Back Home // De Joachim Trier. Avec Jesse Eisenberg, Gabriel Byrne et Isabelle Huppert.
Back Home a réussi un tour de force assez peu commun de faire vivre au cinéma quelque chose qui avait un peu disparu, à Sundance notamment. Joachim Trier a su faire de son film quelque chose de fort et riche tournant autour du deuil. Le deuil n’est pas ce qu’il y a de plus facile à faire ressentir ou en tout cas ce n’est pas facile de mettre des mots sur ce que chacun peut ressentir à ce moment. Ce film reste cependant assez confortable dans son ensemble et ne sort pas forcément des rails mais aidé par un casting solide, Back Home parvient à toucher le spectateur et à nous proposer quelque chose de sympathique. Derrière l’aspect prévisible de l’ensemble (en même temps, ce n’était pas facile de faire autrement) se cache un film qui ne cherchait pas à être original et qui s’assume en tant que tel, en tant qu’objet étrange dans un monde où le cinéma semble avoir un peu perdu ce côté contemplatif des choses qui était légion il y a quelques années de ça. Désormais, c’est plus vers les séries qu’il faut se tourner pour voir des oeuvres de ce genre là (je pense à The Affair notamment dans une histoire diamétralement différente).
Alors que se prépare une exposition consacrée à la célèbre photographe Isabelle Reed trois ans après sa mort accidentelle, son mari et ses deux fils sont amenés à se réunir dans la maison familiale et évoquer ensemble les fantômes du passé…
Back Home est donc surtout centré sur la relation entre deux frères et la façon dont ils gèrent chacun de leur côté et ensemble leur dépression suite à la mort de leur mère. Si Joachim Trier ne me bluffe pas ici autant qu’il l’avait fait avec le brillant Oslo 31 août c’est en grande partie dû au fait que finalement Back Home n’a pas voulu être si différent que ça. Le film reste intelligent dans sa manière de porter à certains moments les fulgurances du cinéaste mais cela manque peut-être d’un peu de corps à l’ouvrage. On veut nous expliquer tout un tas de choses mais ce n’est pas suffisant pour voir celui-ci fonctionner comme il se doit. On peut tout de même saluer la mise en scène, élégante jusqu’au bout, qui sait lécher l’oeil d’un spectateur qui justement ne se penche que très rarement sur des oeuvres de ce genre là ces dernières années. Mais sans proposer énormément de choses piquantes, le film reste trop gentil, trop en surface pour véritablement aguicher le spectateur. Parfois, un film qui veut être parfait et fait attention à tous les détails, ce n’est pas forcément le meilleur chemin à prendre.
Cela ne veut pas pour autant dire que je n’ai pas passé un bon moment mais je m’attendais surtout à beaucoup plus. Peut-être car Joachim Trier m’avait ébloui avec son précédent film, ou bien uniquement car Back Home aurait pu porter beaucoup plus de choses sur ses épaules. Il y a malgré tout cela de bonnes idées, une relation fraternelle intéressante et un ensemble très joli mais les flash-backs sont par exemple un peu dérisoires et n’apportent pas la profondeur nécessaire à la relation que ces deux fils entretenaient avec leur mère. Ce ne sont que des bribes de moments où Back Home cherche la contemplation beaucoup plus qu’autre chose. Jesse Eisenberg et Devin Druid sont les rayons de soleil ici. On oublie très facilement Isabelle Huppert dont le rôle reste anecdotique en incarnant la mère décédée dans des flashbacks. Mais même Gabriel Byrne, taciturne et monolithique. Non pas que cela soit un défaut car il incarne la vision du deuil par son personnage, mais tout s’efface afin de se concentrer sur le reste et ce qu’il y a de plus intéressant.
Note : 5.5/10. En bref, après Oslo 31 août, Joachim Trier ne réitère pas l’exploit du chef d’oeuvre.
Date de sortie : 9 décembre 2015