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"Rachida Dati" : quand une femelle transgresse les règles du pouvoir

Publié le 16 juin 2008 par Muzard

Rachidat-dati-dior-yves-saint-laurent Depuis quelques semaines, on assiste à une campagne en règle, contre la Ministre de la Justice, Rachida Dati. Pourtant au début du règne de Sarkozy, elle était encensée par les médias et par l’opinion et soudain c’est le désamour brutal. Au moyen âge, Rachida aurait été brûlée sur le bûcher de la vindicte populaire, comme une vulgaire sorcière. Si la critique d’un ministre est chose courante, c’est la violence de la critique qui interpelle et qui fait écho aux campagnes de haine contre d’autres femmes de pouvoir, l’ex premier ministre socialiste Edith Cresson ou encore Margareth Thatcher. Ce qui surprend aussi, c’est la nature des critiques qui portent sur la personne plus que sur sa compétence professionnelle. C’est d’ailleurs sur « Ses caprices » que l’Express titre le dossier à charge qu’il lui a consacré la semaine dernière.

Ces manifestations d’hostilité sont révélatrices de la relation des primates humains avec le pouvoir et avec les femmes de pouvoir en particulier.


Elles nous rappellent que l’homme a choisi un modèle d’organisation patriarcal contrairement à nombre de ses cousins singes qui ont préféré confier le pouvoir aux femmes de leur troupe (babouins, patas, bonobos…).

Les femmes au pouvoir se comptent donc encore sur les doigts d’une main.

Si les femelles dominantes sont tolérées, c’est à une condition, elles doivent faire oublier leur sexe. Il leur faut gommer tous les attributs de la séduction. Et là, Rachida Dati commet sa première erreur, puisqu’elle se refuse à « mimer » les mâles. Aux tailleurs pantalons stricts, elle préfère robes, bijoux et talons aiguilles. Et n’hésite pas à poser en star, dans une robe moulante super sexy pour Match. Elle exhibe ses appâts féminins, c’est impardonnable ! La magistrature ne la rate pas « Elle s’est trompée de robe » s’exclame Dominique Barella* tandis qu’un autre magistrat la traite de « Barbie ministre ».

Rachida Dati finit par reconnaître qu’elle a bafoué le sacro-saint principe primate « on ne peut pas être ministre et coquette » déclare t-elle.

Il est vrai que son style « bling bling »et son goût du luxe aggravent quelque peu son cas. Pour une femme, si exercer le pouvoir est déjà une transgression, se comporter en séductrice alourdit son casier et exhiber les signes de distinction sociale passe pour de la provocation.

Dans les sociétés de singe les plus évoluées, on n’affiche pas aussi ostensiblement « sa réussite sociale ».

Ceci étant, ses goûts vestimentaires et son style séducteur n’expliquent pas à eux seuls la disgrâce de la Ministre.

Rachida Dati a commis une autre erreur en bafouant un principe primate clef : dans les sociétés de singes matriarcales, les femmes qui dominent ne se comportent pas comme les mâles au pouvoir. Le style de gouvernement de la femelle diffère de celui du mâle. En particulier, elles ne paradent pas pour affirmer leur pouvoir. Elles ne « crient pas », ne se livrent pas à des démonstration de force ou d’agressivité et préfèrent confier à un mâle (leur second) le soin de protéger la troupe, de sanctionner les rebelles. Si le mâle ne fait pas l’affaire, elles le virent.

Chez les Patas une espèce de singe organisée autour de l’autorité des femelles, le mâle dominant demeure le chien de garde de la troupe raconte Desmond Morris. La femelle dominante délègue les démonstrations d’autorité à ses mâles subordonnés.

En d’autres termes, une femelle au pouvoir ne se comporte pas de manière agressive, brutale ou autoritaire.

Il faut croire que dans notre inconscient collectif cette règle primate est toujours à l’œuvre, si l’on tolère une femelle au pouvoir, on ne supporte pas les chefs autoritaires. La main de fer doit être recouverte d’un épais gant de velours, sinon c’est le rejet assuré par la tribu.

Autrement dit, la femme au pouvoir doit ressembler physiquement à un mâle mais se comporter en femelle.

C’est peut-être ce que Rachida Dati a quelque peu oublié. Quand elle est dans l’adversité, elle a du mal à rester la séductrice qu’elle joue si bien sur les podiums et devant les projecteurs… Elle sort un peu trop vite les crocs. Crises d’autorité face aux subordonnés de son cabinet, accès de colère devant des journalistes ou des députés qui la critiquent… Autant de parades d’autorité qui sont l’apanage des mâles !

Heureusement qu’elle a retenu la leçon de ses cousines singes, elle sait que le vrai pouvoir pour une femelle, est d’être soutenue par le mâle dominant. Tant que Sarko la soutient, elle pourra continuer à transgresser les autres règles primates… mais au prix de sa popularité.

*Ancien président de l’Union Syndical de la magistrature


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