui a conduit la jeunesse à descendre dans la rue pour manifester son mécontentement et ses attentes. Selon un sondage BVA pour Orange et iTélé, ce sont 51% des Français qui souhaitent que le projet de loi soit retiré ou entièrement réécrit, contre seuls 18% qui désirent le voir maintenu en l'état[1].

Cette hostilité pousse la grande majorité des citoyens (77% selon le même sondage) à prédire les conséquences négatives de la suite du parcours politique de François Hollande en estimant qu'il a plus à perdre qu'à gagner avec ce projet de loi. Cela vient confirmer le bas niveau de popularité du Président de la République - 20% de Français sont satisfaits de son action selon une enquête OpinionWay pour LCI et Metronews[2] - qui voit sa légitimité se fragiliser de plus en plus sur le chemin de 2017.

Plus globalement, ce projet de loi déstabilise tout le gouvernement puisque Manuel Valls bat lui aussi des records d'impopularité. L'action du Premier Ministre ne donne satisfaction qu'à 23% des Français et atteint ainsi son plus bas niveau depuis son investiture selon le même sondage OpinionWay. Cette enquête met également en évidence l'impopularité de Myriam El Khomri dont l'action ne satisfait que 18% des Français, ce qui fait de la Ministre du travail la personnalité la moins populaire du gouvernement. Notons que, depuis le début de l'année, la satisfaction des Français à l'égard de son action est en chute libre (27% en Janvier, 22% en février/mars et 18% en avril).

Le mouvement " Nuit Debout ", organisé par les jeunes au départ sur la place de la République à Paris puis progressivement sur d'autres endroits du territoire français, y est sans doute pour beaucoup. En effet, l'étude BVA pour Orange et iTélé montre que 56% des Français approuvent le mouvement contre le projet de loi sur le Travail, un score qui atteint 72% chez les 18-34 ans.

La défiance à l'égard du projet de loi El Khomri et les manifestations citoyennes laissent donc le champ libre aux autres formations politiques pour se servir de cette occasion comme moyen de récupérer une partie des Français insatisfaits. Peuvent-elles parvenir à en tirer profit ?

Tout d'abord, cette situation met la droite modérée dans une situation difficile. En affichant une opposition " molle " au projet de loi (oui sur le principe mais avec la volonté d'aller plus loin), elle laisse aux formations politiques plus contestataires (Front de Gauche et Front National notamment) le soin de s'emparer du rôle d'opposition intransigeante. D'autant que les sympathisants Les Républicains ne sont pas farouchement hostiles au projet de loi ; selon BVA ce sont même les plus favorables à ce qu'il soit maintenu en l'état (34%), au même niveau que les sympathisants Modem et, plus étonnant, bien au-dessus des sympathisants PS (18%). Les sympathisants Les Républicains sont aussi avec les sympathisants Modem ceux qui approuvent le moins le mouvement contre le projet de loi Travail : respectivement 31% et 28% de soutien au mouvement selon le même sondage BVA.

La mobilisation contre la loi El Khomri peut donc difficilement profiter au parti de Nicolas Sarkozy qui risque de se voir associé au Parti Socialiste et jugé porteur de la même vision économique pour la France, estompant ainsi la frontière droite/gauche et brouillant par la même occasion les repères électoraux des Français. Cette situation pourrait alimenter la stratégie politique de Marine Le Pen qui met droite et gauche de gouvernement " dans le même sac ". Cependant, le FN ne peut tirer que difficilement profit de cette occasion, notamment à cause de l'affaire des Panama Papers qui a révélé l'implication de quelques-uns de ses interlocuteurs proches dans des montages fiscaux complexes pour éviter les taxations. Le parti de Marine Le Pen essaie donc de rester discret et de ne pas trop occuper l'espace médiatique en attendant que l'orage des révélations panaméennes passe.

C'est donc la gauche de la gauche qui a la plus grande opportunité de " récupérer politiquement " le vent de contestation contre la loi Travail, avec en figure de proue, Caroline de Haas, ex-socialiste qui a quitté le parti en 2014 à cause des nouvelles orientations jugées trop libérales du gouvernement. La militante féministe a lancé une pétition il y a plus d'un mois contre le projet de loi du gouvernement qui atteint presque les 1,3 millions signatures[3]. Jusqu'où cet élan peut-il enfler ? Il va falloir que la gauche de la gauche se réunisse et se réorganise pour transposer tous les avantages de la situation politique actuelle dans les urnes.

[1] (http://www.bva.fr/data/sondage/sondage_fiche/1842/fichier_bva_-_orange_-_itele_-_la_mobilisation_contre_la_loi_travail67648.pdf)

[2] http://www.opinion-way.com/pdf/opinionway_le_barometre_metronews_lci_du_changement_dans_laction_politique-avril2016.pdf

[3] https://www.change.org/p/loi-travail-non-merci-myriamelkhomri-loitravailnonmerci


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