de Frédéric Faux, collection Lignes de vie d’un peuple, Ateliers Henry Dougier, Paris, 2016, 142p., 12 euros.
Parfois on dépasse toute une série d’a priori (qui en disent long sur « quel lecteur sommes-nous ? ») au moment d’acheter un livre. Plusieurs titres de la collection sont alignés, couvertures aux couleurs vives, main recouverte de la carte du pays comme unique illustration et titres sobres (Les Boliviens rebelles, Les Espagnols déterminés, Les Mexicains passionnels, Les Mongols insoumis…) identifient de façon très claire la collection.
L’anthropologue ne se sent pas la cible commerciale de la série, rebuté au prime abord par le qualificatif simpliste du titre et le caractère un tantinet oiseux du nom de la collection : « lignes de vie d’un peuple ». Le nom de l’éditeur Henry Dougier n‘évoquera peut-être rien pour lui dans un premier temps. Pourtant, suite à un rapide feuilletage et convaincu(e) par un prix attractif qui prémunit d’une grosse prise de risque, il (elle) peut franchir le pas. Au mieux le risque s’avèrera une bonne surprise et ce fut le cas avec Les Boliviens rebelles.
Déjà, découvrir que l’éditeur fut le fondateur des éditions Autrement rassure, nous place en terrain connu et garantit une exigence éditoriale. Quant à l’auteur, Frédéric Faux, c’est un journaliste résidant en Bolivie depuis 2012. On est donc en droit de le soupçonner de connaître la société bolivienne en profondeur !
Rien à voir avec les textes généralistes (souvent ridicules) d’un guide touristique, organisés autour des classiques catégories géographie/histoire/culture/gastronomie/ dangers et enquiquinements (voir Le routard…). L’auteur (et semble-t-il la collection) a pris le parti de nous présenter la Bolivie par le prisme de quelques photographies très précises (à ne pas confondre avec des clichés.)
Le livre est organisé en 4 chapitres dont les titres peuvent sembler globaux : « Le renouveau identitaire », « le retour de la souveraineté », « Le laboratoire d’El Alto », « Une société sous tension ». Or, il n’en est rien. Chacun est introduit par un entretien puis est décliné à partir de plusieurs situations singulières juxtaposées – au lecteur d’opérer les liens qu’il souhaite, présentées grâce à un réel travail d’investigation. Aux généralités, l’auteur préfère les personnages singuliers et restitue la diversité de la société bolivienne, par petites touches.
Il permet ainsi d’accéder à une compréhension qui, d’expérience, est difficile à atteindre lors de courts séjours. Outre son travail d’enquête approfondi, Frédéric Faux , et c’est appréciable, cite et interviewe des chercheurs locaux (historiens, juristes, sociologues et anthropologues) qui apportent un éclairage pointu supplémentaire. Notons pour finir que l’auteur nous dispense aussi de commentaires superflus et de jugements de valeurs.
En conclusion, un livre efficace et non prétentieux, cela vaut parfois la peine de laisser de côté ses a priori !
Colette Milhé
